Jusque-là, la crise postélectorale s’est déroulée sans drame majeur : « des marches contre la fraude » chaque samedi auxquelles sont venus s’ajouter les enlèvements de Paul Ismaël Boro, Moussa Kimbiri et Adama Diarra, tous trois des alliés de Soumaȉla Cissé. Sous la pression de l’opinion indignée par cette pratique d’un autre temps, ils ont fini par être relâchés. D’autres, s’étant trouvés dans une situation similaire avant eux, ont eu infiniment moins de chance.
Si l’appel à marcher sur le palais présidentiel de Koulouba, le vendredi 21 septembre prochain, lancé par celui qui s’est autoproclamé « président élu de la République » est suivi d’une mobilisation massive, un emballement violent pourrait s’en suivre.
Le projet du porte-flambeau de la plateforme « Ensemble restaurons l’espoir au Mali » est clair comme une eau de roche. Il vise à empêcher la cérémonie de prise de fonction du président proclamé par la Cour constitutionnelle et installé par la Cour suprême : IBK. Une cérémonie couplée avec la commémoration du 58e anniversaire de l’indépendance du Mali, le 22 septembre, pour favoriser la présence d’un nombre significatif de chefs d’Etat du continent et de hautes personnalités internationales, gage de la reconnaissance de l’élection d’IBK par l’Afrique et le reste du monde.
Au-delà, il ne s’agit ni plus ni moins que de contraindre « le président illégal et illégitime » à faire ses cartons et à quitter sa fonction magistrale au sommet de l’Etat.
Le régime se trouve dans une posture délicate. S’il use de la violence classique policière (tirs à balles réelles, gaz lacrymogènes, charges suivies d’arrestations brutales) et qu’il y ait mort d’homme ou que seulement le sang soit versé, les choses pourraient s’envenimer et prendre une tournure inattendue.
Ne l’oublions pas! L’insurrection populaire de mars 1991, qui a abouti à l’effondrement, dans un gigantesque bain de sang, d’une dictature de plus de 22ans, a commencé par une marche dérisoire initiée par trois jeunes diplômés de l’enseignement supérieur qui réclamaient des emplois.
Le phénomène, jusque-là inconnu au Mali, est allé grossissant avec l’afflux de mécontents toujours plus nombreux et déterminés. Tous ne réclamaient pas le pain. Certains voulaient la liberté. Lorsque la soldatesque de l’époque a ouvert le feu sur eux et fait des centaines de victimes, la FMI (Famille Moussa et Intimes) venait de signer son arrêt de mort.