Les preuves sont accablantes pour le technicien français qui a tenté de faire chanter la fédération, avant d’écrire officiellement au président de la FEMAFOOT pour annoncer son engagement avec un club
L’ancien sélectionneur des Aigles, Patrice Carteron n’a donc raconté que des baratins. Après sa signature en faveur du Tout Puissant Mazembé de Lubumbashi (20 mai) alors qu’il était encore sous contrat avec la Fédération malienne de football (FEMAFOOT), le technicien français avait tenté de se justifier, affirmant sur les antennes d’une radio internationale, «que rien ne l’interdisait de s’engager avec un club et rester en même temps entraîneur des Aigles». «De toute façon, avait ajouté Patrice Carteron, j’ai déjà informé la Fédération malienne de football». Interrogé quelques jours plus tard par un journal de la place, Patrice Carteron rejettera la responsabilité de son départ sur la FEMAFOOT, accusant celle-ci de l’avoir limogé. «Je voulais continuer mon travail, mais la FEMAFOOT m’a envoyé», dira le technicien français. Hier, le 1er vice-président de la Fédération malienne de football chargé des Equipes nationales, Moussa Konaté a répondu à Patrice Carteron. Au cours d’un point de presse organisé au siège de la FEMAFOOT, celui que Carteron lui-même considérait comme son meilleur ami, est revenu sur le départ du technicien français et le moins que l’on puisse dire est que nos confrères ont été très surpris des révélations faites par Moussa Konaté. D’entrée de jeu, le 1er vice-président de la FEMAFOOT avouera sa peine d’évoquer le sujet lui qui, expliquera-t-il, s’est personnellement impliqué pour convaincre la fédération d’engager Patrice Carteron. «J’ai reçu une longue liste d’entraîneurs, mais c’est le projet de Carteron qui m’a séduit et j’ai pesé de tout mon poids pour qu’il soit l’entraîneur des Aigles», révélera Moussa Konaté. «Malheureuse-ment, il m’a déçu et j’avoue que je suis très gêné aujourd’hui», ajoutera le conférencier. Mais plus que le départ ou plutôt la trahison de Carteron, ce sont les propos tenus par ce dernier et la campagne de désinformation visant à faire croire qu’il a été limogé par notre pays qui choque Moussa Konaté. Le vice-président de la FEMAFOOT chargé des Equipes nationales révélera que tout a commencé le vendredi 17 mai, c’est-à-dire la veille du match du tour de cadrage de la coupe de la Confédération entre le Stade malien et Lydia Academic de Burundi. «Ce jour Patrice Carteron m’a appelé et nous avons fait près d’une heure de communication. Il a commencé par dire qu’il ne se sent pas considéré par la fédération, alors qu’il a des sollicitations par ci et par là. Je lui ai dit que tout le monde l’aime au Mali et que la fédération souhaite qu’il continue le travail entamé à la tête des Aigles. J’ai tout de suite compris que Carteron préparait quelque chose, mais je me suis employé à le convaincre de ne prendre aucune décision. Il a accepté et on se quittait, il m’a dit ceci : la nuit porte conseil». Le lendemain, c’est-à-dire le 18 mai, quelle ne sera la surprise du 1er vice-président de la FEMAFOOT de découvrir dans sa boite un courrier de Patrice Carteron. Dans cette lettre adressée au président de la FEMAFOOT, Hammadoun Kollado Cissé et à Moussa Konaté, le technicien français écrit : «Bonsoir Président. Comme Moussa vous l’a annoncé, après plusieurs semaines de réflexion, j’ai décidé de mettre fin à notre collaboration pour plusieurs raisons. Je n’ai aucune critique à l’endroit de qui que ce soit. Je préfère retenir simplement mon désir d’entraîner à nouveau une équipe au quotidien. J’annoncerai demain mon engagement envers un nouveau club et j’aurai besoin d’évoquer avec vous le calendrier des Aigles. Souhaitez-vous oui ou non que je m’occupe de l’Equipe nationale pour les deux matches à venir ou préférez-vous vous en occuper ?». Quelques jours auparavant, le même Carteron avait demandé une renégociation de son contrat et une révision à la hausse de son salaire et de ses primes. Concrètement, le technicien français exigera un salaire mensuel de 29 millions de F cfa, soit le triple de ce qu’il gagnait jusque-là (10 millions de F cfa), une prime de 50 et 100 millions, respectivement pour la qualification à la CAN 2015 et au Mondial 2014. S’y ajoutent 8 billets d’avion Bamako-Paris par an au lieu de 2. «Il (Carteron, ndlr) sait pertinemment que le Mali ne peut satisfaire une telle demande et même si on avait les moyens, on n’allait pas accepter un tel chantage», martèlera Moussa Konaté. C’est donc Patrice Carteron qui a décidé unilatéralement de rompre son contrat avec la fédération et plus grave, cinq jours après avoir adressé cette correspondance au président de la FEMAFOOT, le technicien français a eu le culot de rejoindre les Aigles à Nantes pour, dira-t-il, diriger le match de gala de l’Equipe nationale contre une sélection de la Bretagne. «Il s’est présenté dans le hall de l’hôtel des joueurs et dès son arrivée, j’ai été informé par un membre de la délégation. Ika tjé nana (ton type est venu en Bambara, ndlr) m’a dit ce dernier. Et quand j’ai demandé qui, mon interlocuteur m’a répondu Patrice Carteron. Quelques minutes plus tard, j’ai rencontré Carteron dans le hall. Il m’a dit qu’il est venu pour honorer ses engagements contractuels avec le Mali. Quand il m’a dit ça ma réponse a été très claire. Je lui ai simplement répondu qu’il n’est pas le bienvenu chez nous et qu’il n’a plus rien à demander à notre pays après s’être engagé avec un autre club. Voilà comment les choses se sont passées et si c’était à refaire, je n’hésiterai pas un seul instant à renvoyer Carteron». Le départ du technicien français ne risque-t-il pas de jouer sur le moral des joueurs ? «Je n’ai aucune inquiétude de ce côté, au contraire, je pense que cette situation va motiver l’équipe», répondra Moussa Konaté. Concernant la succession de Patrice Carteron, le vice-président de la FEMAFOOT chargé de la sélection nationale sénior estime qu’il est encore tôt de parler de ce sujet et qu’il faut plutôt concentrer les énergies sur les deux prochains matches des Aigles qui s’annoncent décisifs dans la course à la qualification au deuxième tour du Mondial. La fédération fait confiance à Vieux Diallo pour diriger les Aigles et leur permettre de gagner ces deux rencontres, dira Moussa Konaté. Après ces deux échéances, la FEMAFOOT examinera la question de la succession de Carteron, ajoutera le conférencier. Mais le départ du technicien français ne signifie pas la fin du feuilleton, loin s’en faut. Le 1er vice-président de la fédération a, en effet, confirmé le dépôt d’une plainte à la FIFA contre le désormais ancien sélectionneur des Aigles et l’instance dirigeante du football national est décidée d’aller jusqu’au bout de cette affaire. «Nous avons commis un avocat pour défendre les intérêts de la fédération. Le contrat est domicilié au Mali et le litige doit être tranché selon le droit malien. Mais l’affaire peut également arriver au niveau du Tribunal du travail», expliquera Moussa Konaté. Affaire à suivre donc…