L’armée française tourne le dos aux touaregs du MNLA, son allié traditionnel depuis l’époque coloniale, dont la présence militaire est traditionnellement forte dans la région de Kidal.
Lors de l’attaque, le 1er avril 2018, contre les djihadistes dans la zone d’Akabar à trois kilomètres de la frontière nigérienne, l’armée française a appuyé un groupe d’autodéfense malien formé par des éléments du GATIA (Groupe d’Autodéfense Touaregs Imghad et Alliés) et du MSA (Mouvement pour le Salut de l’Azawad). Or ces groupes touaregs sont considérés comme les bêtes noires du Mouvement de Libération Nationale de l’Azawad (MNLA), soutenu depuis la période coloniale par les forces françaises au Nord Mali. Au point que la France n’a pas voulu désarmer, lors de l’opération Serval de 2013, les militants de ce mouvement autonomiste.
Traditionnellement, la France refusait tout dialogue avec le GATIA du Général malien Gamou, qui était composé essentiellement par des Imghads, un groupe Touareg majoritaire à Kidal. Ce sont les Touaregs Ifoghas, un groupe minoritaire, qui avait toujours été désigné par la France comme le seul interlocuteur valable.
Des revers successifs
Le choix pro MNLA de l’armée française avait valu à la France beaucoup de critiques de la part du pouvoir malien à Bamako qui a toujours trouvé ce mouvement trop favorable aux thèses indépendantistes. Pour autant, les alliés des Français n’ont pas toujours marqué de points sur le terrain. En novembre 2012, soit avant l’intervention française de janvier 2013, le MLNA avait subi une lourde défaite face au MUJAO (Mouvement pour l’Unité et le Jihad en Afrique de l’Ouest), un des principaux mouvements djihadistes du Nord Mali. De 2013 à 2017, le même mouvement, allié des Français, avait reculé face au GATIA dans les régions de Tombouctou, Gao, Ménaka et autour de Kidal. C’est à la MINUSMA (Mission Multidimensionnelle Intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation au Mali) appuyée par les forces françaises qu’il doit sa survie à Kidal qui en interdisait l’accès aux forces du GATIA.
Renversement d’alliances
Le changement de pied de l’armée française s’explique sans doute par une appréciation réaliste du rapport de forces militaire. Le 1er juin 2017, après une attaque contre un poste militaire à Abala au Niger, les jihadistes qui se repliaient en territoire malien ont été interceptés par des éléments du GATIA-MSA soutenus par l’armée malienne et Barkhane.
Le 17 février 2018 à Intameda, des éléments du GATIA-MSA qui patrouillaient entre Tamkoutate et Talataye (entre Gao et Ansongo) ont détruit une base terroriste.
Dans la foulée le 22 février 2018 à Ikadagotane à 60km au sud-ouest de Ménaka, ils ont détruit une autre base et récupéré un véhicule de l’armée nigérienne.
Le 7 mars 2018 le GATIA et le MSA ont attaqué une base jihadiste dans la zone de Tinzouragan (Ménaka) et Tawaraghan (Frontière Niger) tuant leur chef Djibo Hamma alias Abou Razak affilié à Adnan Abou Walid chef de l’Etat Islamique au Sahel, bras droit de Iyad Ag Ghali. Un matériel important a été récupéré dont des engins explosifs.
Est-ce par réalisme que la France se rapproche du GATIA-MSA? A moins que l’Etat major frnaçais ait été alerté par les nombreux signes montrant une complicité du MNLA avec le mouvement Ansardine de Iyad Ag Ghali, qui a revendiqué les attentats au Burkina contre l’armée et l’ambassade françaises.
Les Maliens qui localement refusent toute idée d’indépendance semblent de plus en plus satisfaites des résultats obtenus sur le terrain par le GATIA-MSA avec les moyens de bord; alors que Barkhane, la MINUSMA et désormais le G5 ont du mal à les convaincre de leur efficacité avec les moyens matériels et financiers importants qui sont les leurs. Certains vont jusqu’à demander un transfert d’une partie de leur budget et moyens au GATIA-MSA.