A peine nommée et sans attendre les 100 premiers jours au cours desquels on évalue l’action d’un gouvernement, l’équipe de Cheick Modibo Diarra (CMD), Premier ministre (P.M) est l’objet de critiques acerbes comme toutes les équipes antérieures des temps de paix. Alors que le Mali traverse actuellement l’une des périodes les plus sombres de son histoire. Face à cette situation préoccupante, l’équipe de Modibo Diarra a besoin de la patience et du soutien du peuple malien
En plus, le contexte est particulier. Les oukases de la Cédéao, les échauffourées entre différents corps des forces armées, l’émergence de coalitions politiques pro et anti-putsch, la crise du Nord, les agissements des occupants, les bruits de viols des gamines sans défense et la glaive de la charria ont créé une psychose et une rage impuissante au Sud. Les organes de presse et les associations de la société civile, dans leur ensemble, expriment leurs inquiétudes quant à la léthargie du gouvernement face à la résolution du problème du Nord.
Tout le monde semble oublier que les événements qui ont surgi depuis l’installation du gouvernement CMD ne permettaient pas objectivement de s’attaquer à la résolution des problèmes du Nord aussi rapidement que souhaité par l’opinion.
La cacophonie ambiante a été en partie provoquée par la Cédéao, qui avait mis en œuvre des mesures tendant à ramener l’ordre constitutionnel au prix d’une nouvelle déstabilisation des institutions issues de l’Accord-cadre. Au lieu, dès le départ, de mettre une équipe de transition en place, elle mit en place un gouvernement intérimaire inopérant, recourant à une constitution dépassée, et géré par un accord-cadre mal ficelé car comportant des zones d’ombre et des faiblesses évidentes.
La Cédéao tâtonnait. La situation malienne était inédite.
Comment réussir à imposer un pouvoir civil à l’ombre des baïonnettes? Comment réussir une cohabitation harmonieuse entre ceux qui se prévalent du dicton selon lequel le pouvoir est au bout du fusil, et ceux qui estiment au contraire que le pouvoir est le fruit des urnes et de l’ordre constitutionnel, même si cela revenait à restaurer l’ordre ancien. Voilà la problématique à laquelle la junte, la Cédéao et la classe politique sont confrontées. C’est bien la raison pour laquelle les problèmes de reconquête du Nord sont passés au second plan. Sans hiérarchie claire, on ne pouvait rien entreprendre d’organiser et de viable vis-à-vis du septentrion du Mali.
Or l’attelage baroque mis en place ressemble à un triumvirat insipide dans lequel le président par intérim, devenu président de la transition, demeure sans pouvoir, le P.M pleins pouvoirs ne disposant aussi d’aucun pouvoir exceptionnel. Le chef de la junte, est devenu ancien chef d’Etat alors qu’il a la réalité du pouvoir qu’il exerce subrepticement de peur d’attirer les foudres de la Cédéao et de la communauté internationale.
Dans ce contexte, rendre le gouvernement responsable de la lenteur des opérations de reconquête du Nord est tout à fait simpliste. La complexité de la situation n’échappe à personne. Le dilemme est cornélien, faut-il par exemple alimenter toutes les populations du Nord y compris les rebelles et leur permettre de proclamer leur république islamique et la charria en plastronnant, ou faut-il leur laisser le soin d’approvisionner eux-mêmes les populations en vivres?
Ils se rendront bien vite compte que pour diriger une république, il faut au moins nourrir ceux que l’on gouverne. Machiavel aurait laissé les rebelles nourrir les populations de leur prétendue république et les mettre devant leurs responsabilités. Le Mali a choisi la solution humanitaire, en raison des sentiments d’appartenance à une seule nation séculaire que le sort des armes ne peut changer. C’est à son honneur. L’armée doit se réorganiser et être dotée en moyens militaires adéquats. La chaîne de commandement est opérationnelle. Il reste les moyens en armement et en ressources financières. Une guerre conventionnelle comme celle que le Mali veut engager en cas d’échec des négociations se prépare. Ce n’est pas une guerre de guérilla. Il s’agit de réaliser une blitzkrieg sur le Nord et non faire une promenade de santé qui enverrait la troupe au casse-pipe. Laissons le temps nécessaire aux autorités militaires pour faire une offensive victorieuse, au lieu de créer une atmosphère qui peut pousser les dirigeants à la faute. L’impatience n’est le remède à aucun mal.