L’équipe nationale de football des moins de 17 ans du Mali, double tenante du titre (2015, 2017) ne défendra pas son trophée en Tanzanie, en 2019. Elle a été contre toute attente éliminée le week-end dernier par la Guinée en demi-finales du tournoi qualificatif pour la phase finale de la CAN U17 disputée du 9 au 18 septembre à Dakar. Une grande désillusion pour le football malien. Afin de diagnostiquer les causes de cet échec, nous nous sommes entretenus avec Souleymane Bobo Tounkara, chef du Desk Sports du quotidien national, L’Essor. Lissez plutôt son analyse.
Aujourd’hui-Mali : Bonjour, la sélection nationale du Mali des moins de 17 ans a été éliminée le week-end dernier de la CAN. Un coup dur pour le football malien ?
SBT : C’est une très grosse déception. Surtout quand on est double tenant du titre. Je pense qu’avec ce statut le minium qu’on puisse demander c’est la qualification à la phase finale de CAN. Malheureusement l’équipe a échoué. Ce qui est encore décevant, c’est le fait que depuis plusieurs années le Mali est très régulier à ce niveau. Pratiquement on est présent à tous les grands rendez-vous, qu’il s’agisse de la Coupe d’Afrique ou la Coupe du monde. Au regard de toutes ces raisons, forcément les gens sont déçus. C’est un coup d’arrêt, en quelque sorte, à ce beau parcours qu’on a l’habitude de réaliser dans les catégories de jeunes.
Quels peuvent être les facteurs de cet échec, selon vous ?
Je pense que c’est dans un premier lieu le complexe de supériorité. Cette équipe a joué la CAN dans la tête, avant même de se rendre à Dakar. Les jeunes et leur encadrement ont dû penser que le ticket était déjà en poche et qu’il fallait déjà commencer à voir comment ils peuvent remporter la coupe. En d’autres termes, ils ont mis la charrue devant les bœufs. Cela est un premier facteur qui a pénalisé l’équipe. Nous avons aussi l’environnement autour de cette équipe. Les informations que j’ai reçues concernant la gestion de cette équipe m’ont vraiment déçu, notamment au niveau de la sélection. Il y a eu beaucoup de choses, beaucoup de non-dits, des choix très contestables de la part du sélectionneur national. Ce qui m’a encore frappé, ce sont les tests IRM (ndlr : Imagerie par Résonance Magnétique,) qui ont été effectués par certains joueurs à leurs propres frais. Je ne comprends pas comment à ce niveau ? Comment le staff technique et le Conor ont pu laisser passer de telles pratiques ? Je pense que tous ces facteurs ont pourri l’environnement autour de cette équipe et ce qui devait arriver est arrivé.
Le Conor qui tient les rênes de notre sport roi n’a-t-il pas sa part de responsabilité dans cet échec ?
Je pense que le Conor n’a pas été vigilant dans sa gestion car on n’aurait jamais dû demander aux enfants de payer eux-mêmes les tests IRM. Le Conor n’a pas à se mêler de la gestion technique de l’équipe, mais il doit gérer l’administration autour de l’équipe. Ce qui est très important. Malheureusement, on s’est aperçu que durant toute la période de présélection et de sélection, beaucoup de choses ne marchaient pas. Je me demande si le Conor était au courant de ces problèmes. Je n’ai pas vu ou entendu la réaction du Conor. C’est une attitude regrettable dans la mesure où quand on dirige une fédération, on doit être strict et rigoureux à tous les niveaux, surtout pour une équipe qui participe aux éliminatoires de la CAN en tant que double tenante du titre. A mon avis, même si le Conor arrive à faire correctement son boulot, cette élimination reste forcément comme une zone d’ombre dans son parcours.
Que pensez-vous du nouveau système éliminatoire de la CAN Cadets instauré cette année par la CAF et qui est fait sous forme de mini-championnat ?
Je pense que c’est un très bon système. Les matches à élimination directe ne laissent pas beaucoup de marge de manœuvre aux équipes. Mais quand on organise des éliminatoires sous forme de mini-championnat, je pense que chacun a ses chances. Le faux-pas peut être permis car on peut toujours se racheter or dans les matchs à élimination directe, l’erreur n’est pas permise. C’est une bonne chose au niveau de catégories jeunes. Je pense que la CAF a été bien inspirée d’instaurer ce système.
Quels conseils avez-vous à l’endroit des acteurs du football malien afin qu’ils puissent tirer des leçons de cet échec ?
Si j’ai des conseils à donner aux acteurs, je les donnerais aux instances sportives. C’est très important pour les sélections nationales, surtout les sélections de catégories jeunes. Là, nous sommes sur une très bonne lancée et pratiquement toute la sous-région nous envie. Donc il ne faut pas que cette flamme s’éteigne. Il faut mettre de la rigueur, d’abord dans le choix des sélectionneurs. Je ne dis pas que le sélectionneur des Aiglonnets, Sekou Seck, est forcément le seul responsable. C’est un technicien qui a fait ses preuves, mais quand l’équipe n’est pas bien entourée, quand l’environnement n’est pas propice, quand il n’y a toujours que gens qui essayent juste de profiter des campagnes africaines et mondiales, ça pollue forcément l’atmosphère et ça déconcentre les jeunes. Il faut donc faire énormément attention et qu’on sache désormais qu’on n’est pas arrivé au bout. Il ne faut pas qu’on dorme sur nos oreillers en se disant que chaque équipe se qualifie. Chaque campagne est un nouveau défi et à chaque campagne il faut mettre en place une nouvelle stratégie car tout le monde vient pour se qualifier. La hiérarchie au niveau jeune n’est jamais préétablie. Elle peut changer à tout moment. Donc on doit se remettre perpétuellement en cause. Je pense que cette élimination doit servir de leçon.