Maître Abdoulaye Garba Tapo, ancien ministre de la Justice, professeur émérite de Droit, a été conduit à sa dernière demeure le samedi 14 avril 2018 dans une totale indifférence des plus hautes autorités du pays. Celles-là n’ont pas seulement brillé par leur absence, elles n’ont même pas daigné lui rendre le moindre hommage mérité par un ancien Garde des sceaux, après tant d’années de dignes et loyaux services rendus au pays.
A ses obsèques, deux ministres étaient présents, sûrement à titre personnel, à savoir Me Baber Gano (ministre en charge des Investissements) et Adama T. Diarra (ministre en charge de l’Aménagement du territoire). Le premier, avocat de son état, est certainement proche de la famille Tapo pour être tous des ressortissants de la région de Mopti, et le second serait venu pour témoigner de sa solidarité en tant camarade politique.
De la part de nos autorités, cela s’appelle de l’ingratitude. Sinon, comment comprendre que le Président de la République se déplace pour aller aux obsèques des gens qui n’ont pas rendu autant de services à notre patrie que Maître Abdoulaye Garba Tapo ? L’indifférence des autorités maliennes suscite aujourd’hui la colère voire l’indignation de tous ceux avaient en estime Maître Abdoulaye Garba Tapo. A commencer par les milliers d’étudiants qu’il a formés, et qui ont été reconnaissants au point de donner son nom à une promotion. S’y ajoute la déception de ses camarades politiques, et surtout l’incompréhension de sa grande famille du Barreau et de tous les citoyens qui l’ont vu à l’œuvre. La question qui hante les esprits est celle-ci : pour avoir été ministre de la Justice, Garde des Sceaux, n’était-il pas au moins chevalier de l’Ordre national du Mali ?
Pour beaucoup de citoyens, même s’il avait été oublié, n’a-t-on pas raté l’occasion de rattraper cette bourde nationale en le décorant à titre posthume ? Selon beaucoup d’observateurs, la raison de l’indifférence serait à chercher dans ses prises de position politique. Très critique envers les tenants actuels du pouvoir, Maître Abdoulaye Garba Tapo avait, dans une totale liberté de ton, dénoncé les tares de la gouvernance actuelle, même s’il fut parmi les cadres qui ont mouillé le maillot pour IBK. Parce que, comme beaucoup d’autres, il croyait en l’homme, avant de déchanter comme tant d’autres. Il était arrivé à la conclusion qu’IBK est loin d’être la solution, et avait mis en place un mouvement,
Le Mali Avance, qui prônait l’alternance en 2018. Maître, sache tout simplement que le beau monde qui t’a accompagné dans ta dernière demeure est celui qui t’a cru, estimé et serait prêt à porter plus haut le flambeau que tu as allumé. Aux tenants du pouvoir éphémère de méditer cet extrait du poème de François de Malherbe, intitulé « Consolation à M. du Perrier sur la mort de sa fille » : « La Mort a des rigueurs à nulle autre pareilles : On a beau la prier, La cruelle qu’elle est se bouche les oreilles Et nous laisse crier. Le pauvre en sa cabane, où le chaume le couvre Est sujet à ses lois, Et la garde qui veille aux barrières du Louvre N’en défend point nos rois… ».