Après la première expérience que nous avons vécue avec le Président Amadou Toumani Touré, il y a matière à réfléchir sur les candidatures indépendantes car il y va de l’image de la démocratie malienne.
Juillet approche à grand pas et chaque jour qui passe apporte désormais son lot de déclarations de candidature à la présidentielle du 28 juillet. A ce jour, on dénombre près d’une vingtaine de candidats déclarés ou potentiels, le dernier désigné en date étant celui du parti pour le développement économique et la solidarité (Pdes). En effet, le lundi dernier, les héritiers attitrés de l’ancien Chef de l’Etat, Amadou Toumani Touré, ont retenu, après moult conciliabules, semble-t-il, leur tout-puissant président, Hamed Diane Séméga, revenu récemment d’un séjour forcé au Sénégal où il a vécu en exil pendant plus d’un an. Face à lui, il y avait trois autres prétendants, en l’occurrence l’honorable Haïdara Aïssata Cissé dite Chato, Oumar Bouri Touré alias Billy et Abdoulaye Néné Coulibaly. Avant Séméga, beaucoup d’autres ont manifesté leur volonté de briguer la magistrature suprême en 2013, en attendant bien entendu la décision de la Cour constitutionnelle pour ceux qui atteindront ce stade de la compétition.
Parmi les candidats déclarés, on retient naturellement des représentants de partis, mais il y a aussi ceux qui n’ont reçu l‘onction d’aucune formation politique. Des candidatures indépendantes. Il y aura certainement d’autres déclarations car, sous nos cieux, il n’est pas rare de voir des candidatures rebelles au sein des partis politiques qui n’auront pas pu relever le défi de l’union et de la cohésion au moment de la désignation du candidat. L’Adema l’a appris à ses dépens lorsque pendant la présidentielle de 2007, Soumeylou Boubéye Maïga est allé à l’encontre de la décision du parti de soutenir ATT, en se portant candidat au nom de sa convergence. En 2002 déjà, cette formation avait connu le même problème quand l’ancien Premier ministre Mandé Sidibé, El Madani Diallo et bien d’autres responsables du parti se sont donné une autre direction alors même que les abeilles avaient choisi Soumaïla Cissé comme candidat légitime. L’homme est aujourd’hui le tout puissant patron de l’Union pour la démocratie et la République (Urd) et candidat potentiel à la présidentielle de juillet prochain. En 2013, nul ne peut jurer que le Pasj échappera au même sort, quand on sait que Soumeylou Boubéye Maïga, encore lui, a claqué la porte pour marquer son désaccord avec le choix de Dramane Dembélé comme porte-étendard du parti à la future présidentielle. Mais l’Adema ne semble pas être la seule formation politique à courir ce risque en 2013 car, il nous revient de sources concordantes que bien avant l’opération du choix du candidat du Pdes, des voix se sont levées, celle de l’honorable Chato notamment, pour exprimer leur détermination à se porter candidat en juillet, quelle que soit la personne à qui le parti donnera son onction.
Déjà, l’on s’interroge çà et là sur la marge de manœuvre des candidats indépendants en 2013. Cette analyse parait d’autant pertinente que le dernier président de la République démocratiquement élu fut un indépendant. L’on se souvient qu’en 2002, Amadou Toumani Touré avait réussi à conquérir le pouvoir par le biais du Mouvement citoyen avant que tous les grands partis ou presque ne lui fassent allégeance en 2007. Cette expérience unique au monde, aux yeux de certains observateurs nationaux et internationaux, relevait du politiquement incorrect et témoignait du manque de vitalité de notre démocratie car les partis politiques doivent normalement en être la locomotive. Si Amadou Toumani Touré a réussi ce coup en 2002, c’est parce qu’il jouissait déjà d’une certaine assise sur le plan national et international. Ce, pour avoir été l’un des acteurs en vue des événements de 1991 mais surtout grâce à sa proximité avec les populations dans le cadre du programme qu’il a piloté contre le ver de guinée après sa présidence transitoire.
Mais des partis politiques avaient fini par comprendre qu’en laissant le champ libre à un indépendant, ils avaient plutôt contribué à l’affaiblissement des institutions et surtout à la mauvaise gouvernance. Toute chose qui a fini par avoir raison de notre démocratie déjà piétinée par ses principaux animateurs. Plusieurs observateurs avertis de la chose politique conviennent qu’il est difficilement concevable que les Maliens, gardant à la mémoire la triste expérience de la gestion de l’indépendant que fut Att, confient leur destinée à un indépendant en 2013. Et ceux qui choisiront cette voie en 2013 devrait l’avoir à l’idée.
Bakary SOGODOGO