En arrivant aux affaires à la Maison Blanche, Donald Trump, conformément à ses promesses de campagne présidentielle, ne cesse de pratiquer le principe de la politique l’«America first», (l’Amérique d’abord). Il retire les USA de l’Accord international de Paris sur le climat. Dans le cadre du commerce international, Trump impose aux entreprises étrangères des taxes douanières sur l’acier et l’aluminium. Et comme si cela ne suffisait pas, le retrait américain de l’accord sur le nucléaire iranien, survenu le mardi 8 mai, avec le retour des sanctions contre l’Iran, vient encore compliquer les relations économiques et stratégiques entre les USA et le reste du monde, notamment ses alliés européens, au risque de mettre l’Europe face à ses propres défis internationaux.
En refusant de respecter systématiquement ses propres engagements sur les Accords internationaux, un pays majeur comme les USA contribue indéniablement à menacer le fragile équilibre mondial. Ce qui aura forcément pour conséquence, la création d’une nouvelle géopolitique mondiale. Après le retrait américain, Trump menace de sanctions toute entreprise qui commercerait avec Téhéran. Ce qui met l’Europe au pied du mur, lorsque l’on considère que les entreprises européennes notamment allemandes et françaises ont, depuis la signature de l’accord de Vienne en 2015, lourdement investi en Iran. Pour dénoncer ce camouflet, voire ce mépris vis-à-vis de ses propres alliés, l’UE a décidé de faire front contre la décision américaine qui l’oblige à cesser de faire des business en Iran.
Pour Paris, Londres et Berlin, la sécurité de la région Proche et Moyen-Orientale dépend beaucoup de l’Accord sur le nucléaire iranien. Il faut donc le maintenir et le respecter. C’est pourquoi les chancelleries européennes ont pris l’engagement d’aider leurs entreprises de poursuivre leurs activités en Iran, pour contourner les sanctions américaines.
Ce qui suppose que l’Europe est plus que jamais décidée de prendre son destin en main. « Il est temps que l’Europe passe des paroles aux actes en matière de souveraineté économique, pour se défendre face aux sanctions que les Etats-Unis veulent appliquer aux entreprises étrangères travaillant en Iran », a estimé, ce vendredi sur Europe 1, le ministre français de l’Economie, Bruno Le Maire. A Aix-la-Chapelle, Angela Merkel a plaidé pour une Europe forte et unie. « Le temps où l’on pouvait compter tout simplement sur les Etats-Unis pour nous protéger est révolu. L’Europe doit prendre son destin elle-même en main, c’est notre défi pour l’avenir », a déclaré la Chancelière allemande. Mais l’Europe a-t-elle les moyens de relever ce défi ?
En termes de ressources économiques, elle a tout le potentiel nécessaire pour investir dans son appareil militaire, sa diplomatie, son aide au développement et devenir une puissance beaucoup plus considérable, affirme Manuel Lafont-Rapnouil, de l’ECFR. Tout dépend de son aptitude à agir collectivement. En y arrivant, l’Europe pèserait dans les relations transatlantiques, voire internationales. Ce qui serait un tournant dans la recomposition géostratégique mondiale où l’Europe aura à occuper sa propre position.
Déjà entre l’Iran et l’Irak, le retrait américain provoque une escalade militaire en Syrie. Un face-à face qui entrainerait derrière ces deux ennemis, leurs puissants alliés que sont la Russie et les USA, qui à leur à tour, vont entrainer des alliés comme la Chine, le Brésil et autres. Toutes choses que souhaitent des faucons d’un camp comme de l’autre. Une opposition qui n’épargnerait aucun continent, se faisant essentiellement autour de la problématique des hydrocarbures. Mais aussi des ressources minières stratégiques.
Ainsi, même si Moscou déplore le retrait américain du Nucléaire et du retour des sanctions, il est évident que la Russie profite de la remontée actuelle des cours du brut. Ses entreprises seraient moins exposées aux sanctions et pourraient bien accroître leurs échanges avec l’Iran.
De même que les entreprises russes seraient forcément les acteurs privilégiés de la modernisation des infrastructures iraniennes, comme des réseaux électriques et de télécommunication. Toutefois, les entreprises russes devront affronter la concurrence d’entreprises chinoises, qui financent déjà des projets à hauteur de plusieurs dizaines de milliards en Iran. Cela, même si la Russie dispose de l’avantage, dans cette compétition commerciale, de la zone de libre-échange de l’Union économique eurasiatique, comprenant la Russie, la Biélorusse, l’Arménie, le Kazakhstan et le Kirghizstan à laquelle Téhéran pourrait bientôt adhérer.