L’élection du président de la république se tient dans un contexte marqué par la crise sécuritaire au centre et au nord du Pays et une tension politique autour du fichier électoral.
Le Gouvernement du Mali, conformément aux dispositions constitutionnelles, entend organiser l’élection présidentielle dont le premier tour est prévu pour le 29 juillet 2018.
En janvier 2018, le Ministère de l’administration territoriale et de la décentralisation a mis en place un comité d'experts, chargé de la relecture de la Loi électorale.
Les conclusions des travaux de ce Comité ont abouti à la formulation de propositions de modifications de certaines dispositions de la loi électorale n°2016-048 du 17 octobre 2016.
Certaines modifications ont été adoptées par l’Assemblée nationale du 23 avril 2018, à savoir entre autres :
- - la suppression du vote par anticipation des membres des Forces armées et de sécurité par la modification de l’article 87 en supprimant son deuxième aliéna et par l’abrogation expresse de l’article 114 ;
- - la création des commissions de centralisation pour le référendum et leur recentrage aux niveaux cercle et district à l’intérieur du pays pour les scrutins ;
- - la fixation d’un délai de cinq (5) jours au ministre chargé de l’Administration territoriale pour la proclamation des résultats provisoires du référendum ;
- - le choix du nom de famille comme fondement de l’ordre alphabétique observé pour l’inscription sur les listes électorales ;
- - l’introduction de la carte d’électeur biométrique en remplacement de la carte NINA pour le vote des électeurs ;
- - la fixation d’un nombre minimum d’électeurs que doit comprendre un bureau de vote ;
- - la possibilité donnée à la Majorité et à l’Opposition de proposer des assesseurs ;
- - la mise en place d’un dispositif d’authentification des électeurs à l’entrée des bureaux de vote et de transmission des résultats du vote ;
- - le recentrage des niveaux de centralisation des résultats au cercle et au District ;
- - la création des CENI régionales
- - la signature du bulletin de vote par le président et les assesseurs de la majorité et de l’opposition ;
- - la limitation des procurations.
A l’issue de l’adoption d’une loi modificative par l’Assemblée nationale, un chronogramme des activités a été adopté par le gouvernement qui fixe le premier tour de l’élection présidentielle au 29 juillet 2018. La Cour constitutionnelle a reçu trente candidatures et a retenu vingt-quatre dont celle d’une femme.
La société civile, bien que n’ayant pas été associée aux travaux du comité d’experts, a pris des initiatives conformément à sa mission de contrôle citoyen. C’est dans ce cadre que le Pool d’Observation Citoyenne du Mali (POCIM) a été mis en place.
II_ PRESENTATION DU POCIM :
Le Pool d’Observation Citoyenne du Mali (POCIM) s’inspire d’expériences récentes, menées notamment au Sénégal, en Sierra Léone, au Mali, en Côte d’Ivoire et au Bénin. Il permet une coordination et une synergie d’intervention de la société civile, dans le cadre du processus électoral. Le POCIM est une plate-forme d’informations et de partage entre des organisations de la société civile travaillant sur les élections et constitue un observatoire permanent de suivi.
Le POCIM a déployé plus de 2.000 Observateurs, pour observer les élections Présidentielle et Législatives de 2018 au Mali.
Le POCIM a mis en place trois chambres dont les responsabilités et les rôles sont différents mais intégrés dans un dispositif d’alerte, d’analyse et de réponse au monitoring du processus électoral. Il s’agit de la Chambre de décisions (leaders de la société civile), de la Chambre intermédiaire (analystes politique, genre, handicap, électoral et juridique) et de la Chambre technique (la Fondation TUWINDI).
Grâce à cette plate-forme, la société civile malienne a un accès sans précédent aux données en temps réel sur les aspects importants du déroulement des opérations du vote, y compris l’ouverture des bureaux de vote, les opérations de vote, le taux de participation, l’heure de clôture, le dépouillement, les violences, les achats de conscience, les arrêts de votes, les intimidations, et, enfin, les opinions globales des observateurs dans les bureaux de vote.
Les messages envoyés par SMS à partir des observateurs électoraux formés à travers le pays sont déchiffrés, vérifiés et cartographiés en temps réel à l'aide de la technologie développée par la Fondation TUWINDI. Ce qui permet de faire des interventions immédiates, pour régler les dysfonctionnements en lien avec les Organes de Gestion et de Suivi des Élections. Les données sont également publiées sur la plateforme : www.ankawote.com. Cet outil a l’avantage de rehausser la crédibilité et la transparence du processus électoral au Mali.
III - LES CONSTATS ET LES DEFIS :
3.1. Les constats :
Les constats :
• la tension autour du fichier électoral ;
• la faible implication des organisations de la société civile dans le dialogue politique ;
• la problématique de l’accès équitable des candidats aux médias d’Etat pendant la période pré-électorale ;
• le déploiement tardif des préfets et sous-préfets dans leurs circonscriptions ;
• le dérapage dans l’utilisation des réseaux sociaux à des fins électoralistes ;
• violation du code de bonne conduite signé par les candidats;
• le non respect des règles d’affichage.
3.2. Les défis :
Parmi les défis à relever, il faut retenir :
- le déroulement du scrutin dans un climat pacifique ;
- la tenue du scrutin dans les régions du centre et du Nord ;
- l’exercice effectif du droit de vote par tous les électeurs ;
- la sécurisation du processus électoral ;
- l’intégrité du scrutin ;
- la participation ;
- l’acceptation des résultats par toutes les parties prenantes.
IV- LA REGULARITE ET L’INCLUSIVITE :
La Déclaration de Bamako adoptée le 3 novembre 2000, par l’ensemble des pays membres de la Francophonie dont le Mali, tout en se basant sur la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui a érigé en principe la consolidation de l’État de droit pour la tenue d’élections libres, fiables et transparentes, précise qu’il faut « s’attacher au renforcement des capacités nationales de l’ensemble des acteurs et des structures impliquées dans le processus électoral. » Il faut dire qu’un processus n’est crédible que si tous les acteurs et groupes cibles concernés le comprennent, et s’impliquent de façon active et responsable.
La Charte de l’Union africaine sur la démocratie, les élections et la gouvernance, adoptée en 2007, en son Article 17 « réitère l’engagement d’organiser des élections transparentes, libres et équitables, conformément aux Déclarations de l’OUA/UA sur les principes qui gouvernent les élections démocratiques en Afrique » et appelle les pays à prendre des mesures concrètes pour assumer leurs responsabilités. L’article 22 de la Charte engage les gouvernements à « créer un cadre favorable au contrôle d’élections indépendantes et impartiales ou des mécanismes d’observations de celle-ci. ».
Le Protocole A/SP1/12/01 de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance du 21 décembre 2001 dit, en son article 2.1., qu’aucune réforme substantielle de la loi électorale ne doit intervenir dans les six (6) mois précédant les élections, sans le consentement d’une large majorité des acteurs politiques.
Le Protocole A/SP1/12/01 de la CEDEAO dit aussi, en son article 3., que les organes chargés des élections doivent être indépendants et/ou neutres et avoir la confiance des acteurs et protagonistes de la vie politique. En cas de nécessité, une concertation nationale appropriée doit déterminer la nature et la forme desdits Organes.
V- LES RECOMMANDATIONS :
Le POCIM recommande :
Au Gouvernement :
1. la sécurisation de l’ensemble du processus électoral ;
2. la transparence du scrutin ;
3. le renforcement de la confiance entre les différentes parties prenantes du processus.
A la Cour constitutionnelle:
4. la veille sur le bon déroulement du scrutin.
Aux Partis politiques et aux Candidats :
5. le respect du code de bonne conduite par les partis politiques, les candidats;
6. le respect scrupuleux de l’Article 73 Nouveau, concernant l’arrêt de toutes formes d’achat de conscience et l’utilisation des biens ou moyens de l’État.
A la Haute Autorité de la Communication :
7. le monitoring des médias en période électorale, pour le respect de l’éthique, de la déontologie et de l’équilibre de l’information.
Aux Organisations de la société civile :
8. La sensibilisation des citoyens à l’exercice de leurs droits civiques et politiques.
Enfin, il s’agit, pour tous et chacun, de mettre le Mali au-dessus de tout.
Bamako, le 28 Juillet 2018
Le chef de mission du POCIM
Ibrahima SANGHO
CONTACTS UTILES DU POCIM
1. Mamadou Seydou Traoré dit Babou, Président du POCIM, 66 75 50 13,
2. Ibrahima Sangho, Chef de mission du POCIM, 76 23 36 00,
3. Tidiani Togola, Fondation Tuwindi, 76 32 41 61,
4. Hapsa Diallo, Fondation Tuwindi, 61 68 36 41.