La météo politique en cette période hivernale est relativement clémente.
La Cour Constitutionnelle qui voulait sombrer l’horizon s’est vite ressaisi. Les bateaux des vingt quatre candidats ont quitté le quai. Même s’il s’agit des véritables navires, les vicissitudes des flots du Djoliba sont telles fortes que certains n’arriveront pas à bon port. D’aucuns se sont arrêtés déjà et d’autres chavireront.
Mais en attendant les riverains sont condamnés à l’assistance et à l’écoute des cris de secours. Très futés tous les 24 combattants se sont munis des bouées de sauvetage. La Communauté internationale joue à la spectatrice. Quant aux partenaires présents sur notre sol, eux jouent aux seconds couteaux.
Evitant de servir d’agneau sacrificiel pour les groupes terroristes de Koufa ou d’Iyad, la plupart des candidats ont pris le soin de barrer de leur carte de campagne les localités du Centre et du Nord. Car aucune garantie, même celle de la MINUSMA n’est gage de sureté dans ces zones bouilleuses.
Ils ont bien raison, car il faut rendre grâce au bon Dieu, aucun cri n’est encore venu de ces zones, 15 jours après l’ouverture de la campagne. Pour qu’on nous parle encore de l’ouverture d’enquête nationale ou internationale (mais toujours sans lendemain) sur l’attaque dont ‘’tel candidat et sa délégation ont été la cible’’.
Le premier cri, pas celui lié à l’insécurité est venu de la navire de l’opposition, qui dénonce la fraude avant de faire la moitié du chemin. Elle parle d’un camouflage du fichier audité qui n’aurait pas servi à confectionner les cartes d’électeur biométriques. Pour une fois, on peut dire que ‘’Soumi Champion’’ et sa suite ont raté le coche.
On n’a pas besoin d’être un doctorant en stratégie électorale pour déduire que la période de campagne n’est aucunement le moment indiqué pour tenter de faire bloquer le processus sur fond de dénonciations de mauvais aloi. Surtout que le pouvoir, par son laxisme a laissé les manettes et les initiatives de toutes les réformes, concessions et toilettages des textes et outils électoraux à la guise de l’opposition. Elle a tout ou presque obtenu, parfois avec ses alliés de circonstance. Sa grande victoire dont tout le peuple a été témoin, concerne le fait d’exiger l’audit du fichier électoral sur la base duquel sera confectionné de nouvelles cartes d’électeur, au détriment de la carte NINA.
La seule chose qu’elle n’a pas obtenu et qui est dans tous les esprits reste la certification de l’élection par la Communauté Internationale. Même là, le pouvoir était partant sur le principe, histoire de montrer sa bonne foi. Mais c’est le Secrétaire Général de l’ONU même, lors de sa visite au Mali, qui a indiqué dans un langage clair que cela « n’est pas du ressort des Nations unies ».
A entendre les cris d’orfraie poussés par le directeur de campagne de Soumaïla Cissé devant la presse nationale et internationale on a l’impression que c’est tout le processus qui a été maculé. Or curieusement, au même moment son candidat était en train de battre campagne à KeMacina pour ensuite foncer sur Kénieba, tambour battant.
Sans entrer dans les détails des dénonciations du président du parti du ‘’Belier blanc’’ réduit en directeur de campagne, et des réponses techniques avec références données par le Délégué Général aux Elections, on peut admettre que la majorité des Maliens (plus de 50% de l’électorat) qui ont déjà retiré leur carte biométrique ne partageront pas de telle stratégie de victimisation et de va-t-en-guerre. Tout simplement par ce qu’elle est inefficace, voire absurde. Les esprits des Maliens sont tellement éclairés de nos jours avec une facilité d’accès digital aux données électorales que ni Boua encore moins ses probables ‘’aventuriers fraudeurs’’ ne pourront cacher sous le boubou la voix de 1 241 574 électeurs.
Le bateau de l’opposition a-t-il déjà pris l’eau en deux semaines de course ?
En politique, il y’a un temps pour tout. Le temps pour critiquer, celui pour dénoncer ( en ce domaine l’opposition malienne avait seule voix au chapitre durant 5ans) et celui pour conquérir le pouvoir. C’est donc maladroit de sa part d’estomper la flamme de la fièvre électorale par des réactions au quart de tour.
En tout cas, si Soumaïla Cissé veut rééditer ou dépasser son exploit de 2013, il a le devoir d’aller à la conquête d’abord des plus de 50% d’électeurs qui ont leur carte biométrique, pour ensuite s’assurer d’une victoire certaine, sinon la sirène des bateaux de Cheick Modibo Diarra et de Aliou Boubacar Diallo retenti fort derrière lui. Et en cas de tempête, on ne parlera plus de fraude mais de défaite. La énième en l’espace de trois élections présidentielles.