L’avènement de la IIIème République au Mali a été marquée par une ère de renouveau démocratique, à la suite de la révolution de mars 1991.
Plus de deux décennies après sa mise en place, le modèle démocratique et institutionnel est fortement décrié par les maliens qui s’identifient de moins en moins aux institutions, aux acteurs politiques et aux dispositifs électoraux.
C’est ce qui ressort du rapport du colloque du 4 novembre 2017 du centre d’études et réflexion au Mali (CERM) présenté à la presse samedi denier à la maison du partenariat.
C’était en présence de M. Ousmane Sy, président du CERM, M. Amadou Diop membre de l’organisation et M. Philipp Goldberg, représentant résident de la fondation Friedrich Ebert Stiftung (FES).
Selon M. Philipp Goldberg, représentant résident de la fondation Friedrich-Ebert-Stiftung (FES) 25 ans après l’avènement de la démocratie au Mali, il demeure opportun et réaliste de faire une évaluation de la pratique et des perspectives du modèle démocratique malien.
C’est pourquoi, M. Goldberg saluera l’initiative du CERM et ses engagements à susciter le débat démocratique autour des questions-clés dont les réponses sont indispensables à une démocratie exemplaire. Il a enfin réitéré la disponibilité de son organisation à poursuivre et à renforcer davantage le partenariat qui lie son institution au CERM.
M. Ousmane Sy, président du CERM a pour sa part souligné que son organisation a été mise en place pour réfléchir et instaurer un débat public afin que notre pays puisse sortir de la crise avec les solutions des maliens.
« C’est ce qui a motivé l’organisation de ce colloque (le 4 novembre 2017) sur le bilan et perspective du modèle démocratique malien après un quart de siècle de fonctionnement », a expliqué le président du CERM.
Selon lui, il est important pendant des moments de crise que nous ayons le courage de nous interroger sur les forces et faiblesses de notre modèle démocratique afin de l’adapter aux réalités qui sont les nôtres. « Elle (la démocratie malienne) est certes bâtie sur des principes universels, mais le modèle ne peut qu’être malien pour nous servir», conclura M. Sy.
Evaluer le chemin parcouru
Dans présentation, M. Amadou Diop, membre du CERM a rappelé que son organisation a été créée le 27 avril 2015 suite au constat d’insuffisance de débat public, de solutions nationales aux problèmes nationaux, à la faible reconnaissance de la fonction intellectuelle au Mali et à la nécessité impérative de nourrir la réflexion pour que notre pays puisse faire face aux nombreux défis et enjeux de ce 21ème siècle.
Parlant du colloque, M. Diop dira que l’objectif était de faire un bilan du système démocratique politique et institutionnel du Mali, plus de 25 ans après sa mise en place pour dégager des pistes concrètes d’amélioration destinées à lui donner un second souffle répondant aux attentes des maliens.
Dans cette perspective, dit-il, le colloque a abordé 4 thématiques relatives aux questions politiques et institutionnelles, aux partis et groupements politiques, aux compétitions électorales et aux contre-pouvoirs et le contrôle citoyen.
Pour ce qui est des questions politiques et institutionnelles, selon M. Diop, on dénombre la compétition électorale limitée par l’organisation partisane lâche, l’insuffisance de représentativité sociale et professionnelle des élus et de la classe politique, la prédominance de l’exécutif et particulièrement du président de la république, l’incompréhension des processus démocratiques et une certaine culture du monolithisme.
A cela s’ajoutent, la très faible participation des maliens aux processus électoraux et à la gestion de collectivités territoriales, la fraude électorale et la corruption récurrente, le nomadisme, la transhumance politique et la régression des idéologies politiques.
Concernant les questions des partis et groupements politiques, le conférencier a expliqué qu’en plus d’une absence d’idées, de projets, d’idéologies, indigence intellectuelle, déresponsabilisation des militants et mépris de la base, insuffisances de gouvernance, le non respect des règles, le faible encadrement de l’Etat qui perpétue les mauvaises pratiques, la plupart des partis et hommes politiques sont généralement soit discrédités, soit affaiblis ou les deux à la fois.
Aussi, dénonce-t-il, les alliances contre-nature se font au gré des élections, le choix des Premiers ministres échappe au Parti au pouvoir et les principaux responsables du parti ne sont élus à aucun niveau.
Par rapport aux compétitions électorales, M. Diop a signalé la faiblesse de la légitimité des élus issus des élections frauduleuses, la problématique de la représentativité et l’action des organisations du corps social dans l’animation de la vie démocratique et le manque de confiance des citoyens envers les institutions et les élites politiques.
Enfin, parlant des Contre-pouvoirs et contrôles citoyens, selon le conférencier, le constat est : la caporalisation et la perversion de la société civile malienne par l’Etat ; les insuffisances significatives des médias, le refus d’acceptation par l’Etat et/ou les responsables à la tête de ce secteur que média public ne veut pas dire média gouvernemental et la capture par l’Etat-parti de la société civile qu’elle annexe, divise, tourne et retourne selon ses intérêts.