Que dit la loi sur le vote des handicapés ? Selon l’article 92 de la loi électorale, «tout électeur atteint d’infirmité certaine le mettant dans l’impossibilité de faire son choix ou d’introduire son bulletin dans l’enveloppe ou de le glisser dans l’urne, peut se faire assister par un électeur de son choix». Cet article justifie la nécessité du vote des personnes en situation de handicap parce qu’il est admis que les handicapés physiques qui représentent aussi un électorat important dans notre société, doivent accomplir leur devoir citoyen.
A en croire des statistiques de 2009, le nombre d’handicapés physiques était estimé a environ 99.600 personnes. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), ce chiffre représente près de 15% de la population. Pour le cas précis des non-voyants couverts par l’Union des aveugles du Mali (UMAV), on dénombre 2000 handicapés visuels à Bamako et 1500 dans les zones rurales. Tout le monde s’accorde sur l’amélioration des conditions de vote de cette couche défavorisée. Même si les textes tentent de circonscrire les difficultés réelles que peuvent avoir les personnes handicapées, notamment celles atteintes d’handicap visuel, leur vote peut être détourné. En d’autres termes, ils sont contraints de croire à la seule bonne foi de leurs accompagnateurs de l’isoloir.
Hady Barry, troisième vice-président de l’Union malienne des aveugles opine sur la question. «Pour voter, je viens avec une personne à qui j’ai totalement confiance. Cette personne peut être mon enfant, mon épouse ou simplement un ami. Une fois dans le bureau de vote, mon accompagnateur remplit le formulaire et me conduit à l’isoloir. Il choisit mon candidat, j’appose mon empreinte dans la case le concernant et plie le bulletin à mettre dans l’urne».
Le vice-président de l’Union malienne des aveugles fait bon cœur contre mauvaise fortune, sinon il n’apprécie pas cette manière qu’il juge « dépendante et indiscrète ».
Notre interlocuteur propose même d’envisager le vote électronique ou la confection de bulletin avec les signes braille pour permettre aux handicapés visuels d’accorder plus d’importance aux élections et d’accroitre la mobilisation autour des joutes électorales. Pour ceux qui ont des difficultés de mobilité (certains types d’handicapés physiques), le non-voyant invite les autorités à rendre plus accessibles leurs bureaux de vote. Handicapé physique, Fadio Diawara se déplace à l’aide d’une moto tricycle. Il estime que les centres de vote ne sont pas adaptés aux handicapés. Si les handicapés physiques sont vraiment en droit de réclamer de meilleures conditions de vote, quid des sourds-muets ? Sur la question, Hady Barry a une position nettement tranchée. Il regrette la mise à l’écart des sourds-muets dans le processus de vote. A l’en croire, on aurait dû prendre en compte cette spécificité et faire accompagner les sourds-muets par des spécialistes de la méthode de démutisation (enseignement pour les sourds-muets).
Néanmoins, les solutions existent. A ce propos, le 3è vice-président des aveugles propose l’adaptation des urnes aux personnes handicapées physiques, la mise en œuvre de mécanismes susceptibles de faciliter le vote et l’accès aux programmes des candidats. «Les candidats ont peu de projets conçus spécifiquement pour les handicapés. Ils y pensent rarement», a-t-il déploré. Toutefois, le responsable de l’Union malienne des aveugles souligne qu’après 50 ans d’indépendance, il est inadmissible que les handicapés, qui représentent une couche importante de la population, aient des difficultés par rapport au vote.
Il a invité les autorités à y remédier. «J’en appelle aussi à la mobilisation des personnes en situation d’handicap pour le vote car c’est le seul moyen pour que le pouvoir politique nous accorde toute la considération requise dans ce domaine. Il ne faut pas rester en marge prétextant l’handicap», a-t-il conseillé. «Nous avons chacun notre part de responsabilité à assumer dans ce pays. J’en appelle donc au bon sens de tous les candidats afin qu’ils mettent l’intérêt du Mali au dessus des intérêts particuliers», a conclu le vice-président de l’Union des aveugles.
Mohamed D.
DIAWARA