A la demande du maire de la Commune VI, le gouverneur du district de Bamako a ordonné mercredi, la fermeture de la radio Renouveau FM « en vue de préserver l’ordre public et la tranquillité dans le district de Bamako ». Une décision qui viole allègrement le décret n° 2016-0626/P-RM du 25 août 2016 déterminant les conditions de mise en œuvre des sanctions non pénales prononcées par la Haute autorité de la communication (Hac).
Il était 13 heures 31 minutes quand Abdoul Karim Traoré, huissier de justice s’est présenté à la radio Renouveau FM, ce jeudi 2 août 2018, avec une décision du gouverneur du district de Bamako ordonnant la fermeture de la station. Accompagné des policiers lourdement armés, il a scellé la radio.
Le gouverneur du district, le colonel Débérékoua Soara, justifie sa décision par un souci de « préserver l’ordre public et la tranquillité dans le district de Bamako ». Il reproche à Renouveau FM d’avoir diffusé « des propos d’incitation à la révolte et à la haine tenus par le chroniqueur Youssouf Mohamed Bathily dit Ras Bath dans la nuit du 31 juillet au 1er août ». Aucun extrait de l’émission incriminée du chroniqueur n’est joint à la décision remise à la direction de la radio.
Violation de la loi
Créée par l’Ordonnance n° 2014-006/P-RM du 21 janvier 2014, la Hac assume la mission de régulation qui s’étend à tous les secteurs de la communication, notamment celle audiovisuelle. La loi accorde également à l’organe de régulation, le pouvoir de prononcer des sanctions non pénales à l’encontre des radios et des télévisions privées coupables d’un manquement aux obligations définies par les textes en vigueur. Le décret n° 2016-0626/P-RM du 25 août 2016 détermine les conditions de mise en œuvre des sanctions.
Le décret prévoit la saisine de la Hac par toute institution de la République, toute autorité administrative, toute association, toute personne physique ou morale pour signaler les manquements constatés chez un service audiovisuel en République du Mali.
« Elle est saisie par simple correspondance comportant : les renseignements complets du requérant ; les références de l’autorisation d’établissement du requérant ; le service ou le programme incriminé ; les dates et heures de diffusion du programme incriminé ; les récriminations et les griefs précis soulevés contre ledit service ou ledit programme. La HAC peut, en outre, s’autosaisir de toutes questions relatives aux violations des lois, des règlements et de la convention. Les faits incriminés ne doivent pas dater de plus de trois mois », précise l’article 18 du décret. Ni le maire de la Commune VI ni le gouverneur du district n’a saisi la Hac, selon un membre de l’organe de régulation.
Dans son article 15, ce décret prévoit des sanctions non pénales que la Hac peut prononcer après des visites des locaux et des avertissements. Ces sanctions sont entre autres la suspension temporaire de tout ou une partie d’un ou de plusieurs programmes du service incriminé pour une durée maximum de trois mois, la suspension définitive d’un ou de plusieurs programmes du service incriminé ou la suspension temporaire du service incriminé pour une durée maximum de trois mois.
Eu égard à toutes ces dispositions, on est en droit de croire que la décision du gouverneur relève d’un abus de pouvoir contre un média qui n’est pas né de la dernière pluie.