Ce fut une visite éclaire, mais ô combien utile pour notre pays et le moral des Casques bleus operant chez nous. En se rendant, hier à Mopti pour une visite de quatre heures, le secrétaire général des Nations unies a pu saisir dans le vif les aspirations réelles des populations de cette région en proie aux affrontements intercommunautaires, au terrorisme et au grand banditisme. Cette visite fut une véritable tribune de plaidoyer en faveur de la stabilité de la Region de Mopti. «Il faut à tout prix éviter l’effondrement du Centre, en y rétablissant la sécurité et la normalité», a déclaré Antonio Guterres, tout en appelant la Communauté internationale à une plus grande solidarité envers le Mali.
Le patron des Nations unies a lancé ce cri de cœur au sortir de sa rencontre avec la société civile et les responsables locaux. La rencontre a été le clou d’une série de contacts que Antonio Guterres a eu à faire dans la Venise malienne. Arrivés aux environs de 11 heures 40 minutes à l’aéroport Ambodedjo de Sévaré, le sécretaire general de l’ONU et sa délégation ont eu droit à des honneurs rendus par les Casques bleus. L’hôte de marque mettra aussitôt le cap sur le Quartier général de la Force conjointe du G5 Sahel où il a rencontré, à huis-clos, le commandement militaire. Le général Didier Dacko, commandant de la force et ses collaborateurs attendaient avec impatience cette visite car c’est une opportunité inouïe pour eux de plaider le renforcement des capacités opérationnelles de la Force conjointe du G5 Sahel qui vient de faire ses premiers pas sur le terrain. Donc, elle en a besoin sur «tous les plans, notamment opérationnel et logistique», selon le général Dacko qui piaffe d’impatience de mettre le turbo. «L’opérationnalisation de la Force conjointe du G5 Sahel est très avancée. Nous avons déjà conduit deux opérations et une autre est sur le point d’être lancée», a annoncé le chef militaire. Au sortir de la rencontre, Antonio Guterres a particulièrement magnifié «la façon dont le commandement est déterminé à construire ce projet» pour protéger les populations civiles de la Région. Mieux, au-delà, à assurer la sécurité de toute la Communauté internationale face à la menace terroriste et la criminalité organisée qui prolifèrent dans le Sahel. «J’aimerai bien pouvoir mieux les appuyer», a-t-il confié à la presse.
Faute d’avoir pu obtenir, pour le moment, des «financements garantis pour le G5 Sahel», le patron des Nations unies fera en sorte que la MINUSMA, dans la mesure de ses capacités, puisse fournir «tous les services à la jeune Force». Aussi, «nous ferons un plaidoyer très fort face à la communauté internationale pour que le G5 Sahel puisse disposer des ressources financières et matérielles nécessaires à son efficacité», a-t-il promis. Ce n’est pas tout. L’ONU s’investira pleinement afin que la Communauté internationale accorde un investissement conséquent au développement de la région du Sahel, a dit M. Guterres parce qu’il n’y a «pas de paix sans développement, et vise versa».
Depuis des mois, les communautés Dogon et Peule de la région s’affrontent fréquemment par le truchement de manipulations malsaines. Cette situation, qui sert de terreau au terrorisme, a fini de pourrir le climat sécuritaire dans cette région. Aujourd’hui, ses populations n’aspirent qu’à la paix. «Il y a chez les populations et leurs dirigeants, une détermination réelle de lutter pour la paix. Ils ne veulent pas de confrontations entre les communautés», a déclaré Antonio Guterres, au sortir de sa rencontre avec la société civile et les responsables administratifs et politiques de Mopti. Ces interlocuteurs ont souhaité que les Nations unies aident les autorités maliennes à accélérer la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation et aussi à l’organisation d’élections transparentes et apaisées dans notre pays.
Face à la presse, Antonio Guterres a sollicité «une plus grande solidarité de la Communauté internationale en faveur du Mali et son peuple» qui a «énormément souffert». «Il y a toutes les raisons pour le faire», dit-il, surtout que c’est dans l’intérêt du monde entier que le Mali puisse vaincre l’instabilité. En effet, a développé M. Guterres, le Mali est dans une région géographique centrale, vis-à-vis du Moyen-Orient et de l’Europe. «Si le Mali s’effondre, les conséquences en matière de sécurité et de mouvements massifs des populations vers d’autres régions seront extrêmement difficiles à gérer pour tout le monde», a-t-il prévenu. Aussi, a-t-il estimé, «l’appui au Mali est acte de générosité, de solidarité, mais surtout un acte intelligent de la part de tous ceux qui pourront être menacés si l’instabilité se propageait dans la région».
Antonio Guterres, qui observait le jeûne en signe de «solidarité avec la communauté musulmane», ne pouvait pas quitter Mopti sans rendre visite aux ulémas dans la grande Mosquée de Mopti. Ce fut un vrai instant de communion et de bénédiction. Le secrétaire général de l’ONU était accompagné à Mopti d’une forte délégation, composée notamment du secrétaire général adjoint chargé de l’appui aux Missions, Atul Khare, du secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, Jean-Pierre Lacroix, ainsi que de la directrice exécutive de l’UNICEF, Mme Henrietta Fore. Le ministre malien des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Tièman Hubert Coulibaly, était également du voyage de la Venise malienne.