Ce n’est pas par gaieté de cœur qu’on le dit, mais c’est une réalité : ce pouvoir n’a pas de respect pour la presse. Plutôt la presse locale. Cet état d’âme de rejet s’est transposé aux forces de l’ordre, même chez des gardes rapprochées des hautes personnalités qui voient en ces pauvres journalistes des têtes de monstre, des véritables malpropres à éloigner des honnêtes hommes et à chicoter à chaque moment de trouble. C’est effectivement cette attitude de dédain contre la presse malienne qui explique l’échec presque total de la communication autour de toutes les grandes actions du régime.
Avec l’arrivée de Arouna Modibo Touré à la tête du département de la Communication (mais sans le portefeuille du porte-parole du Gouvernement) l’on pensait que cela allait soigner la relation du pouvoir avec les hommes de media. Ce, en considération de la respectabilité que ce jeune ministre jouit auprès de tous les acteurs de la presse, sans distinction aucune. Mais malheureusement, cela a certes permis d’organiser la profession avec l’avènement d’une nouvelle carte de presse digitalisée et d’autres mesures et actions salutaires, sans éteindre la haine du régime contre ces faiseurs d’opinion. Jamais, un régime, depuis l’avènement de la démocratie n’a eu autant d’indifférence et de mépris à l’encontre de la presse comme celui-ci. Il ignore complètement que la politique rime avec la presse. Pas de conférence de presse avec une moindre institution de la République, aucune interview et hui clos lorsqu’il s’agit d’un événement important.
Ce faisant, sans même le vouloir ou le souhaiter, la presse locale malienne est mise dans le même panier que l’opposition. Cela par la volonté ‘’voilée’’ du prince du jour. Toute chose qui a rendu l’opposition plus forte et assez communicante. En l’espace de cinq jours elle peut annoncer un événement de grande envergure et le réussir sans coup férir. Cela tout simplement par ce qu’elle accorde de l’importance à la presse et compose franc jeu avec les hommes de media. C’est cette constance qui a donné de la valeur ajoutée à sa marche réprimée du 2 juin.
En un laps de temps, le monde fut inondé par les images des ces hommes en noir cagoulés qui réprimandaient une simple marche des dirigeants politiques, au point d’agresser des simples journalistes reporters, asperger de gaz lacrymogène des paisibles citoyens et bloquer toutes les circulations. S’agissait-il du Mali, dont le président donne à chaque grande occasion des leçons de démocratie aux autres ? Se demandait un intervenant dans un débat télévisé d’une chaîne étrangère.
De ce fait l’opposition, ayant senti cette déchéance du pouvoir, dont les forces de sécurité ne font pas le distinguo entre des reporters et des manifestants, a mis la barre plus haut, en projetant au va vite une autre marche, qui en réalité n’avait aucun contenu. Il s’agissait seulement pour elle de tenter un test grandeur nature de mobilisation et de provocation du pouvoir, dont le nouveau chef de Gouvernement se plait dans la dénomination de ‘’tigre’’. C’est pourquoi elle a greffé dans ses doléances des slogans qui mobilisent davantage, tels : ‘’la coupure d’électricité et de l’eau’’, ‘’la démission du Premier ministre’’… Ainsi, le pouvoir, coincé entre le marteau de la communauté internationale et l’enclume de la presse n’avait d’autre alternative que d’autoriser la marche, qu’il avait interdite et réprimée cinq jours seulement avant.
De la même manière que le régime a fait un repli stratégique en reléguant au second plan le fallacieux argument d’état d’urgence, de cette même manière il a l’obligation de revoir sa copie. Descendre de son piédestal, reconsidérer la presse et d’autres moyens qui sont essentiels pour aborder avec assurance le scrutin du 29 juillet. Sans quoi, il est connu de tous qu’après Mohamet (PSL) Dieu n’enverra aucun prophète encore. Et en démocratie personne n’est liée à personne par un pacte de sang. D’ores et déjà le signe avant coureur de cette réalité a été le départ de la nouvelle plateforme de la majorité de quatre partis politiques, en rang serré.