Dans le cadre de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, le gouvernement vient d’adopter un projet de « loi d’entente nationale ». L’objectif est de restaurer les relations intercommunautaires et le vivre ensemble dans le Nord du Mali à la suite des événements du premier semestre 2012. L’entente, d’après les dispositions de ce texte, suppose : pardonner aux rebelles d’avoir pris les armes contre leur patrie et commis plus d’une exaction, indemniser les victimes de ces exactions.
Avec l’adoption de ce projet de loi, l’Etat ne cesse de jouer sa partition. Auparavant, il s’est signalé par plus d’une initiative dans le cadre de la résolution de la crise que traverse le Mali depuis six ans. Parmi ces initiatives, l’organisation de la Conférence d’Entente Nationale, la signature de l’Entente sur la mise en place des autorités intérimaires, la mise en place effective de ces autorités dans les cinq régions du Nord du Mali. Cependant, aucune de ces initiatives ne semble porter fruits : les régions concernées continuent d’être hors du contrôle de l’Etat central.
L’adoption du projet de « loi d’entente nationale » inspire une question fondamentale : comment déterminer qu’un rebelle n’a pas du sang sur les mains si l’on sait qu’actuellement, parmi les présidents d’autorités intérimaires installées, figurent des rebelles ayant participé au massacre d’Aguelhok ?
D’autre part, allusion est faite à l’Algérie qui avait tourné la page des années noires marquées par le terrorisme islamiste en promulguant la loi de « concorde civile ». Cependant, la différence entre les cas algériens et maliens est notoire : l’Algérie a commencé par éradiquer totalement le terrorisme avant de promulguer sa loi, le Mali veut amnistier des hommes qui continuent de défier son autorité.
A y regarder de près, l’on tire un constat : le gouvernement s’échine à mettre en œuvre les dispositions d’un texte si contraignant qu’il est frappé de caducité. A l’heure actuelle, le problème n’est plus la rébellion. Le problème a, pour noms, insécurité et situation créée de toutes pièces à Kidal.
Le président Modibo Keïta ne s’y trompait pas qui, informant sur les causes de la rébellion dans l’Adrar des Ifoghas déclarait : « Vous savez que de tout temps cette région a été le théâtre d’opérations militaires des troupes françaises, en raison des difficultés que la France avait rencontrées – alors que la République du Mali était le Soudan Français – pour intégrer ces populations accrochées à leurs montagnes dans le cycle normal de la vie du territoire. Et les derniers événements entre ces rebelles et les troupes françaises datent de 1958. C’est vous dire donc que pendant les 78 ans de domination coloniale, cette région n’a jamais été totalement pacifiée ». C’était le 21 août 1964.
De cette date à ce jour, le problème se situe, non entre le gouvernement et une infime minorité de Kel Adagh qui a fait de l’irrévérence envers l’Etat un fonds de commerce.
Au cas où l’Assemblée Nationale adopterait la loi d’entente nationale, à n’en pas douter, ce texte ira grossir le dossier des accords avec les rebelles, il n’aura aucune prise sur le réel, se révélera inefficace comme s’est révélée l’Entente sur la mise en place des autorités intérimaires.