Il suffit juste de faire un tour à la Cité administrative de Bamako (Djicoroni) pour se rendre compte de l’image combien dégradante qu’offre l’administration publique malienne aux usagers.
Notre Cité ministérielle, aux antipodes de sa somptueuse et flamboyante architecture, constitue une vraie “pourriture” du point de vue moral et institutionnel tant l’ordre, la rigueur, l’éthique et l’amour du service public, restent le dernier souci des agents de l’Etat.
C’est l’expression pure et simple du désordre sous toutes ses coutures ! Il est, en effet, inadmissible, voire impensable, que des hauts lieux de l’administration publique soient ouvertement réservés à la détente, la débauche, l’oisiveté, l’absentéisme, la médiocrité, la mendicité ainsi que toutes autres formes de permissivités constituant, non seulement, un frein à une saine exécution des tâches publiques, mais aussi, une entrave à l’éclosion d’un système administratif performant et respectable.
Pis, cela jette l’anathème sur l’image politique et institutionnelle même du pays. Apparemment, personne (du plus haut sommet de la République au moindre décideur de l’Etat) ne semble réellement s’en préoccuper, d’où, la nécessité pour nous (“La Sirène”) de dénoncer des pratiques honteuses et méprisables qui inondent et pourrissent nos structures publiques. Ces assistantes administratives qui font farouchement honte à nos institutions.
Dans les locaux de certains ministères, de surcroît, souverains, nous sommes plusieurs fois, tombés sur des assistantes administratives communément appelées “secrétaires”, en train de discuter le prix de certaines parures et autres ornements féminins, notamment, l’encens, des pots de fleurs, des paires de chaussures, des vêtements de nuit et de grandes cérémonies, et même, des produits cosmétiques et des perles de séduction connues sous l’appellation de “baya” ou “bine-bine”. Cela, en pleines heures de travail où elles sont quasiment toutes regroupées autour de la vendeuse desdits objets, chacune préoccupée à faire le choix qui lui convient, au détriment des visiteurs qui s’impatientent.
Dans les locaux d’autres institutions ministérielles, les visiteurs peuvent aisément surprendre certaines de ces “secrétaires” en pleine séance d’allaitement ou de baby-sitting, car elles n’hésitent pas des fois à emporter leurs nourrissons jusqu’à leur lieu de travail pour s’en occuper comme dans un ménage.
Outre cela, certaines d’entre elles, ignorent royalement quel langage tenir devant un visiteur tant leur niveau en français est aussi lamentable que désarçonnant, au point que l’on en vient à s’interroger comment des personnes aussi médiocres, ont pu accéder à ces lieux.
Dans des bureaux plus spacieux où l’on peut retrouver jusqu’à quatre ou cinq agents, c’est, en tout cas, tout sauf du sérieux ! L’on se croirait plutôt dans un endroit ordinaire, pis, dans un “grin” (lieu de retrouvailles et de causeries fraternelles) avec des éclats de rires, des jeux de téléphones ou ordinateurs et même des écoutes radiophoniques à ciel ouvert.
Ecœurante inaction d’un Etat laxiste et insouciant
Au regard de ces facteurs qui, en partie, expliquent la lourdeur monotone, l’inefficience notoire et l’essence folklorique de notre administration depuis la présidence de la République jusqu’au plus dérisoire des services publics, nous sommes bien fondés de pointer un doigt accusateur sur l’autorité de l’Etat qui ne semble jusque-là pas mesurer l’ampleur du phénomène ou semble l’encourager implicitement.
A cela, s’ajoutent des cas récurrents de débauches et harcèlements sexuels venant de certains hauts responsables de l’Etat contre des agents subalternes en échange de prérogatives et autres avantages “juteux” ou sur la menace d’être amplement virées ou sévèrement défavorisées en cas de résistance.
A ce sujet, nous avons, lors de nos enquêtes, recueilli une foule de témoignages qui donnent des sueurs froides. Au niveau de la Cité ministérielle où l’essentiel des institutions gouvernementales sont concentrées, c’est le comble du dévergondage. Nombreuses sont ces assistantes administratives qui, en silence, continuent de faire les frais de cette pratique malsaine et condamnable que soit le harcèlement sexuel venant de certains hauts cadres de ministères.
Même les stagiaires, ces jeunes filles ayant nouvellement clôturé leur cycle académique, n’en sont point épargnées. Elles sont même très convoitées, car, vues souvent comme des proies faciles. Naturellement, celles de mœurs légères, passent facilement dans la casserole. Mais, même celles qui, par principe, répugnent à ces pratiques ignobles, se voient souvent obligées de “jouer le jeu” pour pouvoir se maintenir du mieux que possible en vue de “sauver les apparences”.
Toutes ces pratiques ci-dessus énumérées et qui empuantissent le service public, n’ont certes pas commencé sous l’actuel régime, mais ont néanmoins connu une franche aggravation sous les précédents gouvernements. Pis, nous n’avons jusqu’ici eu connaissance d’aucune mesure draconienne prise en conseil des ministres visant à abolir ce laisser-aller dans la perspective d’un meilleur assainissement moral des services de l’Etat.
Aussi, face au manque de performance et la vétusté intellectuelle de certains cadres de ministères aussi bien que l’inefficacité fonctionnelle des institutions publiques, l’absence de l’Etat est plus qu’indignant vu la vitesse hallucinante avec laquelle évolue le monde. Sur ce point, la nécessité d’un recyclage permanent des agents de l’Etat ainsi qu’une révolution intégrale du système public s’avère plus qu’impérieuse.
Et voici là encore, une des preuves irréfutables, que l’éléphant annoncé par le président Ibrahim Boubacar Kéita, est bel et bien arrivé avec un “pied cassé”, car, l’étiquette “d’homme de poigne” et de “rigueur” tant vantée en sa personne, n’a visiblement rien servi, en ce sens que les vieilles mauvaises pratiques longtemps décriées et dont le règne était censé connaitre une apogée, ont resurgi avec une puissance plus effroyable.
Dans nos prochaines éditions, nous publierons certaines conversations honteuses entre des cadres de l’administration et certaines “vendeuses” de piment.
COMBLE DU FOLKLORE : Pourquoi ne pas fermer le Bureau du Vérificateur général et sortir du ridicule ?
A l’instar du Médiateur de la République et récemment la Haute cour de justice, le Bureau du Vérificateur général qui n’a jusqu’ici brillé que par son abusive et exaspérante futilité, ne saurait aujourd’hui mériter autre sentence que la fermeture pure et simple de ses portes. Une institution techniquement destinée à crédibiliser la gouvernance financière, mais qui n’a plutôt été instrumentalisée qu’à des fins purement décoratives entretenant ainsi un ridicule insultant pour l’intelligence des Maliens.
Certains dirigeants occidentaux n’ont franchement pas tort de traiter des Etats africains de “folklore” avec, à leur tête, des dirigeants incroyablement “ridicules” et “farfelus” tant nos institutions étatiques et régionales n’existent, le plus souvent, que de nom. Comment peut-on mettre en place une institution en laquelle l’on injecte des ressources colossales mais qui, en définitive, ne fonctionne que sur du faux ?
Pourquoi continuer à cautionner le fonctionnement d’une structure censée dénicher des cas de malversations et autres dilapidations de deniers publics et identifier les auteurs pour des fins punitives mais qui, en vérité, ne sert que d’instrument de propagande à la solde des tenants du pouvoir qui ne soient autres que ces mêmes voleurs de la République ?
Depuis maintenant plus d’une décennie qu’existe le Bureau du Vérificateur général au Mali, qu’est-ce qui pourrait réellement légitimer son fonctionnement quand on sait qu’aucun centime des centaines de milliards de manque à gagner, n’a été restitué au contribuable malien après avoir remis les auteurs desdites malversations aux mains des juridictions publiques ?
Au contraire, qu’est-ce qui pourrait clairement expliquer le fait qu’à la fin de chaque exercice annuel, les responsables des différentes structures épinglées par le rapport du Vérificateur général, ne soient, non seulement point inquiétés par la justice d’Etat, mais souvent promus à d’autres postes de responsabilité plus importants ?
Toute chose qui nous confère la nette certitude que le Bureau du Vérificateur général ne désigne véritablement qu’une coquille vide au service d’une minorité petite-bourgeoise quand on sait que son énorme budget de fonctionnement, au regard du nombre d’années d’existence écoulées, pouvait être indéniablement plus utile dans l’amélioration de la qualité des prestations sociales de base si toutefois nous étions dans un Etat sérieux.
Outre ce constat, l’on a fini par s’apercevoir que la plupart des personnes impliquées dans les différents cas de malversations, ne sont autres que des proches du pouvoir en place. Mais comme le dit si bien l’adage : “Lorsque vous envoyez un insecte pour qu’il aille vous acheter un insecticide, soyez-en sûrs qu’il vous ramera tout sauf ce qui ne pourrait que causer sa propre mort”.
Cette brève illustration suffit amplement pour que l’opinion malienne comprenne, une bonne fois, qu’aucun régime dont les différents rapports du Vérificateur général épinglent régulièrement les proches, ne livrera jamais ces derniers aux mains de la justice au seul motif que lesdites incriminations compromettraient à jamais sa crédibilité, car, c’est le régime lui-même qui, maffieusement, entretient les pires formes d’oligarchies et protège les crimes économiques les plus crapuleux.
C’est en cela que les travaux du Vérificateur général n’aboutissent franchement à rien d’autre qu’un jeu de saupoudrage aussi bien ridicule que folklorique nonobstant tous ces fonds annuellement injectés dans le fonctionnement de l’institution depuis plus d’une décennie sans le moindre dividende économique au judiciaire. Il est donc absolument temps (au regard de notre économie exsangue depuis l’avènement de la crise socio-sécuritaire) que l’Etat s’assume face à ses propres engagements politiques et institutionnels et sortir définitivement de ce jeu infantile et abêtissant que soit l’irrévérencieuse inutilité du Bureau du Vérificateur général.
Désormais, il faudra également cesser de nous enfoncer la tête dans le sable avec toutes ces institutions dont la responsabilité n’est, le plus souvent, attribuée qu’aux affidés du pouvoir afin de leur permettre de s’enrichir, à leur tour, sur le dos des Maliens.