Dans les prochains jours, Aliou Boubacar Diallo devrait annoncer sa candidature à l’élection présidentielle du mois de juillet. Le « Macron malien », comme le décrivent les médias locaux, a pour ambition de mettre un terme aux clivages politiciens classiques pour redonner espoir à la jeunesse de son pays.
Selon Maliweb, l’événement se passera lors d’une Conférence Nationale de son parti (ADP-Maliba) prévue les 10 et 11 Mars à Nioro du Sahel, dans la région de Kayes d’où il est originaire. Une candidature qui ne fait plus guère de doute à en croire le site d’information, selon lequel le président du parti ADP-Maliba a accéléré les manœuvres ces dernières semaines entre visites de terrain et messages à ses partisans.
La candidature d’Aliou Diallo, si elle se confirme, s’inscrit dans un contexte très particulier au Mali. Depuis 2012, le pays est en proie à une crise qui a débuté par un conflit armé mené par des groupes armés à revendications séparatistes avant de se transformer en une longue et laborieuse phase de guerre asymétrique entre l’Etat central et des groupes terroristes affiliés à Al Qaida. Face à l’ampleur du phénomène, le gouvernement semble totalement impuissant.
Cette situation sécuritaire tendue au Nord s’est progressivement étendue au Centre et au Sud avec une forte dimension communautaire dans les zones de Mopti. Tout ceci se double d’un environnement économique morose, mais aussi et surtout de scandales politico-financiers à répétition impliquant les proches du Chef de l’état malien, ternissant de fait l’image de toute la classe politique classique malienne.
Dans ce schéma de déception populaire, la carte Aliou Diallo semble de plus en plus intéresser aussi bien les populations maliennes que certains leaders religieux influents qui continuent à craindre l’expansion d’un dangereux extrémisme dans le pays. L’homme pourrait bien se poser en conciliateur et en homme de la relance économique et de l’équilibre social du Mali.
Dans la capitale malienne, tous les avis convergent. Avec cette conjugaison de facteurs, tous les ingrédients sont réunis pour que le président sortant, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) et son parti (le Rassemblement pour le Mali), soient victime du même vent de « dégagisme » qui a soufflé en France au printemps dernier. Il se murmure même qu’à l’image de François Hollande, IBK pourrait renoncer à se présenter à un scrutin désormais jugé ingagnable (selon Le Monde, l’Elysée ferait même pression pour qu’il se retire).
Les Maliens ont soif de changement. Ils ne croient plus aux vieilles recettes politiciennes ni aux hommes qui les portent depuis plus de trente ans. Une réalité qui, encore une fois, résonne avec la réalité vécue et décrite par le président français : « Je ne suis pas l’enfant naturel du temps calme en politique. Je suis le fruit d’une forme de brutalité de l’Histoire, d’une effraction, parce que la France était malheureuse et inquiète », a récemment confié Emmanuel Macron.
Aliou Diallo se profile comme le porte-drapeau de cette « brutalité de l’Histoire » qui amène de nouveau visages à emerger. Le Mali est malheureux et inquiet. Il cherche des réponses que ses élites politiques classiques ne savent plus lui apporter. Peut-être se fait jour l’envie de tenter autre chose? De croire dans l’énergie et le volontarisme d’un homme que rien ne prédisposait à un destin politique?
Fils d’un cheminot de Kayes, Aliou Diallo s’est construit tout seul, loin des cénacles de la jeunesse dorée bamakoise. Homme d’affaires connu et respecté, il doit sa fortune à un rêve et une obstination : créer la première mine industrielle d’or à capitaux majoritairement nationaux du pays. Ce sera Wassoul’Or!
Un premier acte cumulé à une soif d’entreprendre qui font aujourd’hui d’Aliou Diallo l’un des hommes les plus riches du pays. L’un des premiers philanthropes aussi par le biais de sa fondation (Maliba). Des éléments qui sont autant d’atouts dans le contexte politique actuel, où l’entourage du chef de l’Etat est régulièrement accusé de s’accaparer les deniers publics. Aliou Diallo peut pour sa part se targuer de n’avoir nullement besoin de politique pour vivre. Et les Maliens le savent.
A la tête de la troisième force politique du pays, le président d’ADP-Maliba a de vraies chances de fédérer autour de son nom une grande partie de l’opposition. De quoi envisager une candidature unique face à IBK ou son remplaçant du parti présidentiel ? Trop tôt de le dire mais les prochaines semaines nous en diront plus sur les rapports de force et la volonté de changement des représentants politiques maliens.