Lors de la 66ème assemblée mondiale de la Santé, à Genève, le ministre, Soumana Makadji, a déploré l’inorganisation dans le processus de distribution des dons alloués par les partenaires étrangers à des ONG pour les besoins sanitaires dans les anciennes zones occupées du pays. Pour corriger cette situation, le chef du département de la santé sollicite un renforcement du système de santé en période de crise.
Lisez l’intégralité de la déclaration !
Monsieur le Président ;
Madame le Directeur Général de l’OMS ;
Mesdames, Messieurs les Ministres ;
Honorables Délégués,
Je voudrais, tout d’abord, adresser mes félicitations au Président pour son élection à la présidence de la 66ème session de l’Assemblée Mondiale de la Santé, et lui assurer du soutien de la délégation de mon pays, le Mali, et de sa pleine coopération dans l’accomplissement de son exaltante mission. Je voudrais, également, remercier Madame la Directrice Générale de l’OMS pour la qualité de son rapport.
Monsieur le Président,
Depuis janvier 2012, mon pays, le Mali est confronté à une crise sécuritaire profonde dans sa partie septentrionale. Cette crise a eu, pour conséquence, un nombre important de déplacés internes et de réfugiés vers certains pays frontaliers, à savoir l’Algérie, le Burkina Faso, la Mauritanie et le Niger, dont nous saluons l’hospitalité fraternelle.
Outre cet afflux massif de populations, nous avons enregistré, hélas, des victimes humaines liées au conflit armé, des violences faites aux femmes, l’enrôlement d’enfants mineurs, des scènes de pillage des infrastructures de base (centres de santé, hôpitaux, télécommunications, réseaux d’eau et d’électricité, des édifices religieux et de biens culturels dont certains sont classés au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO).
Cette situation catastrophique imprévisible d’occupation des deux tiers de notre territoire par des groupes armés non-étatiques, des terroristes et autres narcotrafiquants a remis en cause les acquis réalisés par le Mali en termes d’accessibilité aux structures de soins et de distribution des médicaments de lutte contre les maladies prioritaires (Paludisme, VIH SIDA, Tuberculose) et les Maladies tropicales négligées.
En outre, elle est intervenue dans un contexte caractérisé entre autres par :
- l’insuffisance dans la capacité de réponse des institutions et des collectivités locales face à une crise d’une telle ampleur;
- l’absence d’un plan de gestion des catastrophes du genre;
- l’absence d’un plan d’alerte des structures sanitaires;
- l’absence de plan destiné à la prise en charge d’afflux massif de victimes ;
- et l’Insuffisance de financement des actions de riposte face aux situations d’urgences.
Monsieur le Président, comment cette crise a-t-elle été gérée au plan sanitaire ?
Elle a eu une double réponse qui s’est déclinée dans une perspective à la fois locale et internationale.
Au plan local, la réponse a été apportée par le Ministère de la Santé appuyé au plan technique par le Conseil National de l’Ordre des Médecins avec l’appui financier de l’OMS et d’autres partenaires.
Elle a consisté à :
la désignation des médecins référents dans les régions, pour l’organisation de la dispensation des soins et la notification de la situation épidémiologique ;
l’organisation des missions humanitaires avec des équipes pluridisciplinaires (médecins généralistes, chirurgiens, gynécologues, infirmiers et sages-femmes) ;
et l’envoi des produits pharmaceutiques dont les ARV et des consommables dans les zones occupées.
La collaboration avec le Haut Conseil Islamique, dans la phase aiguë de la crise, a favorisé l’accès des missions humanitaires successives aux zones de conflit.
Au plan international, nous avons assisté à une réorientation du financement des bailleurs en direction des ONG suite à la décision unilatérale des partenaires de suspendre toute collaboration directe avec le Gouvernement.
Cette situation a eu, entre autres, pour conséquences, une prolifération desdites ONG dans la zone anciennement occupée avec des moyens financiers souvent très importants. Ces moyens sont gérés, le plus souvent, sans l’implication des structures nationales compétentes en violation de l’obligation de rendre compte au Gouvernement. Une des conséquences fâcheuse de cette approche est qu’il nous est difficile de faire aujourd’hui une évaluation fiable de ces interventions en termes de coût réel, de résultats sanitaires et d’impacts sur nos indicateurs.
Monsieur le Président, tirant les enseignements de ce qui précède, je voudrai attirer l’attention de cette auguste assemblée sur un certain nombre de points suite à cette crise qui nous a été imposée par des obscurantistes moyenâgeux.
Il s’agit, en premier lieu, du renforcement du système de santé en période de crise qui devrait être le fil conducteur de toutes les interventions des partenaires dans le domaine sanitaire. Aucune intervention ne devrait contribuer à affaiblir le système de santé des pays victimes de crises socio-politiques. En effet, la gestion des problèmes sanitaires en dehors des structures étatiques, quelle que soit la nature de la crise, a des limites au plan de l’atteinte de l’efficacité et de l’efficience.
Il s’agit, également, de porter la réflexion sur les mécanismes de gestion efficaces et pérennes, à mettre en place et prenant en compte toutes les parties prenantes dans un contexte de crise.
Enfin, Monsieur le Président, une autre leçon que je voudrais partager ici est que l’implication de l’Ordre des Médecins en tant qu’organisme personnalisé du Ministère de la santé, appuyé par la tutelle et l’OMS a été une bonne alternative en termes de résolution des problèmes de santé dans le contexte de la crise politico-sécuritaire dans mon pays le Mali.
Pour terminer, je voudrais réitérer ici, la gratitude du peuple et des plus hautes autorités du Mali, à la France et au Tchad dont les interventions salutaires ont permis d’abréger les souffrances de nos paisibles et pacifiques populations. Le Gouvernement du Mali remercie, également, la communauté internationale pour sa mobilisation à ses côtés et son soutien multiforme et l’invite à maintenir et à intensifier son élan de solidarité dans la phase de reconstruction et de gestion post crise qui s’amorce.