Journalistes, responsables de médias et d’instituts de formation venus du Mali, du Burkina Faso et du Niger, s’étaient réunis à Ouagadougou du 15 au 17 mai 2013, pour donner une conférence dont le thème portait sur «le journalisme sensible au conflit». Initiée par la DW Akademie, cette rencontre a permis aux participants de réaffirmer leur engagement à promouvoir dans leurs rédactions respectives le respect des règles d’éthique et de déontologie dans le traitement de l’information. Pour ce faire, la conférence a signé une déclaration en la matière.
Durant trois jours, les femmes et hommes des médias maliens, burkinabés et nigériens ont illustré, à travers des communications, que la mission journalistique n’est pas de résoudre les conflits. Elle se résume en la diffusion d’informations impartiales et exactes ; que cependant, une bonne pratique du journalisme peut mener à la réduction d’un conflit.
Selon Hans Joerg, président de la conférence et formateur à la DW Akademie, une telle rencontre vise à contribuer au perfectionnement théorique et à la réalisation pratique d’un journalisme conscient en zone de conflit. «Elle se veut un outil à la disposition des praticiens des médias dans les régions déchirées par des conflits», ajoutera-t-il. De nos jours, au Mali, au Burkina Faso et au Niger, faire du bon journalisme est un travail difficile. Les journalistes comptent sur leur formation et leurs normes professionnelles pour surmonter ces difficultés et diffuser des informations précises et impartiales. Cependant, quand un conflit violent menace une société, le journalisme fait face à des difficultés plus grandes. Les protagonistes s’efforcent de contrôler les médias, une expérience que les journalistes nigériens ont vécue. L’information peut être peu fiable ou censurée et il peut exister un risque personnel qui rend le journaliste vulnérable, chose que les médias maliens vivent.
Mais c’est aussi dans ces situations qu’un bon journalisme est primordial. En période de conflit, fournir des informations fiables au public exige des compétences journalistiques supplémentaires. Les journalistes doivent acquérir une compréhension plus poussée des causes du conflit et comment celui-ci se développe et se termine. Le panel, composé des journalistes maliens Mahamadou Bocoum, directeur de la radio Kawral de Mopti, Baba Hamed, correspondant de Jeune Afrique au Mali, et Rokia Diabaté, du journal ‘’Le Prétoire’’, ont souligné que les journalistes doivent être conscients du rôle crucial qu’ils peuvent jouer dans une période d’instabilité.
Pour Mahamadou Bocoum, il est important pour un journaliste d’éviter de faire d’une opinion un fait. Avant d’ajouter que : « Comme journalistes, nos outils les plus puissants sont les mots que nous utilisons, les images et les sons. Nous pouvons utiliser nos outils pour établir une compréhension plutôt que de faire l’apologie des conflits ». Après avoir mis en exergue la responsabilité sociale du journaliste dans un conflit, Baba Hamed, l’autre panéliste, soulignera qu’aucun journaliste ne peut être complètement objectif. Les journalistes, comme tout un chacun, portent en eux les valeurs de leur pays natal, leur religion et leur groupe ethnique. « C’est pourquoi les journalistes professionnels sont contraints à des normes visant à l’exactitude, l’impartialité et la responsabilité, pour écarter nos valeurs personnelles et nos préjugés » a-t-il dit. Selon Rokia Diabaté, le travail des journalistes en tant que reporters professionnels peuvent avoir des impacts positifs ou négatifs dans la résolution d’une crise.
« Pour les journalistes, tout mouvement est une information. Nous sommes conscients que d’autres gens savent comment créer des faits pour que nous les publions et les amplifions. Ils ont une stratégie médiatique. Ils présentent aux médias certains faits qu’ils ont choisis et utilisent ainsi les médias pour influencer l’avis du public sur un conflit. Ainsi, c’est à partir de nos plumes et micros qu’un conflit peut évoluer en bien ou en mal », a-t-elle argumenté.
La conférence a pris fin par la rédaction d’une déclaration que l’ensemble des participants ont paraphée. Document dans lequel, les participants s’engagent à chercher à comprendre les conflits, les tensions et les violences ; à donner la parole équitablement aux différents acteurs ; à réaliser des reportages, émissions et articles de presse promouvant la culture de la paix et à humaniser les articles/ reportages en montrant les souffrances des populations, entre autres. Une remise d’attestations à la trentaine de journaliste venus pour la conférence a sanctionné la rencontre.
Rokia Diabaté,
envoyée spéciale à Ouagadougou