Depuis trois semaines maintenant, le Mali vit à l’heure de la campagne pour l’élection présidentielle dont le 1er tour est prévu ce 29 juillet. Un second tour aura éventuellement lieu le 12 août prochain. Pour cette compétition électorale, 24 candidats (dont une femme) prétendent occuper le Palais de Koulouba, hissé sur la colline surplombant la ville de Bamako depuis 112 ans. C’est peut-être l’une des motivations de la “Lettre ouverte” d’un certain “Ansoumane dit Karamoko Cissé, homme politique” adressée en mai 2017 au président IBK, lui suggérant de baptiser le Palais de Koulouba au nom de l’Empereur Kaya Maghan Cissé. Celui-là fut le premier chef souverain de notre 1er Etat précolonial, l’Empire du Ghana, qui a existé entre les 4ème et 11ème siècles.
Plus de huit (8) siècles après, l’administration coloniale française a construit entre 1904 et 1908 le Palais de Koulouba. D’après le diplomate à la retraite Raphaël Théophile Kéïta, “depuis 1908, […] le Palais abrite son titulaire : le Gouverneur civil ou militaire à Koulouba, chef-lieu du Territoire du Soudan Français “. M. Kéïta cite le journaliste-écrivain et globe-trotter Félix Dubois (ayant plusieurs fois séjourné au Haut Sénégal-Niger devenu Soudan Français) qui notait déjà en 1911 dans son ouvrage “Notre beau Niger” (Flammarion): “Un plateau rocheux, abrupt et assez élevé, du nom de Koulouba où se dresse une ville haute formée de constructions gouvernementales uniquement. Selon la pensée antique, sur cette acropole est l’âme de la colonie […]”. Fort de cela, estime Raphael Kéïta, ” dès 1898, le Général De Trentinian désigna ce site. Le Gouverneur général [de l’AOF basé à Dakar] Ernest Roume l’approuva [puis] William Ponty et François J. Clauzel firent surgir une cité administrative pourvue de tous les progrès modernes” de l’époque.
Ainsi, l’imposante “Maison blanche” a été le siège du pouvoir depuis le temps colonial. Il a d’abord servi de bureaux et de résidences des hauts-fonctionnaires coloniaux dont 18 Gouverneurs titulaires et un Haut-commissaire. Ils y ont servi et résidé durant 52 ans (1908 à 1960). Ensuite, ce magnifique centre de décisions abrite l’institution présidentielle malienne depuis près de six décennies. De la proclamation de l’indépendance du Mali, le 22 septembre 1960, à nos jours, tous les six (6) présidents de la République ont, durant leur passage au sommet de l’Etat, laissé, sans exception, leurs marques sans détruire le style architectural original du Palais. Appelés souvent par des observateurs “locataires de Koulouba”, ces chefs d’Etat y ont tous réalisé des travaux de réaménagement ou de rénovation. Ils y ont été assistés dans leurs fonctions suprêmes par des ministres-secrétaires généraux chargés de la gestion de l’administration présidentielle. Tous nos chefs d’Etat ont pu surtout présider les sessions des conseils des ministres à Koulouba. Par contre, tous les six présidents du Mali n’ont pas, pour diverses raisons, logé en pleins temps et complètement au Palais de Koulouba. Lequel est actuellement la destination tant rêvée et très convoitée par nos 24 candidats en pleine campagne électorale depuis le 7 juillet.
A quelques jours de ce scrutin d’où sortira le futur “locataire de Koulouba”, le présent Dossier est une tentative de connaissance de l’un des éléments les plus emblématiques du riche patrimoine national malien, en voulant remonter le cours de l’histoire politico-architecturale du Palais de Koulouba : incarnation du cœur du pouvoir et symbole du sommet de l’Etat.