A Foroko et à Kobadani, la colère et l’indignation contre le gouvernement bouillonnent les orpailleurs, qui viennent d’être expulsés sans prévis, sur décision des autorités de Bamako. Ils dénoncent une répression sauvage des forces de sécurité et le pillage de leurs biens.
Quel est l’état d’âme d’un individu expulsé de ses terres et qui a tout perdu en fuyant ? Face à la presse ce vendredi 17 mai, le Collectif des orpailleurs de Foroko et de Kobadani ne savait plus à quel saint se vouer.
Battus, pillés, expulsés sans préavis sur décision des autorités de Bamako, les travailleurs des sites d’orpaillage dans le cercle de Kangaba en veulent à mort au gouvernement Diango Cissoko.
Nous sommes le vendredi 10 mai. Un contingent de la gendarmerie nationale est déployé sur les sites sur décision des autorités de Bamako. Objectif : expulser manu militari les occupants.
Le hic, selon les dits travailleurs, c’est que cette décision viole la convention intervenue l’année dernière avec « Africain Gold Compagnie » (AGC), société d’exploitation ayant acheté le permis. Pis, explique Sékouba Yaffa, le déguerpissement est intervenu sans préavis, et a été marqué par le pillage à tour de bras des biens.
Ce que dénoncent les populations des sites d’orpaillage, c’est surtout la violence de la répression qui s’est abattue sur les travailleurs. Certains témoignages font état d’une vingtaine de personnes décédées des suites de leurs blessures après le passage des gendarmes. Le contingent de la gendarmerie envoyé sur le terrain, dément à travers son chef.
Mais à Kangaba, Moussa Bakayoko, responsable de la jeunesse, témoigne que des gens ont été battus à mort. Il affirme avoir un oncle au bras cassé. Il dénonce une répression sauvage, et une violation systématique du droit coutumier.
« Ces sites constituent le patrimoine de nos anciens. Si on dit que la terre appartient à l’Etat, celui-ci doit le faire dans le strict respect du droit coutumier. Je suis étonné que les autorités prennent une telle décision sans préavis, ni même informée l’autorité traditionnelle encore moins les élus locaux ». En clair, poursuit Moussa Bagayogo, le mépris est évident, et l’attitude du gouvernement Diango Cissoko constitue un réel motif d’indignation et révolte.
Bientôt une action en justice
D’ores et déjà, les travailleurs des sites Foroko et Kobadani préviennent les autorités contre une révolte populaire. « C’est en travaillant dans ces mines que nous nourrissons nos familles, achetons des bœufs pour les labours, etc. Bref, assurer notre bien-être en l’absence de perspectives réelles d’emplois dans notre pays. Si l’Etat doit fermer les sites, ou les vendre à une société, il doit prendre des mesures d’accompagnement, et faire en sorte que la société d’exploitation donne des garanties de recrutement des ressources humaines au niveau local », a revendiqué le responsable de la jeunesse de Kangaba. Les orpailleurs sont formels, les biens spoliés seront restitués, car une action en justice sera bientôt engagée.
Pour le représentant des chasseurs, les dégâts matériels sont inestimables, et les morts enregistrés, sont des motifs d’interrogation sur les motivations d’une telle décision. Pour Issa Sy, en cette période difficile pour le Mali, les autorités ne doivent plus en rajouter.
La déchéance sociale subie par ces orpailleurs sera-t-elle entendue par les autorités de Bamako ? Le débat reste entier, surtout quand on sait que derrière les permis d’exploitation minière, c’est une affaire de gros pourcentage. Au mépris du peuple ?
Issa Fakaba Sissoko