Le premier tour de l’élection du Président de la République aura lieu le 29 juillet 2018 selon un chronogramme publié par le Ministère de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation. Cette échéance électorale est cruciale pour le Mali qui peine à se relever de la crise multidimensionnelle déclenchée en 2012 par les attaques lâches et barbares des petits aventuriers du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA), lesquels ont été déculottés par leurs alliés islamistes avant de réapparaître dans les véhicules des militaires français de l’opération Serval. « La mission a tout d’abord, au cours de ces échanges, acquis la ferme conviction que la tenue des élections présidentielles et législatives aux échéances prévues était une aspiration unanime de tous ses interlocuteurs et une exigence absolue pour l’avenir du Mali », déclarait une mission d’information et d’étude du Bureau de l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE qui a séjourné à Bamako du 7 au 9 mars dernier.
Ce n’est pas la grande effervescence dans les différents états-majors des partis politiques et des candidats potentiels mais chaque camp affûte ses armes dans la perspective de ratisser large au soir du 29 juillet.
Le Président de la République sortant veut un second mandat mais laisse planer le doute sur ses réelles ambitions. Il y a des signes qui ne trompent pas. Depuis quelques mois, les ressortissants de certaines localités du pays défilent au palais de Koulouba ou à la villa des hôtes pour remercier le chef de l’Etat de « ses nombreuses réalisations » avant de le supplier de briguer un second mandat. Cela fait suite à l’appel des militants du Rassemblement pour le Mali (RPM) demandant à leur Président fondateur de se représenter à sa propre succession.
Lâché par ses soutiens religieux, orphelin du coup de pouce des putschistes de Kati, critiqué sévèrement par certains de ses anciens alliés, acculé par les jeunes leaders de la société civile comme Ras Bath et Master Soumi, fragilisé sur la scène internationale, le Président Ibrahim Boubacar Kéïta doit batailler très dur pour relever le défi de sa réélection qui est loin d’être gagné d’avance, et surtout, en l’absence d’un bilan convaincant. Le cas d’IBK est rare. Le débat actuel au sein de l’ADEMA-PASJ, divisé entre partisans du Chef de l’Etat et défenseurs d’une candidature interne des abeilles, en est la parfaite illustration. La question de l’ADEMA-PASJ divisait depuis plus d’un an l’entourage du Président IBK, notamment son Directeur de cabinet et l’un de ses conseillers spéciaux. La rencontre du 24 mars dernier entre le Président de la République et son aîné et ancien Chef de l’Etat, Pr Dioncounda Traoré, prouve à suffisance que l’ancien Premier ministre du Président Alpha Oumar Konaré espère énormément sur le soutien total de la formation politique dont il a été le président pendant plus de 6 ans. Que vaut donc au chef de l’Etat le soutien d’un parti ADEMA-PASJ divisé ?
La dispersion de tous ceux et toutes celles qui réclament une alternance à la tête du pays n’est pas dans le contexte actuel un avantage pour le Chef de l’Etat et son entourage engagés dans une véritable course contre la montre. Un président sortant qui n’arrive pas à passer au 1er tour aura toutes les difficultés à se faire réélire. Les nouveaux venus sur la scène politique que d’aucuns n’hésitent pas à qualifier de saisonniers, s’écartent de la ligne de conduite jusque-là tenue par ceux qui s’opposent à la gouvernance en cours depuis septembre 2013. Ces jeunes gens nés après l’indépendance estiment à tort ou à raison que la vieille classe politique qui gouverne depuis la fin de la dictature a échoué dans la gestion des affaires publiques.
Autant la majorité présidentielle peine à se rassembler autour du chef de l’Etat, autant il est impossible pour l’opposition de s’aligner derrière une candidature unique. Les conditions sécuritaires qui se dégradent de jour en jour laissent planer de sérieux doutes sur la tenue de l’élection présidentielle. L’inquiétude est palpable au niveau de la communauté internationale. La visite du Premier ministre français, Philippe Edouard, ce week-end au Mali est loin d’être un simple fait du hasard.
A trois mois 24 jours des élections, il est difficile de se prononcer sur l’issue de ce scrutin historique. Une aventure incertaine !