Au galop, il s’embourbe dans une offensive de destruction contre son cousin à plaisanterie. Comme pour se donner bonne conscience, il s’agrippe à un montage grotesque de mensonges qui conduit le jeune Sidibé en détention préventive à la Maison Centrale d’Arrêt (MACA) de Bamako Coura. Chauffeur de son état, le tort de ce dernier est d’être à l’origine d’un accident, pourtant pas mortel et d’aucune gravité extrême. Mais pour l’argent, Bagayogo s’enflamme et ne veut pas voir le jeune Sidibé en liberté. Pour des motifs dignes d’un débile. Suivez notre regard !
” Seul le silence est grand, tout le reste est faiblesse “, dit l’adage. Ainsi, depuis quelques temps, nous avons pris notre mal en patience, jusqu’à ce jour où nous tenons finalement à rendre public, ce qui nous oppose à ce jeune Bagayogo. Evidemment, votre fidèle serviteur est civilement responsable dans cette affaire.
Tout a commencé le 03 décembre 2017 vers 12 h 45 mn, quand mon véhicule, conduit par le jeune Sidibé, heurte la moto Djakarta du sieur Bagayogo, transportant son épouse enceinte. C’était sur la route de Lassa, en provenance de Kati d’où le véhicule venait, avec à bord un vieil homme malade qui y prenait des soins. L’accident est survenu suite au lâchage des freins alors qu’un dos d’âne faisait obstacle à la moto qui freina, et le chauffeur ne pouvant rien faire, le véhicule heurta la moto avant d’être braqué pour sortir de la route et stopper sur un monticule. La moto, suite au choc, échappait au contrôle de Bagayogo car la roue avant se soulevait, la femme tombait, et Bagayogo lui-même et la moto retrouvaient le sol.
Ensuite commencent les entretiens. Ainsi, Bagayogo déclare que son épouse est enceinte et que son souci est qu’elle soit soignée au plus vite. Alors elle est aussitôt transportée à l’infirmerie du Badialan par un motocycliste qui prête volontiers ses services. Elle reçoit les premiers soins, puis l’échographie qui ne signale aucun danger pour le futur bébé et la maman. Un taxi est loué pour transporter le mari au chevet de son épouse et pour recevoir des soins. Sur un premier coup de fil, je reçois l’information et j’envoie l’argent demandé. Le second coup de fil m’indiquait que la prise en charge complète de l’épouse a été faite, et que Bagayogo a dit qu’il prend lui-même en charge ses soins d’un montant de trois mille (3 000) francs CFA, puisque ses interlocuteurs ont été gentils, et n’ont plus d’argent. Le médecin traitant expliqua qu’il n’a pas eu la même chance, parlant de son cas où le chauffeur a pris la tangente.
Pourtant, c’est alors que Bagayogo retrousse ses manches pour un combat sans fin. Il m’appelle au téléphone pour dire qu’il reste sa moto. Je lui ai demandé s’ils ont fait un constat. Négatif. Je lui dis alors qu’ils ont été tous naïfs car le véhicule est assuré et il revient à l’Assurance de prendre les charges. Bagayogo s’énerve et riposte en ces termes : ” tu blesses ma femme enceinte et tu dis que c’est l’Assurance qui prend en charge “. Je lui dis que je suis venu en aide dans la mesure de mes moyens et par obligation morale car c’est aussi une règle de prendre en charge les premiers soins d’une part, tout comme de porter assistance à personne en danger d’autre part. J’ai ajouté que c’est dimanche, je suis sur mon journal, de me rappeler lundi. Ce qu’il fit. Alors je lui demande combien il veut. Entre temps j’ai pris les renseignements qui indiquent que la fourche avant a été tordue et la boîte à phare et clignotants endommagée. Bagayogo me demande de décider ce que je peux payer. Alors je lui envoie dix mille (10 000) francs CFA. Il me dit que c’est insuffisant, qu’il croyait que je lui donnerai au moins cinquante mille (50 000) francs CFA. Je lui propose alors d’amener la moto à un réparateur pour une réparation facturée que l’Assurance pourrait me rembourser. Bagayogo dira que je me moque de lui et que si je ne lui donne pas les cinquante mille FCFA, alors on va régler le problème ailleurs. Je lui ai dit d’aller là où il veut.
Trois semaines plus tard, alors que le véhicule revenait de Kati avec le même malade, Bagayogo le fait intercepter par un policier suite à un soit-transmis, direction Kati. Le commissariat en question se dit incompétent car l’accident s’est produit hors de sa zone d’intervention. Les voilà alors au Commissariat du 2ème Arrondissement de Bamako dit de la poudrière. Le dossier est ouvert. Mais vu l’état du malade, et son âge, l’inspecteur suspend la séance et demande aux protagonistes de revenir le lendemain.
Au commissariat le lendemain, suite aux échanges, un policier nous appelle de côté et rappelle qu’un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès. J’ai indiqué que Dieu accepte les prières et que je ne saurai refuser cette demande, et que concernant les quarante mille qui restent sur les cinquante mille demandés par Bagayogo, je dispose sur place de trente mille. Bagayogo rétorque aussitôt que maintenant il faut plus de cent mille car il y a eu des suppléments de dépenses. Ledit policier a aussitôt tourné le dos et j’ai fait de même. J’ai alors recueilli une attestation de demande de prise en charge par l’Assurance (Lafia) qui a donné une réponse favorable, en m’indiquant que désormais c’est l’Assurance qui fera face au problème. Entre temps, la police a confisqué le permis du chauffeur au motif qu’il lui sera remis lorsqu’il reviendra avec l’engagement de l’Assurance. Le jour où le chauffeur est revenu avec cet engagement, jeudi 22 février 2018 aux environs de 15 heures, la police l’a conduit au tribunal de la Commune III et il fut déféré de ce pas à la MACA. Il m’appelle en cours de route pour m’informer. Je n’en revenais pas.
Alors le vendredi matin, je décide de me rendre chez l’un des Substituts du Procureur, celui que je connais. Je trouve qu’il est remplacé par un autre. A ce dernier, j’ai dit que je voudrai savoir le comportement désobligeant imputable à Sidibé que je connais pourtant pour sa sagesse exemplaire. Car à ce que je sache, l’accident n’était pas mortel, le chauffeur dispose d’un permis, et j’ai pris complètement en charge les premiers soins avant de remplir la procédure pour que l’Assurance s’engage à garantir le reste comme cela se doit. Le substitut en question dira que dès lors qu’il y a blessure, et vu que la victime est venue se plaindre en disant que celui qui a blessé son épouse se promène tranquillement, et que personne n’est partie s’enquérir de l’état de santé de son épouse, alors il se demande s’il y a une justice au Mali. ” Un tel individu est capable d’aller nous discréditer sur les antennes de la radio, alors pour le soulager j’ai procédé à l’arrestation de Sidibé “.
Je demande alors au Substitut, puisqu’il connaît maintenant la vérité, de s’impliquer à retirer le chauffeur de la MACA. Il dit qu’il n’a pas ce pouvoir, et que seul le Procureur, suite à une demande de mise en liberté, peut le sortir de là. Toute la matinée, le Procureur ne regagne pas son bureau, à cause d’une réunion au ministère. L’on me dit que généralement le vendredi matin il est là, pas le soir. Le lundi, je reviens, mais le Procureur me dit que le rôle ayant été établi le vendredi matin, il n’est pas recommandé d’ajouter un autre dossier pour mardi, cela pourrait susciter des suspicions et le juge pourrait renvoyer l’affaire en délibéré pour quinze jours, certainement afin d’y voir clair. Il a donc fallu attendre une semaine encore, notamment mardi dernier, pour que la demande de mise en liberté provisoire puisse être examinée. Et bien sûr, le juge a prononcé la liberté provisoire pour Sidibé. Mais ce n’est que ce vendredi qu’il pourra sortir de la MACA, car toute la journée d’hier, il était encore privé de sa liberté. Sacrée justice malienne. Une véritable catastrophe pour les citoyens honnêtes.
Chers lecteurs, nous ne sommes pourtant pas au bout de nos appréhensions. Au plan traditionnel, voilà un Bagayogo (forgeron) qui fait emprisonner un Sidibé (peulh). Cela peut passer car la justice n’en a cure. Mais le hic, c’est que lui il n’a pas de permis de conduire, sa moto n’est pas assurée. S’il est libre de fouler aux pieds nos traditions, il ne devrait pas pouvoir enfreindre à nos lois et narguer ceux qui sont en règle vis-à-vis de la loi. Mais le procès est prévu dans deux mois, le 08 mai 2018. Et Sidibé devrait faire tout ce temps à la MACA, n’eut-été la sage décision du tribunal le mardi dernier, étant donné que Sidibé bénéficie de toutes les garanties lui accordant cette liberté au terme de la loi énoncée par le juge lors du délibéré. A Bagayogo nous dirons de s’apprêter, car la balle est dans son camp. Il nous pousse à bout de patience et de tolérance. Il voudrait ne pas faire face à l’Assurance car il ne remplit pas les conditions dignes du citoyen accomplissant ses devoirs civiques. Déjà dans la forme sa requête devrait être rejetée par la police et la justice. Sans permis ni assurance, personne ne devrait l’écouter au nom de l’Etat malien. Et nous avons espoir qu’il ne sera plus écouté. Et le 8 mai, connaissant nos droits, nous ferons de sorte que l’Assurance soit citée pour faire droit à la garantie qui nous couvre. Nous n’avons pas pris l’Assurance pour qu’elle ne serve à rien, encore moins que cette légalité soit ignorée au profit d’un hors-la-loi qui, plutôt est la personne indiquée pour séjourner à la Maison Centrale d’Arrêt.
En tout état de cause, la justice malienne est vivement interpellée. Si au motif des blessures légères (aucune fracture, aucun avortement, etc.) et malgré l’absence de fiches médicales attestant de cas graves, malgré l’absence d’hospitalisation, l’on devrait priver les chauffeurs de leur liberté, alors il aurait fallu créer mille prisons à Bamako car chaque jour s’y passent de nombreux accidents.
Et d’ailleurs, selon l’OMS, les accidents de la route dans le monde tuent chaque année environ 1,3 million de personnes et font de 25 à 50 millions de blessés. Ils constituent en outre la première cause de décès chez les jeunes âgés de 15 à 29 ans.
En ce qui concerne le Mali, l’analyse des statistiques fait ressortir que le District de Bamako enregistre, à lui seul, plus de la moitié des victimes d’accidents survenus sur l’ensemble du territoire national de 2014 à 2016. Ce qui a, du coup, fait des accidents de la route la première cause d’engorgement des services d’urgence des hôpitaux. Selon les données fournies par les hôpitaux et les centres de santé, chaque année, c’est à peu près 600 personnes qui y meurent.
Enfin, dans le cadre de la mise en œuvre de ses actions de prévention, de préparation et de réponse aux accidents, aux sinistres et aux catastrophes en 2015, la direction générale de la protection civile a enregistré au total 13.308 interventions totalisant 655 cas de décès et 19.356 blessés avec le traitement des accidents de la circulation au nombre de 11.144 cas dont 410 morts 18.287 blessés. Alors, a-t-on emprisonné 11.144 chauffeurs en 2015, et où ?
En tout état de cause, un accident, surtout celui causé par Sidibé est involontaire, dans le cas échéant on parlerait d’homicide. Signalons d’ailleurs que Mme Bagayogo a accouché, elle et le bébé se portent bien, très bien même. Dieu soit loué.
Vivement le 08 mai 2018 pour le procès que nous attendons fermement. Nous en débattrons de long en large avec les juges, sans détour. Et Bagayogo a intérêt à avaler sa cupidité, car il n’aura pas le moindre sou de notre part, il souffrira de voir Sidibé en totale liberté. Il ne pourra plus tromper qui que ce soit, il y aura justice comme ce fut le cas mardi passé.