La chicha est une pipe à eau. Il s’agit d’un petit réservoir sur lequel on met le tabac et le recouvre de papier d’aluminium troué. On place ensuite sur l’aluminium un charbon ardent qui consumera le tabac. La fumée passe ensuite dans l’eau, puis elle est aspirée par le fumeur au travers d’un tuyau souple.
A Bamako, l’utilisation de la chicha s’est vide popularisée chez les jeunes. Dans la rue, dans les «grins», dans les bars ou boîtes de nuit, des jeunes de 18 ans et plus (filles ou garçons) se sont familiarisés avec cette pipe à eau qui peut être dangereux pour la santé. En dépit du fait que la fumée de la chicha soit filtrée par l’eau, cela n’atténue aucunement ses méfaits car les substances restantes pénètrent le plus profondément dans le poumon à l’image de la cigarette ordinaire.
Mahamane Touré, 20 ans, est élève à l’ECICA. Il fait partie des jeunes accros à la chicha. «Quand on fume la chicha, on inhale beaucoup plus de fumée qu’en fumant une cigarette. La chicha comme la cigarette contient du tabac. La différence est qu’une séance de pipe à eau peut durer plusieurs heures. Si je commence à en prendre à partir de 22 heures, je peux continuer jusqu’à 3 heures du matin avec mes amis du grin. Je ne suis pas un spécialiste pour comparer la chicha à la cigarette, mais il est clair que l’effet filtre de l’eau est une illusion».
Le jeune Touré a l’habitude d’utiliser la pipe à deux têtes avec un autre copain. Devenu accro à la chose, il avoue avoir souvent des problèmes de respiration et manque de sommeil. Pis, il n’arrive plus à courir une longue distance ni faire normalement des exercices physiques. «J’avais commencé à fumer depuis 2011», dit-il, tout en regrettant son addiction à ce tabac à pipe. Aujourd’hui, le jeune Touré cherche à en finir avec la chicha. Il lance aussi un appel aux autres jeunes d’arrêter la chicha qui peut nuire à la santé.
Au quartier de Djicoroni Para, un soir, un groupe d’adolescents formait un cercle autour de la chicha. Tour à tour, chacun tirait la pipe, dégageant une très forte fumée dans le ciel. Amadou Kansaye, le chef de groupe, s’exprime : «je tire cette pipe depuis 4 ans.
J’avais commencé juste par curiosité pour sentir l’effet, après je l’ai aimé, c’est devenu un plaisir pour moi». Consommateur de la chicha, le jeune Amadou approvisionne aussi d’autres jeunes moyennant une somme d’argent. «Je propose 100 FCFA pour une consommation de quelques minutes. Comme les jeunes aiment ça, je gagne donc un peu d’argent», raconte-t-il
Notre interlocuteur nous apprend que les goûts de la chicha ne sont pas les mêmes. En effet, en dehors du tabac, la chicha peut aussi être utilisée avec des jus en poudre mélangés d’eau, cela dégage également une fumée donnant l’impression de la fumée du tabac.
Le Professeur Yacouba Toloba est chef du service de pneumo-phtisiologie, au CHU Point-G. Il confirme que la chicha est très dangereuse et peut nuire à la santé. En appui à ses propos, le Pr Toloba signale que selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), une séance de chicha (ou narguilé) d’une heure correspondrait à l’inhalation de la fumée de 100 à 200 cigarettes. Par ailleurs, il révèle que «la chicha a le même contenu que la cigarette, la qualité de goudron et de nicotine étant aussi élevée que de la fumée de cigarette».
En outre, le toubib explique que le contenu en monoxyde de carbone et en métaux lourds comme le chrome, le cobalt, le plomb et le nickel, est beaucoup plus important dans la chicha que celui trouvé dans la fumée de la cigarette où le tabac est brûlé à l’aide de charbon.
Pr. Toloba conclut en disant aux jeunes d’arrêter l’utilisation de la chicha. «Chicha est égale tabac. Or le tabac est nocif pour la santé respiratoire. Il peut provoquer le cancer de la gorge et du poumon, des bronchites chroniques et plusieurs autres maladies», explique-t-il.