Les résultats du second tour de la présidentielle 2018, qui a opposé, comme en 2013, IBK à Soumaïla Cissé, donnent le 1er vainqueur avec 67,17 % des voix contre le second, 32,83 %. Malgré les nombreuses insuffisances ayant marqué ces élections, l’on ne peut que plaider pour que la gouvernance du pays s’améliore afin de faire oublier le quinquennat passé.
Le second tour de l’élection présidentielle 2018 a vécu le 12 août dernier. Ce scrutin s’est tenu, de l’avis de tous les observateurs, dans des conditions nettement améliorées que le 1er tour. D’environ 800 bureaux privé du vote le 29 juillet (1er tour), l’on est passé à près de 500 bureaux de vote fermés. En plus, comparés au 1er tour, les cas de bourrages d’urnes semblent peu nombreux, de même que des achats de conscience. On en déduit que le second tour est un peu plus acceptable que le premier. Ce qui doit conduire à un sursaut patriotique à accepter, en dépit des nombreux couacs, les résultats pour remettre le pays sur les rails de la sortie de crise et du développement. Même si ces élections ont encore abîmé le tissu sociopolitique national, il est certain que IBK s’est déjà succédé à lui-même, avec les premiers signaux de reconnaissance extérieure… Il ne sert plus à grand ’chose d’aller dans des contestations de rue, qui pourraient d’ailleurs s’enliser, eu égard aux velléités de répression qu’elles pourraient susciter. Le pays a-t-il besoin aujourd’hui d’une déflagration sociopolitique ? Rien n’est moins sûr. L’on ne peut que plaider pour que les résultats définitifs, prérogatives exclusives de la Cour constitutionnelle soient plus motivés et objectifs du fait des recours éventuels. Cap donc sur l’avenir du Mali, encore meurtri par la crise sécuritaire et son lot d’affrontements interethniques dans le centre et ailleurs.
Il faut avouer que le plus grand défi, qui pointe à l’horizon, est la capacité de la future nouvelle équipe dirigeante d’améliorer la gouvernance du pays. Il y a un besoin chez les Maliens de voir leur pays géré de façon saine, sans aucun cas de scandales, de corruption, de népotisme et de favoritisme. C’est en cela qu’il faut comprendre la grande soif de changement exprimée à travers ce scrutin présidentiel.
En effet, le grand nombre, 24, de prétendants (au 1er tour) à la présidence est le symbole d’un désir ferme de mieux faire. Les 23 postulants qui affrontaient tous IBK sont l’expression d’un appel à changer la méthode de gestion des affaires publiques. Même si le candidat Soumaïla Cissé n’est pas parvenu à impulser ce changement, il est de notoriété qu’IBK est loin d’avoir combler les attentes de ses concitoyens. Nombreux sont ceux qui ont voulu qu’IBK rempile non par conviction, mais faute d’une meilleure offre, faute d’une meilleure assurance fédératrice des forces politico-sociales du pays. C’est ce qui transparait dans le refus de consigne de vote des candidats faiseurs de rois, Aliou Diallo et Dr Cheick Modibo Diarra. Ont-ils craint un éventuel remplacement d’IBK par Soumaïla ? Rien n’est moins sûr. En clair, ils aspirent à changer mais ont hésité à faire propulser le chef de file de l’opposition au palais de Koulouba pour relayer l’actuel locataire des lieux…
Cette phase de choix politique montre que le Mali est aujourd’hui très divisé. Le président IBK doit gouverner comme chef d’orchestre d’une transition politique qui ne dit pas son nom. Il devra rassembler les bords politiques éprouvés, se regardant en chiens de faïence, instaurer une charte de bonne gestion, châtier d’éventuels fossoyeurs des deniers et enclencher une nouvelle dynamique de résolution de la crise sécuritaire. Ce chantier passera par les prochaines élections législatives, qui risquent de ne pas être aisées pour le camp du président sortant. Même si IBK s’est fait réélire, sa coalition Ensemble pour le Mali (EPM) pourrait perdre des plumes en termes de représentativité parlementaire. Des pôles politiques comme l’ADP-Maliba d’Aliou Diallo, l’alliance YELEMA-RpDM autour du Dr Cheick Modibo Diarra pourraient progresser à l’Hémicycle. Sans compter le bloc URD-PARENA-CDR qui pourrait se durcir… Bref, l’on peut assister à une nouvelle recomposition de la classe politique, qui ne facilitera pas nécessairement l’action des gouvernants.
Par ailleurs, les Maliens seront plus exigeants et n’hésiteront pas à développer des réflexes de contestation et de défiance du pouvoir. Cette attitude sera plus prononcée si IBK venait à s’inscrire dans la chasse aux sorcières. Voudra-t-il régler des comptes aux ministres et alliés politiques qui l’ont lâché ? Cela aiguisera une certaine animosité à son encontre. Surtout que le pays devrait amorcer des réformes majeures nécessitant des concertations.
En même temps, il n’est pas exclu que dans le schéma du bis repetita, la gouvernance néglige son devoir de rendre compte, le président étant assuré qu’il n’a plus rien à perdre jusqu’en 2023. Dans ce cas, le chef de l’exécutif, le Premier ministre et/ou l’éventuel dauphin et certains leaders politiques enclencheront rapidement la bataille de positionnement et de succession. Toute chose accentuera les défis d’une meilleure gouvernance du pays. D’ores et déjà, le moins qu’on puisse dire est que le président IBK du quinquennat 2018-2023 n’a rien à voir avec celui qui sera renouvelé le 4 septembre prochain. A coup sûr, IBK II aura plus que du pain sur la planche.