Deux hélicos de combat de l’armée malienne ont craché en moins d’un moins d’intervalle. Le premier, s’en souvient on, eut lieu à Diabali le mercredi 13 mars 2013. Il a fait un mort, Kaboré Tounougma, jeune soldat de la force BADENYA du Burkina Faso. 12 avril 2013, crash d’un autre hélico à 50 km de Sevaré. Bilan, 5 vaillants soldats de l’armée malienne tués, dont deux pilotes chevronnés.
Ces drames à répétition suffisent – ils pour mettre largement à l’évidence les graves dysfonctionnements de nos appareils et la malaise que couve la gestion des logistiques. A l’état major de l’armée malienne, on fait tout pour expliquer l’inexplicable. Des enquêteurs sont déjà à pied d’œuvre pour comprendre le comment du dramatique crash du 12 avril 2013.
A voir de près ces deux drames, une évidence saute à l’œil. La même cause produit les mêmes effets. Le mauvais état des appareils, doublé de leur vétusté et l’absence d’un certain réalisme des hautes autorités de l’armée malienne. Toutes choses qui font de nos hélicos de combat des dangers mortels pour nos propres soldats.
Voyons tout cela un peu plus en profondeur.
Diabali, le 13 mars 2013. L’hélicoptère MI 24 de l’armée malienne est en approche d’atterrissage. Tout se passe bien jusqu’à… Subitement, un bruit sourd retentit. Le lourd avion de combat est en difficulté. Il vient de heurter un pick up de la force BADENYA du Burkina Faso. Le choc est violent. L’appareil est touché au niveau de sa queue. Impossible de le contrôler. Finalement, le mastodonte chute sur le pick up. Un Burkinabé est tué sur le coup. Le pilote « 120 » et ses camarades s’en tirent avec des blessures légères et des frayeurs.
C’est vrai que ce crash s’explique mais les raisons avancées jusqu’ici relèvent purement de l’aberration. Il paraît que c’est la poussière qui en est la cause, a-t-on appris de source militaire. A l’atterrissage, le nuage de poussière soulevé par l’aéronef aurait anéanti la visibilité du pilote. Impossible pour lui de voir l’engin du Burkina Faso. Il l’a heurté et c’est le drame.
Curieux quand même comme justificatif, sachant bien qu’un avion n’atterrit pas selon le bon vouloir du pilote. Il y a forcement tout un paramètre à maitriser et des infos en amont qu’il est censé connaitre. Un hélicoptère n’est pas un parachutiste qui descend, soumis au gré du vent.
A Sévaré, l’affaire est encore plus bizarre. C’était le 12 avril 2013 dans le village d’Ouro Modi, à 50 km de la ville de Sévaré. Un second hélicoptère de l’armée malienne y a crashé, tuant sur le coup ses 5 occupants. Il s’agit de deux officiers pilotes, un élève officier et deux sous officiers. Les circonstances de ce sinistre ne sont pas encore officiellement connues. Cependant, plusieurs zones d’ombre restent à élucider.
Dans un communiqué officiel, l’armée parle de défaillance technique pour expliquer le crash. Certes ! Mais comment en est – on arrivé là, sachant bien que cet appareil a fait l’objet d’une intense campagne de révision par des techniciens venus spécialement de la Bulgarie et qui ont même donné leur OK pour le voyage sur Sévaré ?
Sans être dans le secret des Dieux, d’autres réalités pourraient se dessiner autour de ce drame. Il s’agit de la probabilité que la défaillance technique dont parle l’armée serait due au moteur de l’appareil. Ce lourd et puissant moteur, au fil du trajet, se serait mis à vibrer comme une voiture qui roule sans pattes moteur. Forcement, l’appareil perd en stabilité et en puissance.
A cela pourrait s’ajouter la probabilité d’une explosion du réservoir interne du fait d’un chauffage anormal de l’appareil.
L’autre aspect est que le colonel Abdoulaye Diallo et le capitaine Malamine Sangaré, deux pilotes chevronnés selon des frères d’armes, avaient tous les deux des appréhensions sérieuses et négatives sur ce voyage. Pourquoi ?
Un, après la révision de l’appareil par des techniciens Bulgares, le voyage a été annulé à trois reprises pour raison de mauvais temps. Pour la petite histoire, au dernier départ raté, c’est au niveau de Koulikoro que l’hélicoptère aurait fait demi-tour pour rejoindre Bamako Senou. La raison : toujours mauvais temps.
« Il fallait illico ramener l’appareil à Sévaré. La pression était forte. L’avion devrait quitter Bamako », nous a confié un proche.
A ce dernier, on peut dire « juste ». Car, le jour même du départ, la météo n’était pas rassurante. L’avion de reconnaissance chargée de cette mission l’aurait confirmé avec possibilité d’éclairci durant le voyage. Alors, les pilotes décollent. Destination : Sévaré. La suite est connue. Le colonel Abdoulaye Diallo, le capitaine Malamine Sangaré, l’élève officier Ibrahim B Mariko et l’adjudant Cheick O Diarra périssent avant d’atteindre leur destination.
Deux, Malamine Sangaré n’était pas dans ses assiettes à la veille du départ. « Qu’est ce que tu as ? » lui a demandé un proche ami. Mala lui répond discrètement : « je vois ma route. Elle est toute rouge ». « Fais des sacrifices mon cher » lui réplique le compagnon. Mala dit : « c’est déjà fait ».
Pourquoi ce Mala, jeune officier pilote sortit de l’école de pilotage de Rabat et qui a fait ses preuves à Aguel hok, a-t-il subitement basculé dans le surnaturel comme s’il devenait un visionnaire ?
Certainement que Mala, en officier expérimenté sur ce genre d’engin, doutait fort de la résistance de son appareil. Cela, malgré l’intervention des techniciens bulgares.
A en croire des indiscrétions, Mala avait raison d’avoir peur de ce voyage. « Les hautes autorités de l’armée malienne savaient que le voyage n’était pas sans risque. L’appareil n’était pas d’une grande assurance mais il fallait être sur place avec un hélicoptère pour ne pas donner raison à ceux qui disent que l’armée malienne ne vaut rien, qu’elle fuit le combat. On nous met une pression terrible», a ajouté un interlocuteur.
A l’état major de l’armée de l’air malienne, la perte est énorme. Sur 6 pilotes aptes à piloter les hélicoptères genre MI 24, 3 sont morts à Sévaré. Il s’agit du colonel Abdoulaye Diallo, le capitaine Malamine Sangaré et l’élève officier « 120 ».
Quant aux hélicos de combat, le Mali ne dispose aujourd’hui que d’un seul en état ; et quel état ? Ce dernier est aussi présentement au garage à Sénou. Des techniciens bulgares travaillent à le mettre au point, afin qu’il joigne Sévaré au plus vite.