En nommant Premier ministre Soumeylou Boubeye Maiga, le président IBK a joué la dernière carte pour sa réélection. Conscient du temps limité dont il dispose (la présidentielle se tient en juillet!), Maiga a rapidement mis au point un plan susceptible de séduire les Maliens et de les inciter à renouveler le mandat de son mentor. Ledit plan repose sur trois grands axes: – remobiliser l’armée et reconquérir des territoires, ce qui serait de nature à flatter l’ego des citoyens et à restaurer l’image d’homme de poigne d’IBK; – ramener l’Etat partout où cela est possible afin de taire les reproches de démission de la puissance publique face aux groupes armés; – visiter Kidal pour faire oublier l’humiliation militaire subie en 2014 lors de la visite de Moussa Mara.
ANNONCE
Ainsi, Soumeylou Boubeye Maiga annonce, lors de son séjour à Mopti (le tout premier à l’intérieur du pays), un redéploiement de l’armée et des forces de sécurité pour reprendre le contrôle du centre du pays infesté de terroristes du Front de libération du Macina (FLN), alliés d’Iyad Ag Ghali et d’AQMI. La nouvelle consigne est claire: les soldats maliens ne doivent plus fuir ni se contenter de riposter à des attaques; ils ont désormais pour mission d’attaquer les terroristes dans les fiefs que ces derniers ont créés un peu partout au centre, le nord étant déjà leur chasse gardée. C’est en application de cette nouvelle stratégie que l’armée a attaqué un nid de terroristes à Djalloube, dans la région de Mopti, perdant une demi-douzaine de soldats dans l’opération. Loin de se décourager, elle a poursuivi ses offensives jusqu’à reprendre pied dans les localités de Togueré-Coumbé, Diafarabé, Wouroguia et Dogo, fiefs terroristes situés dans les cercles de Youwarou et de Teninkou.
S’ADAPTER À LA TACTIQUE DE L’ENNEMI
Pion essentiel du nouveau dispositif, le Général Sidi Alassane Touré, ancien patron de la Sécurité d’Etat et actuel gouverneur de la région de Mopti, a confié aux reporters de « TV5Monde » : « Notre plan consiste à aller dans les zones occupées par les terroristes, à les en chasser et à réoccuper ces zones militairement pour permettre le retour de l’administration et des services sociaux de base. Nous allons adapter notre tactique : si les terroristes évoluent à moto, nous évoluerons à moto; s’ils évoluent à pied, nous évoluerons à pied; s’ils évoluent à dos d’âne, nous serons à dos d’âne aussi. Peut-être serons-nous même sur des chevaux. Nous avons compris leur dynamique et nous y ferons face à cela ».
APPUIS
L’armée malienne compte beaucoup sur la force d’intervention rapide sénégalaise composée de 200 hommes qui a entamé son déploiement au centre du Mali. Sans l’avouer, elle compte aussi sur le duo de milices Gatia-MSA qui ne cesse de harceler, au nord du Mali, les terroristes de Walid El-Sahraoui, émir du groupe DAECH au Sahel. Le Gatia et son partenaire MSA (Mouvement pour le Salut de l’Azawad) ont ainsi anéanti un groupe d’une dizaine de combattants ennemis, récupérant sur eux des véhicules et matériels militaires abandonnés par les forces américaines lorsqu’elles avaient été attaquées le 4 octobre 2017 près du village nigérien de Tongo-Tongo.
STRATÉGIE POLITIQUE
Pour tirer le maximum de profit politique de cette montée en force de l’armée, le Premier ministre a initié un périple au nord du Mali. L’objectif n’est pas de reprendre militairement les zones visitées, mais de rappeler symboliquement qu’elles restent des portions du territoire malien. Soumeylou Boubeye Maiga a pris soin de sécuriser sa visite en obtenant l’accord préalable de la maîtresse des lieux: la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA). Deux garanties valant mieux qu’une, la MINUSMA et la force française Barkhane ont été étroitement associées à la visite pour prévenir tout incident. À présent une question: les Maliens sont-ils satisfaits des initiatives de Maiga ? Si oui, exprimeront-ils ce sentiment dans les urnes ?