Bamako - Une attaque "sans précédent" au mortier et à
l’aide d’un "véhicule suicide" contre le camp de l’ONU à Tombouctou, dans le
nord du Mali, a fait au moins un mort parmi les Casques bleus et une dizaine
de blessés.
"Un Casque bleu tué lors d’échanges de tirs avec les assaillants, une
dizaine de blessés", a écrit dans la soirée sur Twitter la force de l’ONU au
Mali (Minusma).
Auparavant, elle avait annoncé que son camp de Tombouctou avait été la
cible d’une "importante attaque complexe", évoquant des "mortiers", des
"échanges de tirs" et une "attaque au véhicule suicide". Elle avait assuré que
la situation était désormais "sous contrôle".
"C’est la première fois qu’il y a eu une attaque de cette envergure contre
la Minusma à Tombouctou", a expliqué à l’AFP une source sécuritaire étrangère.
"C’est une attaque qu’on n’avait jamais connue. Des tirs d’obus, de
roquettes, des explosions, avec peut-être même des kamikazes", a confirmé un
responsable du gouvernorat de Tombouctou interrogé de Bamako.
Déployée au Mali en juillet 2013, la Minusma, qui compte environ 12.500
militaires et policiers, est actuellement la mission de maintien de la paix de
l’ONU la plus coûteuse en vies humaines.
Elle avait, avant l’attaque de samedi, perdu plus de 160 Casques bleus,
dont 102 dans des actes hostiles, ce qui représente plus de la moitié des
soldats de l’ONU tués sur cette période dans le monde.
Elle doit recevoir des renforts canadiens, Ottawa ayant annoncé le 19 mars
sa décision de déployer pendant un an une force d’appui aérienne avec des
hélicoptères et des Casques bleus. Mais, malgré les pressions de l’ONU,
l’arrivée du contingent canadien n’est pas attendue avant "plusieurs mois".
- Légendaire Tombouctou -
Fondée à partir du Ve siècle par des tribus touareg, Tombouctou, cité à
l’aura légendaire, est inscrite au patrimoine mondial de l’humanité par
l’Unesco.
En 2012, quatorze de ses célèbres mausolées avaient été détruits, à coups
de pioche, houe et burin, par des groupes jihadistes liés à Al-Qaïda, dont
Ansar Dine, au nom de la lutte contre "l’idolâtrie".
Ces groupes ont dicté leur loi dans le nord du Mali de mars-avril 2012 à
janvier 2013, date du déclenchement d’une opération militaire internationale à
l’initiative de la France.
Bien que depuis lors les groupes jihadistes aient été dispersés et en
grande partie chassés du nord du Mali, des zones entières de ce pays échappent
au contrôle des forces maliennes, françaises (opération Barkhane) et de l’ONU
(Minusma), régulièrement visées par des attaques.
Depuis 2015, ces attaques se sont étendues au centre et à la partie sud du
Mali et le phénomène déborde sur les pays voisins, en particulier le Burkina
Faso et le Niger, où quatre soldats américains et quatre militaires nigériens
avaient été tués dans une embuscade le 4 octobre 2O17.
Depuis le 11 avril, quelque 1.500 militaires africains, américains et
européens sont engagés dans des manoeuvres dans l’ouest et le nord du Niger,
pour s’entraîner face aux menaces terroristes qui planent sur ces régions.
- Exécutions sommaires -
Ces exercices, qui doivent durer jusqu’au 20 avril, devraient renforcer les
capacités des troupes de la force commune du G5 Sahel, qui devrait compter
5.000 soldats d’ici à la mi-2018.
Portée par la France et soutenue par la communauté internationale, cette
force réunit des troupes du Mali, du Niger, de la Mauritanie, du Tchad et du
Burkina Faso.
Au Mali, même, la signature en 2015 d’un accord de paix n’a pas empêché la
recrudescence des violences.
Au cours d’un point de presse jeudi à Bamako, Guillaume Ngefa, le directeur
de la division des droits de l’homme de l’ONU et représentant du
haut-commissaire aux droits de l’homme au Mali, a évoqué les "exécutions
sommaires d’au moins 95 personnes" dans la région de Menaka, frontalière du
Niger.
Mise en cause, une coalition de deux groupes armés qui participent aux
opérations de sécurisation de la région avec les troupes françaises et
maliennes, le MSA et le GATIA, ont rejeté samedi ces accusations.
Ces deux groupes sont soupçonnés de profiter de leur proximité avec
Barkhane pour régler de vieux contentieux territoriaux, notamment avec la
communauté peule, qui se dit régulièrement victime d’exactions.