Les temps et les mentalités changent en Afrique. Les électeurs ne supportent plus de voir des fils de président faire fortune en toute opacité le temps d’un mandat, tout en accaparant les leviers d’un pouvoir pour lequel ils ne sont pas qualifiés. Au Mali, la drôle de trajectoire de Karim Keïta menace la réélection de son père.
Karim Keïta est né et a grandi à Paris, avant d’entreprendre des études supérieures au Canada et en Belgique. Tardivement, dans le sillage de l’élection de son père à la présidence en 2013, il s’est installé au Mali. Grand bien lui en a pris, tant sa carrière a connu une ascension fulgurante au cours des cinq années passées.
A 34 ans, sans la moindre expérience ou légitimité politique, il devient député. Promotion expresse pour ce « fils de », il est aussitôt élu par ses pairs président de la Commission défense, sécurité et protection civile de l’Assemblée nationale. Un poste stratégique dans un Mali en guerre contre des groupes djihadistes… et pour lequel Karim Keïta n’a pas la moindre qualification.
La suite du parcours de Karim Keïta est encore beaucoup plus difficile à suivre. Le salaire mensuel d’un député malien étant fixé à 2'100 euros environ (1,4 million de Fcfa), certains éléments du train de vie du fils du président Ibrahim Boubacar Keïta, interrogent.
Passons sur son goût des montres de luxe (il a été pris en photo avec au poignet une Rolex d’une valeur de 35'000 euros), des voitures de luxe (la presse malienne parle notamment de deux Rolls Royce, d’une Porsche et de plusieurs 4X4 hauts de gamme) et de tous les signes extérieurs de bling-bling qu’il a longtemps étalé sur les réseaux sociaux à la manière d’un rappeur américain.
Mais les médias maliens, ont relevé des investissements dont les montants posent beaucoup plus de questions sur la fortune de Karim Keïta. Selon le journal Le Sphinx, le fils du président IBK a acquis un hôtel de luxe de Bamako pour plus de six millions d’euros (4 milliards de Fcfa). Le site d’actualité Bamada.net évoque l’achat d’un terrain dans le Mandé pour 1,5 million d’euros (1 milliard de Fcfa).
Des investissements loin d’être anodins et qui posent beaucoup de questions. Comment un trentenaire, sans fortune familiale connue, peut-il disposer de telles sommes alors que son activité principale (député) ne justifie pas ce type de revenus ?
Des questions que se posent depuis cinq ans les Maliens, ulcérés par ces marques d’un népotisme, à l’heure où le pays traverse la plus grave crise de son histoire. Menacé dans son intégrité territoriale, confronté à un chômage de masse (en particulier chez les jeunes), le Mali ne goûte que modérément les frasques du fils du président.
A tel point que Karim Keïta est devenu un point de fragilité pour la présidentielle de juillet prochain. Et c’est une bonne chose. Les populations africaines ne peuvent plus accepter de se faire mener en bateau par des élites qui ne pensent qu’à ponctionner au maximum les caisses de l’Etat pendant que le peuple peine à survivre.
En 2017, il ne devrait plus y avoir de Karim Keïta sur le continent. Être « fils de » ne donne pas un droit à piller le pays et à s’accaparer en famille les plus hautes fonctions.