Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes pour le président-candidat IBK s’il n’y avait ces maudits sondages ! Les griots du « fou de Mali » le clamaient sur tous les toits au début de l’année : « un coup KO, le président serait réélu dès le premier tour ».
C’est ce qui s’appelle prendre ses désirs pour des réalités ! Car toutes les études indépendantes réalisées à l’occasion de la présidentielle malienne de 2018 indiquent qu’il y aura inévitablement un second tour. La dernière en date, celle du très sérieux institut français IPSOS explique, avec force détails, que le président Ibrahim Boubacar Keïta pâtit de la dynamique de son principal adversaire, Soumaïla Cissé, « le candidat de l’Espoir ». Le leader de l’URD fait jeu égal avec le candidat du RPM, au premier tour, les deux hommes étant crédités de 24 % des voix environ (24,7 pour le chef de l’Etat sortant, et 23,5 pour son opposant numéro un).
Plus encore que les chiffres bruts, c’est la tendance qu’ils suggèrent qui mérite d’être disséquée. IBK est en net recul, à la fois par rapport au début de l’année, lorsque ses partisans rêvaient à voix haute d’une victoire au premier tour, et, surtout, par rapport à son score de 2013 : il avait récolté 39,79 % des voix. Il accuse donc une chute de presque 40 % en cinq ans. Cet effondrement s’explique par plusieurs éléments. D’abord, le bilan du sortant, terriblement décevant, et son échec sécuritaire patent, puisque l’insécurité s’étend maintenant aussi au centre du pays. La corruption, ensuite, et l’inconséquence dans la gestion des deniers publics : ce ne sont pas les dernières révélations sur les nouveaux avions de chasse inutilisables faute d’appareils de visée nocturne qui feront penser le contraire aux Maliens.
Alors qu’IBK semble confronté à un phénomène d’usure accélérée du pouvoir, son adversaire « Soumi » est porté par une dynamique évidente. Il est nettement plus haut dans les sondages qu’en 2013, malgré la multiplicité des candidatures. Et surtout, il est parvenu à cristalliser le vote anti-IBK. C’est l’autre grand enseignement du sondage IPSOS : pour 61 % des sondés, Soumaïla Cissé est le candidat le plus à même de battre IBK. En cas de second tour, il l’emporterait avec 45 % des voix, contre 36 % pour IBK et 19 % d’indécis ou d’abstention.
Mieux encore : sur toute une série de marqueurs de « présidentialité », le candidat de l’URD devance le chef de l’Etat sortant. Il est jugé plus rassembleur, plus fidèle à ses engagements, plus innovant dans les solutions qu’il propose.
Une élection présidentielle n’est pas seulement une affaire d’arithmétique. C’est aussi, pour paraphraser le Général De Gaulle, « une rencontre entre un homme et un peuple ». Les remontées de terrain indiquent rigoureusement la même tendance : avantage Soumi ! Les meetings des deux candidats, tenus à moins d’une semaine d’intervalle au stade Abdoulaye Makoro Sissoko de Kayes parlent d’eux-mêmes. Il y avait foule à celui de Soumaïla Cissé, dimanche 22, beaucoup moins de monde pour IBK quelques jours avant…
Aujourd’hui, Soumaïla est donc le grandissime favori… à condition que le pouvoir ne succombe pas à la tentation de la fraude ! A cet égard, les éléments révélés par Tiébilé Dramé lors de sa conférence de presse du 20 juillet sur l’existence d’un fichier électoral parallèle ne peuvent que susciter l’inquiétude. Les tripatouillages pourraient concerner 1,2 million de votes. Les Maliens accepteront-ils de se laisser voler leurs élections ? Rien n’est moins sûr !