PolitiqueL’Opposition face à la presse suite à la répression de la marche du 2 juin: « Il leur faudra marcher sur nos corps pour pouvoir instaurer la dictature dans ce pays »
Les responsables de l’opposition et des leaders religieux étaient face à la presse le dimanche 3 juin 2018 à la Maison de la presse de Bamako pour non seulement dénoncer la répression de leur manifestation du 2 juin 2018 par les forces de l’ordre, mais aussi, pour exiger la tenue d’élection crédible et transparente, l’accès égal pour tous à l’ORTM, l’accès à l’eau et l’électricité. « Si le président et le Premier ministre en avaient la possibilité, ils instaureront une dictature prédatrice dans ce pays…
Il leur faudra marcher sur nos corps pour pouvoir instaurer la dictature dans ce pays », soulignent les responsables de l’opposition. Par ailleurs, l’opposition exige la démission du Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga et projette de marcher le vendredi 8 juin prochain.
Plusieurs personnalités ont pris part à cette conférence de presse à l’allure d’un meeting, car la salle était pleine à craquer. Parmi elles, nous pouvons citer entre autres : le chef de file de l’opposition, l’honorable Soumaïla Cissé; le candidat de l’Adp-Maliba, Aliou Boubacar Diallo ; Mamadou Sidibé du PRVM; Oumar Hammadoun Dicko du PSP; les anciens ministres Mamadou Igor Diarra, Djibril Tangara.
Au présidium, on notait : Amadou Guindo de Badeya ton ; l’honorable Amadou Thiam président de l’Adp-Maliba ; Mohamed Youssouf Bathily dit Ras Bath du CDR ; l’Ambassadeur Cheick Sidi Diarra de la Coalition pour l’alternance et le changement ; Tiébilé Dramé du Parena et Mohamed Aly Bathily, ancien ministre.
Prenant la parole, l’honorable Amadou Thiam a fait savoir que la répression qui s’est passée le 2 juin 2018 est inacceptable. «Notre démocratie a pris un coup fatal », a-t-il dit. Avant de lire le communiqué de presse produit par l’opposition le 2 juin 2018 dans la soirée. Dans ce communiqué, l’opposition exige la démission du Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maïga et projette une grande marche pacifique, le vendredi 8 juin 2018, pour l'égal accès à l'ORTM, pour des élections transparentes et contre les violences policières.
Selon lui, cette marche partira de 8h30 minutes à la place de la liberté pour prendre fin à la Bourse du travail. A sa suite, l’ancien ministre, Mohamed Aly Bathily, candidat à l’élection présidentielle, a indiqué que le premier ministre, Soumeylou Boubèye Maïga n’est brave que lorsqu’il est en face des gens désarmés. «Soumeylou Boubèye Maïga n’est pas un homme d’Etat mais un voleur d’Etat », a-t-il dit.
A ses dires, la nouvelle loi électorale donne pouvoir au ministre de l'Administration territoriale d'ériger arbitrairement des circonscriptions électorales en zones de non droit, où des élections ne pourront pas se tenir pour "des raisons de force majeure". «Dans ces conditions, des circonscriptions favorables à l'opposition peuvent être déclarées zones d'insécurité; ce qui empêcherait les électeurs desdites zones d'exercer leur droit de vote garanti par la Constitution du Mali », a-t-il dit.
Pour lui, la fraude électorale ne passera pas. Par ailleurs, il dira que le président IBK est un homme peureux. «La peur est dans son camp. IBK est passible de poursuite pour haute trahison pour avoir suspendu l’application de la loi sur l’enrichissement illicite. Il a trahi son serment, son rôle est de veiller à l’application de la loi et non de les suspendre », a expliqué Me Mohamed Aly Bathily.
Selon Bathily, l'Office de radio et de télévision national (ORTM) est devenu la chasse gardée du régime d'IBK. «En effet, ce service public est sous les ordres constants du régime en place qui empêche un accès équitable de toutes les autres composantes de la société malienne. C'est pourquoi il est constant de voir que toutes les émissions du régime sont diffusées entièrement sur les ondes de l'ORTM, tandis que celles des autres forces de la nation, qui ne sont pas complices du pouvoir actuel, n'en bénéficient que d'une ou de deux minutes, au maximum. Cette situation est inadmissible dans un état de droit et ne saurait nous laisser indifférent», a conclu l’ancien ministre.
Fascisme rampant
Quant à Tiébilé Dramé du Parena, il dit avoir un sentiment de dégoût de voir des hommes qui ont participé au combat pour l’avènement de la démocratie et qui se sont transformés le 2 juin 2018 en acteur d’un fascisme rampant au Mali. « Des candidats, des parlementaires ont été frappés à coups de gourdins. Des candidats qui dans trois mois dirigeront ce pays ont été gazés le 2 juin 2018 à Bamako en République du Mali.
Notre combat est dirigé à ceux qui veulent mettre fin à la démocratie. Le directeur de la police, le ministre de la Sécurité, le Premier ministre, le président de la République ont donné des instructions aux forces de l’ordre pour s’attaquer clairement, nettement aux candidats à l’élection présidentielle, aux parlementaires, aux leaders de partis politiques, aux élus. Un pays démocratique qui se livre à de telles pratiques. Deux candidats ont reçu des soins à l’hôpital le 2 juin 2018 (Mamadou Igor Diarra, Aliou Boubacar Diallo). Où sommes-nous ? Dans une dictature sahélienne ? » S’est-il interrogé.
Selon lui, si le Secrétaire général des Nations Unies fait un communiqué pour demander aux dirigeants de Bamako de respecter le droit à la manifestation y compris dans un contexte d’état d’urgence, c’est parce que les jeunes ont résisté. « Si les tenants d’un fascisme rampant avaient réussi à étouffer la manifestation du 2 juin 2018, vous n’auriez aucune protestation dans le monde. Si le président et le Premier ministre en avaient la possibilité, ils instaureront une dictature prédatrice dans ce pays », a dit Tiébilé Dramé.
Il a rappelé que la démocratie malienne a été conquise de haute lutte dans le sang. Et de ce fait, poursuit-il, les droits démocratiques consignés dans la constitution doivent être respectés par tous obligatoirement. «Nous les obligerons à respecter nos droits fondamentaux reconnus et protégés par la constitution. Nous ne les laisserons pas faire, c’est tous le sens à la grande manifestation du vendredi 8 juin ; qu’ils sachent que la dictature ne passera pas dans ce pays là ; qu’ils sachent que le fascisme rampant ne triomphera pas dans ce pays. Il leur faudra, puisqu’ils sont déterminés, ils ont la commande des forces de sécurité aujourd’hui, ils ont les grenades lacrymogènes, ils ont les gourdins et les matraques, ils ont des baïonnettes, il leur faudra marcher sur nos corps pour pouvoir instaurer la dictature dans ce pays. Honte à eux ce qu’ils ont fait le 2 juin », a conclu l’opposant Tiébilé Dramé.
Selon l’ambassadeur, Cheick Sidi Diarra de “Anw bè Faso do” le Mali est dans un état de fragilité. A l’en croire, le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, a fait un communiqué pour déplorer l’interdiction de la marche par le gouvernement. Aux dires de Mohamed Youssouf Bathily dit Ras Bath du CDR, IBK et Boubèye sont au pouvoir parce qu’il y a eu la révolution de mars 1991.
Bientôt une association de victimes pour porter plainte contre la répression policière du 2 juin 2018
Ensuite il a invité le pouvoir à savoir raison garder. «J’invite les jeunes policiers et le général Salif Traoré d’aller s’informer sur les charges qui pèsent sur Charles Blé Coudé », a-t-il dit. Le leader religieux, Amadou Guindo de Badenya Ton a invité ses membres à sortir massivement pour la marche du vendredi 8 juin 2018.
Le candidat de l’Adp-Maliba, Aliou Boubacar Diallo a souligné qu’il a été désagréablement surpris par le désordre que les forces de l’ordre ont créé au siège de l’Adp-Maliba. « S’il plait à Dieu, IBK sera battu dès le premier tour», a-t-il dit.
Pour sa part, le chef file de l’opposition, Soumaïla Cissé a félicité les handicapés pour leur bravoure lors de la manifestation du 2 juin 2018. «Nous avons connu mars 1991. S’il continu, ça va finir comme ça. Depuis mars 1991, on n’a pas vu une répression comme celle-ci. Le président-candidat est paniqué. Depuis novembre 2015, nous sommes en état d’urgence. Or il y a eu beaucoup d’activité. Mobilisons-nous, c’est la victoire des jeunes. Votre pays est dilapidé, volé. Vous ne devez pas l’accepter. C’est pourquoi le vendredi 8 juin, il faut remplir Bamako par votre détermination. Je crois en vous et suis sûr que nous vaincrons », a conclu le chef de file de l’opposition.
Mamadou Sidibé du PRVM abonde également dans le même sens. L’ancien ministre de l’Economie et des Finances, Mamadou Igor Diarra, a fait savoir qu’il y aura association de victimes pour porter plainte contre la répression policière du 2 juin 2018. «Les gens oublient qu’il y a eu le procès crime de sang au Mali», a-t-il dit. En réponse aux questions des journalistes, Tiébilé Dramé a précisé que les manifestants ne sont pas à l’origine de la violence. Ras Bath dira que la jonction entre la classe politique et la société civile fait peur. « La marche du 8 juin 2018 n’a ni vainqueur ni vaincu, on leur offre une chance de se ressaisir pour autoriser cette marche », a conclu Ras Bath.