Le ministre de la Santé et de l’hygiène publique, le Pr Samba Ousmane SOW, a présidé, hier lundi à l’hôtel Salam de Bamako, la cérémonie de présentation du rapport de l’Unicef, intitulé « Pour chaque enfant, une chance de vivre». Selon ce document, dont le contenu a été rendu public, le Mali figure parmi les 10 pays avec le taux de mortalité néonatale les plus élevés du monde.
La cérémonie était couplée avec le lancement de la campagne «Every Child Alive » de l’Unicef dont l’objectif est de lancer un appel urgent à tous les acteurs de développement sur cette tragédie que représente le décès des nouveaux nés ; de partager la conviction que le décès des nouveaux nés ne sont pas une fatalité ; de faire comprendre qu’il est possible de sauver des millions de vies chaque année.
La campagne vise également à susciter l’engagement des décideurs politique, des agents de la santé, des partenaires techniques et financiers, du secteur privé pour apporter une réponse adéquate à l’injustice faite aux nouveau-nés et leurs familles.
Ces événements se sont déroulés en présence de la représentante de l’UNICEF au Mali, Lucia ELMI ; du représentant de l’Organisation mondiale de la santé au Mali (OMS), Kouadio THEODORE ainsi que plusieurs organisations d’enfance au Mali….
Moins 1/3 des CSCOM au Mali est capable de faire des soins de base
Le responsable de la section survie et développement de l’enfant, Aboudou Karimou ANDELE a présente sommairement le contenu de ce rapport qui établit un diagnostic sur la situation sanitaire des 10 pays dans le monde qui fournissent moins d’efforts dans la lutte contre la mortalité néonatale et infantile.
Le Mali, cité parmi ces pays en retard dans ce combat, a un taux de mortalité néonatale d’un enfant sur 28, a relevé M. ANDELE.
Selon le rapport en citant l’enquête MICS 2015, dans certaines régions du pays, notamment à Ségou, ce taux est encore plus alarmant. Dans cette localité, un enfant sur 20 ne survit pas au-delà de ses premiers 28 jours, tandis qu’un enfant sur 12 ne fête jamais son 5e anniversaire.
«Plus de 80% des nouveaux nés décédés en 2017 sont de causes évitables », a déploré le responsable de la section survie et développement de l’enfant.
Aussi, a-t-il précisé, les principales causes de ces décès sont dues à l’infection 34% ; à la prématurité 24% ; à l’asphyxie 19%, au tétanos 10% ; à la diarrhée 4% ; à la malformation congénitale 4%, etc.
Par ailleurs, a-t-il alerté, si rien n’est fait pour inverser la tendance en prenant des actions qu’il faut, au Mali 33 304 nouveaux ne vont pas survivre en 2018.
A côté de ces chiffres effrayants, le rapport signale que l’un des gros soucis du système de la santé au Mali est la qualité des ressources humaines et de nos centres de santé.
En effet, à en croire à M. ANDELE, seulement 30 Centres de santé communautaire (CSCOM) au Mali sur 210 évalués sont capables de prendre en compte de façon sérieuse tous les besoins d’une femme enceinte, précisément des Soins obstétricaux et néonataux d’urgence de base (SONUB). Ces CSCOM sont repartis entre Bamako, Sikasso, Ségou, Mopti et Kayes. Cette situation prouve, selon M. ANDELE, l’urgence des efforts à fournir.
Après ce survol sur le rapport, le représentant de l’OMS à cette cérémonie s’est appesanti sur la problématique du personnel qualifié de la santé. Il estime que le Mali ne peut atteindre les objectifs de la lutte contre la mortalité néonatale et infantile sans des ressources humaines qualifiées dans les structures de soins.
« Pour avoir des soins de qualité, la norme exige au moins 23 agents qualifiés dans une structure de santé. Or au Mali, la moyenne nationale est de 11,2. Cette densité diminue au fur et à mesure quand on s’éloigne de Bamako. Ce qui fait que dans certaines localités ce chiffre diminue jusqu’à 5,7 », a expliqué Kouadio THEODORE.
La représentante de l’Unicef, pour sa part, a ajouté qu’au-delà des aspects de santé évoqués pour expliquer le taux élevé de la mortalité néonatale au Mali, il y a des raisons culturelles, à travers le mariage des enfants.
« 49% des femmes de 20-49 sont mariées avant l’âge de 18 ans et 16% des femmes de 15-49 ans sont mariées avant l’âge de 15 ans. Des jeunes filles qui deviennent mères alors qu’elles n’ont pas encore l’âge ni la force physique de donner naissance, c’est un danger pour leur propre vie et celle de leur nouveau-né. Alors, la malnutrition est un facteur aggravant de la mortalité néonatale », a indiqué le responsable onusien.
Le Mali, 2è pays africain en mortalité infantile
Dans ce combat contre la mortalité au Mali, a fait savoir sa représentante, l’Unicef Mali est un partenaire important du gouvernement malien.
«Main dans la main avec le gouvernement, l’Unicef Mali travaille à améliorer les plateformes techniques des établissements de santé en les dotant en équipements, former le personnel des soins obstétricaux néonataux d’urgence (SONU) et des soins essentiels du nouveau-nés (SENN)», a-t-elle soutenu.
«Chaque enfant a droit au meilleur départ possible dans la vie. Nous devons investir dans les premiers moments de vie des enfants du Mali, non seulement pour les enfants, mais aussi pour le développement du pays », a déclaré Lucia ELMI.
Le ministre de la Santé, de son côté, s’est réjoui de l’initiative de la campagne « Every Child Alive » de l’Unicef-Mali. Il a ensuite confirmé les informations données par le rapport «Pour chaque enfant, une chance de vivre» en précisant que le Mali est le deuxième pays africain, après la Centrafrique, à avoir le taux de décès le plus élevé de 0 à 5 ans.
«Le problème de cette situation est dû au système sanitaire de notre pays. Il y a lieu de réajuster le système sanitaire du Mali. Sans ce changement, dans cinquante ans, le Mali restera au même niveau », a prophétisé le ministre SOW.
Il estime déjà que l’Etat fait de son mieux pour améliorer les conditions de santé au Mali. Mais à un autre niveau, a-t-il déploré, ces efforts du gouvernement sont sapés par la mauvaise gestion, le mauvais accueil dans les structures de santé.