Le samedi 7 avril 2018, l’Association politique Faso Kanu a organisé son espace de discussions et mobilisation pour la patrie « GUARA KENE » à la Maison de la presse de Bamako sur le thème : « 27 ans après les événements de 1991 qu’en reste-t-il ? 27 ans après que faire ? ». Le Président du Parti pour la Renaissance nationale (Parena), Tiébilé Dramé, ancien ministre du Mali était l’invité de l’espace.
Tiébilé Dramé a abordé plusieurs sujets dont l’insécurité qui mine le Mali, l’explosion de la corruption à travers le pays, la surfacturation, la nécessité de tenir les élections dans les bonnes conditions. « La situation en 2018 est pire qu’en 2013 de tous les points de vue. Du point de vu de la sécurité, du point de vu de la stabilité, c’est l’instabilité qui prévaut dans le pays. En 2013, il n’y avait pas de problème au centre, pas de tension intercommunautaire. Le pays est en feu, c’est évident », a-t-il dit. Face à cet état de fait, Tiébilé Dramé a souhaité un grand rassemblement des maliens pour réaliser l’alternance en 2018. « Il faut qu’on réalise l’alternance en juillet 2018 pour doter le Mali d’une nouvelle direction plus consciente de la situation du pays», a souhaité l’opposant Tiebilé Dramé.
Plusieurs personnalités ont pris part à cette conférence débat dont les anciens ministres, Me Amidou Diabaté, Djiguiba Keïta (PPR), le diplomate Moussa Makan Camara, la présidente des Amazones, Mme Diakité Kadidia Fofana, l’artiste Master Soumi, Seydou Cissé du cabinet du chef de file de l’opposition, le commissaire principal de l’Association Faso Kanu, Ibrahima Kébé, le modérateur de l’événement, Djimé Kanté, l’activiste Abdoul Niang et bien d’autres.
Après l’exécution de l’hymne national du Mali, les mots de bienvenue de l’organisateur de l’espace, Ibrahima Kébé, le portrait de l’invité du jour par Djimé Kanté, Tiébilé Dramé a évoqué les bienfaits de la révolution de mars 1991 ayant entrainé l’avènement de la démocratie au Mali, la liberté d’expression, la liberté de manifestation, la liberté d’opinion. Mais depuis janvier 2018, dit-il, le gouvernement tente d’empêcher les manifestations démocratiques. « Aucun ministre, aucun gouvernement ne peut se permettre de porter atteinte aux libertés de manifestation, d’expression, d’opinion. Personne n’acceptera qu’on retourne dans les temps de la dictature », a déclaré le président du Parena Tiébilé Dramé. Selon lui, les mouvements démocratiques multiformes ont commencé bien avant 1990, et remontent au coup d’Etat du 19 novembre 1968.
Des actions avaient été menées par des personnes pour protester contre la prise du pouvoir par les armes en 1968. 27 ans après la victoire du mouvement démocratique, personne ne sait où repose Abdoul Karim Camara dit Cabral. « Avant le prochain mars, l’exigence doit être où se trouve la tombe de Cabral. Le président Moussa Traoré et d’autres membres de son gouvernement sont en vie», insiste Tiébilé Dramé. Aux dires de l’invité de l’espace « Guara Kènè », le défi d’aujourd’hui est qu’il est indispensable d’éradiquer le cancer de la corruption au Mali. Selon lui, la famille présidentielle est fortement impliquée dans la gestion du pays.
‘’IBK n’en peut plus’’
En réponse aux questions des uns et des autres, Tiébilé Dramé a fait savoir que le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) s’est trompé le 4 septembre 2013 en qualifiant Moussa Traoré de Grand Républicain. Pour lutter contre la corruption, il faut d’abord se convaincre que la corruption est un danger pour le pays. « Si cela continue ça va détruire le pays. C’est avec l’arrivée du président IBK au pouvoir que la corruption a pris des proportions inquiétantes. Avec cette corruption, ce sont des centres de santé, des kilomètres de routes, des écoles perdues par le pays. Le plus gros exemple de surfacturation est le pont de Kayes (38 milliards de FCFA) ; les voies d’accès à Kayes (16 km) seront réalisées à 19 milliards de FCFA soit plus d’un milliard par Km. Il faut donner l’exemple et combattre la corruption, l’impunité et qu’on pense à l’avenir du pays. L’exemple doit venir d’en haut.
Il faut instaurer une gouvernance vertueuse au Mali. Il faut un leadership vertueux au Mali. La situation du pays est d’une gravité particulière. IBK n’en peut plus, il doit s’en aller », a-t-il dit. S’agissant de la situation politique du pays, il a fait savoir que la négociation peut résoudre quelque chose que les armes ne peuvent pas. « L’accord de Ouagadougou a permis au Mali de reprendre tous ses droits. Mais IBK a tourné le dos à cet accord. Les maliens ont élu un président qui ne prenait pas la juste mesure des choses, qui n’a pas conscience de la situation de gravité du pays », a-t-il dit. A l’en croire, la France est un acteur incontournable au Mali. Il a souhaité une coalition pour l’alternance dont le travail est en cours depuis décembre dernier.
Il y aura un programme, dit-il, que le futur président doit suivre. « Il faut qu’on réalise l’alternance en juillet 2018 pour doter le Mali d’une nouvelle direction plus consciente de la situation du Mali, plus ferme, plus responsable », a mainte fois déclaré l’opposant Tiébilé Dramé. Selon lui, la situation du centre est déplorable parce que le gouvernement l’a laissé pourrir. « Après les problèmes du nord et du centre, l’explosion de la corruption est la question fondamentale du Mali aujourd’hui…IBK ne bouge pas. Il ne fait rien. Qu’est ce qu’il fait pour éteindre le feu du nord et du centre du pays ? Ils sont dans le ministère de l’immobilisme, de l’inaction », a-t-il déploré. A ses dires, le régime est noyé dans la surfacturation, voila pourquoi, poursuit-il, il ne peut pas combattre la corruption. En donnant un exemple de surfacturation, il a précisé qu’un pick-up coûte 15 millions de FCFA sur le marché, or c’est surfacturé à l’Etat à 54 millions de FCFA.
Pour l’invité Tiébilé Dramé, la situation de 2018 est pire qu’en 2013. « La situation en 2018 est pire qu’en 2013 de tous les points de vue. Du point de vu de la sécurité, du point de vu de la stabilité, de l’instabilité qui prévaut dans le pays. En 2013, il n’y avait pas de problème au centre, pas de tension intercommunautaire.
Le pays est en feu, c’est évident. Qu’est ce qu’il faut faire ? en 2013, j’ai préconisé de ne pas trop se presser. Nous avons l’accord de Ouagadougou, mettons-le en œuvre. Il y avait une fenêtre d’opportunité qui était ouverte, saisissons cette fenêtre d’opportunité, nous ne la laissons pas se fermer. Mais, on ne m’a pas écouté. Le Parena a fait ce qu’il a cru devoir faire à savoir se retirer sans gêner le pays, sans gêner le processus. Mais aujourd’hui, le pays est dans une situation qui est inextricable. L’Accord d’Alger ne s’applique pas au centre du pays. Pourquoi le centre est devenu ce qu’il est aujourd’hui. Le chemin est étriqué », a déploré Tiebilé Dramé.
L’alternance à tout prix
L’opposant Tiébilé Dramé a invité le gouvernement à tenir les élections dans les meilleures conditions. « Nous avons proposé au gouvernement de mettre en place un comité paritaire et de voir quelles sont les difficultés qui peuvent survenir. Ce travail a été fait pendant tout le mois de février et qui a été boycotté par la majorité.
Or c’est un comité paritaire composé de l’Administration, majorité, opposition et le centre. La restitution des travaux a été faite les 2 et 3 mars derniers sous la supervision de la Minusma avec la présence du ministre de l’administration territoriale. Ceux qui ont boycotté le travail ont tenu une conférence pour rejeter la moitié des propositions d’amendements de la loi électorale. Donc, ils sont en embuscade à l’Assemblée nationale. Ils vont chercher à changer ce qu’on s’est entendu.
Ils prennent des risques sur la suite du processus électoral. Pour moi, la faute incombe à leur chef. Un président ne peut pas autoriser son ministre à créer un comité paritaire, à surveiller cela et en même temps laisser sa majorité boycotter les travaux de ce comité paritaire. D’un côté le ministre va pour qu’il y ait des conditions pour l’organisation des élections, de l’autre coté la majorité boycotte.
Or c’est le président de la République qui est le chef du gouvernement, il est le chef de facto de la majorité. A Dieu ne plaise, s’il n’y a pas d’élection où est ce qu’on va ? Nous devons faire beaucoup d’efforts pour qu’il y ait une élection, et qu’on se mobilise pour réaliser l’alternance, pour sauver le pays, qu’on se batte pour que les élections se tiennent dans les conditions acceptables », a-t-il dit. Par ailleurs, il a fait savoir que l’accord d’Alger a pris beaucoup de retard dans sa mise en œuvre. « Le pouvoir est faible, le pouvoir a fait preuve de laxisme, Si nous voulons un autre Mali, il nous faut réaliser l’alternance », a-t-il conclu.