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Dans le nord du Niger, l’ex-eldorado libyen devenu une "menace"
Publié le mercredi 29 mai 2013  |  AFP




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AGADEZ (Niger), Eldorado à l'époque de Kadhafi, la Libye est devenue une "menace" pour les habitants du nord du Niger, traumatisés par les deux attentats suicide perpétrés, selon Niamey, par des jihadistes venus du Sud libyen.

"La Libye, ce n'est plus le pays qui nous nourrissait, elle est devenue une vraie menace pour notre paix !", résume Iliassou, un conducteur de moto-taxi, interrogé par l'AFP à Agadez.

Dans la principale ville du nord du Niger aux confins du désert, une attaque contre le grand camp militaire a fait le 23 mai une vingtaine de morts, essentiellement des soldats. Presque au même moment à Arlit, à quelque 200 kilomètres au nord, un autre attentat tuait un employé nigérien sur un site d'uranium du groupe nucléaire français Areva.

A travers les ruelles ocres et poussiéreuses d'Agadez, depuis les "fadas" - ces points de rendez-vous en plein air où l'on prend le thé en bavardant - jusqu'au marché et aux abords de la célèbre mosquée, la Libye voisine, d'où venaient les assaillants selon le président nigérien Mahamadou Issoufou, est dans tous les esprits.

"Comment un pays si généreux et si calme a-t-il pu se muer en un monstre ?", s'interroge Alousseïni Algabas, professeur de lycée.

Directeur de la radio locale Sahara FM, Ibrahim Manzo a son explication: "c'est l'effondrement du régime de Kadhafi qui nous a amené tous ces problèmes".

Comme lui, de nombreux habitants d'Agadez sont des nostalgiques du "Guide" libyen Mouammar Kadhafi, tué en octobre 2011 à l'issue d'un conflit de huit mois avec une rébellion.

Sous Kadhafi, qui fut à la fois bailleur de fonds pour le nord du Niger et parrain des rebelles touareg des années 1990 et 2000 basés à Agadez, des milliers de ressortissants de la région partaient travailler en Libye, d'où ils envoyaient de l'argent pour leurs familles restées au pays.

Nombre d'entre eux ont ensuite été chassés par les nouveaux maîtres de Tripoli, et continuent de l'être. Quelque 1.500 clandestins ouest-africains expulsés de Libye, dont beaucoup de Nigériens, sont arrivés le week-end dernier à Agadez. Certains errent comme des âmes en peine dans la cité, en attendant de retenter de passer la frontière libyenne.

"Avant de devenir un sanctuaire de terroristes, la Libye était une de nos mamelles", souligne Abdou, policier à la retraite.

Crainte d'un "scénario à la malienne"

Mais les nouvelles autorités libyennes apparaissent largement impuissantes à tenir leur vaste territoire, même si elles ont nié cette semaine que le pays soit devenu un "foyer du terrorisme" depuis que les mouvements islamistes armés ont été chassés du nord du Mali par une intervention franco-africaine.

"Le Sud libyen, où règne l'anarchie, est devenu un sanctuaire pour les terroristes traqués au Mali", assène Rhissa Ag Boula, ancien chef rebelle touareg et désormais conseiller du président nigérien.

"Après avoir foutu la pagaille au Mali d'où ils ont été chassés, les terroristes se sont réfugiés dans le sud de la Libye", confirme Mohamed Adjidar, membre d'une commission officielle de lutte contre la prolifération des armes légères.

Mohamed Anako, président du conseil régional d'Agadez et vétéran de la rébellion touareg des années 1990, s'alarme: "en Libye chaque tribu a ses armes et cela profite aux groupes terroristes". "A tout moment nous pouvons faire face à des attaques terroristes", prévient-il.

Le Sud libyen étant devenu une "menace réelle", le sultan Ibrahim Elhadj Oumarou, plus haut dignitaire musulman d'Agadez, "appelle l'Etat (nigérien, ndlr) à bien garder cette frontière".

"Il faut vite s'occuper de cette zone libyenne avant qu'il ne soit trop tard", juge Mohamed Adjidar. Faute de quoi, selon lui, "un scénario à la malienne risque de se produire dans le nord du Niger".

D'autant qu'"avec quelques billets les terroristes peuvent acheter des complices locaux pour accomplir leur sale besogne", avertit Ahmed Maha, un chauffeur.

Le président du conseil régional d'Agadez lance donc un "appel": pour lui, l'Otan, intervenue en 2011 en Libye, et la communauté internationale doivent "aider à stabiliser la Libye".

En visite mardi à Niamey, le chef de la diplomatie française Laurent Fabius a prôné une "action commune" avec Tripoli et ses voisins contre les "groupes terroristes".

bh/tmo/lbx

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