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Les cérémonies familiales au Mali : Moment de partage ou folie de grandeur ?
Publié le samedi 14 juillet 2018  |  Aujourd`hui
Célébration
© aBamako.com par Momo
Célébration du mariage de Mr Boulan Barro et Fada Dramé
Bamako le 26 avril 2015 la cérémonie de célébration du mariage de Mr Boulan Barro et Fada Dramé a eu lieu a la mairie de Badalabougou
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Au Mali, les cérémonies de mariages, baptêmes voire de fiançailles, sont des événements organisés avec beaucoup de soins, surtout du côté des femmes. Mais si jadis ces cérémonies étaient célébrées avec simplicité, selon la tradition et la religion, tel n’est plus le cas de nos jours, notamment avec les femmes qui ne se contentent plus que de danser, mais dépensent, disons même gaspillent de l’argent pour des habits, chaussures, sacs, voire même pour couvrir la cagnotte destinée aux griots, dans le seul but de se faire un nom, une réputation. Des “togôgnini” ! Même les obsèques qui exigent recueillement et sobriété, n’échappent désormais plus au faste ostentatoire.

De nos jours, dès qu’on annonce une cérémonie de mariage, le calvaire et les soucis des femmes commencent : il faut être parmi les plus belles, les plus ” civilisées “, les plus appréciées, les plus considérées. Elles pensent aux habits à porter, aux chaussures, aux bijoux et aussi à l’argent pour payer le cadeau à donner en guise de “bolomafara” comme on l’appelle au Mali. Sans compter la provision financière à offrir aux griots, etc. Les femmes peuvent avoir plus de quatre (4) cérémonies par mois et s’arrangent, de toutes les manières, à les honorer de leur présence remarquée. Si certaines, même travaillant dans une administration font aussi du commerce, ainsi que d’autres activités lucratives pour avoir des ressources financières en mesure de couvrir leurs folles dépenses, en plus, ne rechignent pas aussi à prendre part à plusieurs tontines. Même celles qui ne travaillent pas ou dépendent de leur époux, veulent avoir leur main dans ces tontines.

Selon la vieille dame, Dougoufana : “Les cérémonies perdent de plus en plus leur sens. Auparavant, elles étaient célébrées pour d’abord le témoignage, c’est-à-dire lorsque l’on rassemblait les gens pour se marier. C’était donc dans le but de les prendre comme témoins de l’union et également pour partager des moments de bonheur, contrairement à ce qui se passe de nos jours où le mariage est comme une opération de vente et d’achat au marché. Les époux ne se choisissent plus par amour ou affinité, mais par intérêt.

Les lieux de célébration sont devenus des endroits de concurrence, de provocation, de folie de grandeur où les femmes gaspillent tout ce que leur époux gagne en se tuant à la tâche. Certaines offrent des sommes énormes dans le but juste de se faire une réputation, comme pour être citées parmi les grandes dames de la cité. Et puis, ces histoires d’uniforme, je n’y comprends rien. A notre époque, les uniformes n’étaient pas obligatoires, chacun avait ses boubous de fête que l’on appelait “fonds de valise”, et pouvait les porter autant qu’il le souhaitait à chaque cérémonie. Mais de nos jours, les femmes sont complexées à l’idée de porter les mêmes habits à plusieurs cérémonies.

Les uniformes, si elles existaient pour nous, concernaient juste les membres la famille, notamment les coépouses ou les belles-filles et c’étaient des tenues simples. En effet, on choisissait un tissu facile à acheter par tout le monde et non les Basins ou tissus brodés onéreux que les femmes s’imposent de nos jours. Vraiment, cette génération a bafoué nos valeurs et coutumes. Ce que je trouve scandaleux, ce sont les histoires de tontines. On dirait que leur vie se résume à celà. A notre temps, nous aidions nos époux à économiser pour construire des maisons et prévoir l’avenir des enfants, mais les femmes, de nos jours, prennent tout ce que leur époux gagne et le mettent dans des tontines, mais uniquement dans le but de chercher à se faire une réputation lors des cérémonies familiales. Vraiment, il faudra y remédier”.

D’après Salif, un fonctionnaire de l’Etat : “Si l’Etat avec les chefs traditionnels et coutumiers pouvaient simplifier les cérémonies de mariage et de baptême, comme au temps de nos aïeux, ils nous rendraient énormément service. Tout ce que les hommes fournissent comme effort se trouve gaspillé lors de ces cérémonies par les femmes. Ce qui est étonnant, c’est que souvent certaines n’ont même pas leur argent des tontines et aussi certaines de ces tontines finissent même en procès, parce que la responsable de l’association a dilapidé l’argent de la caisse.

Mais rien de tout cela ne les découragent ni ne les empêchent de continuer. Le pire, c’est qu’à cause de ces nombreuses cérémonies, les hommes ne peuvent plus passer le weekend en famille. Imaginez que l’on travaille toute la semaine, on a que deux jours sur sept pour rester en famille, profiter d’un peu de temps aux côtés de madame et des enfants. Mais au lieu de ça, elles ont toujours des programmes, notamment les tontines et les baptêmes les samedis, les mariages les dimanches. Il n’y a que cela qui compte pour elles. Ce phénomène doit vraiment être éradiqué”.

Pour Fanta, ménagère : “Les hommes doivent essayer de nous comprendre et nous aider dans nos cotisations. Après tout, cet argent de tontine finit dans leurs dépenses du foyer. Les évènements sociaux sont obligatoires pour tous les membres de la société. A Bamako, si tu n’es pas bien habillée ou habillée en uniforme lors des mariages ou baptêmes, ou si tu ne fais pas partie d’un groupe de tontine, il est difficile que tu sois considérée. On ne t’offre même pas à boire, à plus forte raison à manger. Aller à une cérémonie sans donner sa contribution, notamment son ” Bolomafara ” à l’hôte du jour, c’est se créer un ennemi. En plus, ça rend difficile la cohabitation. On n’a donc pas le choix, nous les femmes. C’est une pratique imposée dans la société, nous sommes obligées d’y adhérer”.

Selon Gaoussou, enseignant : “Les femmes prétendent toujours être pauvres, mais cela ne les empêche pas de dépenser tout leur argent sur le griot au prix du nom ” tokosongon”. Elles pensent que l’on ramasse l’argent. Chaque jour, elles sont dans des cérémonies. Mariage aujourd’hui, baptême demain, et chaque fois elles quémandent de l’argent à y flamber. Certaines préfèrent même claquer le prix de la nourriture de toute une famille, si c’est pour être appréciée. C’est vraiment écœurant”.

Comme on le voit, les cérémonies de mariage, de baptême… qui sont censées être des moments de partage, perdent de plus en plus leur sens et importance à cause de certaines pratiques mercantilistes comme les bolomafara (cadeaux) dvenus de plus en plus élevés en termes de valeur financière et les uniformes que les femmes s’imposent. On a préféré se limiter aux aspects superficiels de ce phénomène, non sans gratter la plaie que cela ouvre au niveau de la société, notamment avec des comportements répréhensibles de femmes prêtes à tout, y compris vendre leur dignité pour trouver l’argent nécessaire à la participation à une cérémonie familiale.

Par ailleurs, les dépenses excessives que l’on fait supporter aux hommes lors des mariages amènent beaucoup d’entre eux à s’endetter. Ce qui les poursuit dans leur foyer et en détruit l’atmosphère. Ce qui débouche parfois et très rapidement sur un divorce. Alors, sachons raison garder ! Mais comment faire pour briser ce cercle vicieux ? Voici la grande question qui appelle une réflexion collective pour un changement positif des comportements.

Djénéba Diarra (stagiaire)
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