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OIF : Le choix porté sur Louise Mushikiwabo fait polémique
Publié le mardi 16 octobre 2018  |  Le Tjikan
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L’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) a désigné sa nouvelle secrétaire générale pour les quatre prochaines années au deuxième jour de la rencontre le vendredi 12 octobre à Erevan en Arménie. L’actuelle ministre des Affaires Etrangères du Rwanda, Louise Mushikiwabo a été choisie par consensus pour remplacer Michaëlle Jean à la tête de l’organisation. Mais ce choix fait polémique car le Rwanda a tourné dos à la langue française au profit de l’anglais comme langue officielle il y’a déjà quelques années.

« C'est un moment historique pour nous tous, Rwandais et africains, qui démontre une fois de plus, qu'il n'y a pas de défis insurmontables face à une Afrique unie et déterminée. Toutes mes félicitations à toi, Louise Mushikiwabo », a déclaré le président Paul Kagamé sur son compte Twitter quelques heures après la désignation de son ministre des Affaires Etrangère comme secrétaire générale de la Francophonie.

Cependant, le choix porté sur Louise Mushikiwabo fait polémique. Plusieurs personnes l’ont contesté car elles estiment que les pratiques dans son pays vont à l’encontre des principes de l’organisation.

« Ce qui vient de se passer est scandaleux, c’est comme nommer comme Pape, quelqu’un qui a persécuté l’église catholique. Ce qui est consternant parce qu’on a évincé Michaëlle Jean qui représentait le Québec, la province du Canada qui se bat pour la survie de la langue française en Amérique pour la remplacer par la numéro 2 d’un régime dictatorial qui a supprimé le français comme langue d’enseignement et d’administration, qui a rasé le Centre Culturel Français au Rwanda et qui serait responsable des groupes armés qui ont massacré plus de 6 millions de Congolais francophones», s’est indigné Gérard depuis Liège sur RFI au cours l’émission ‘‘appel sur l’actualité’‘. Il est persuadé qu’on ne peut pas demander à une personne issue d’un gouvernement ayant participé à la suppression de la langue française de faire sa promotion.

Pour Paul Kagamé, le président rwandais, son pays a toujours été membre de la francophonie depuis 1990 et en aucun moment, il ne s’est retiré de l’organisation bien qu’il ait rejoint le Commonwealth en 2009. Selon lui, il reste toujours membre de la francophonie.

Nicolas, un autre auditeur d’appel sur l’actualité, qui a appelé de Kigali, a regretté le fait qu’on ne parle pas de la personnalité et de la compétence de Louise mais plutôt du pays et de son président.

«Ce qu’on oublie de dire, c’est que cette femme a fait la campagne dans tous les pays africains et elle est arrivée à faire un consensus autour d’elle. Ce qui est très rare. Elle a mis en avant son projet, elle est allée le défendre auprès des chefs d’Etats des pays membres. C’est donc une très bonne chose d’avoir cette dame qui a du caractère qui veut apporter du plus à cette organisation» a-t-il indiqué. Avant de donner raison au président Français Emmanuel Macron qui a affirmé lors de son passage à la tribune du sommet qu’il ne va pas être un donneur de leçons.

Ce qu’il faut savoir, c’est que le programme de Louise Mushikiwabo consacre une grande place à la jeunesse. Elle souhaite que l’OIF crée des opportunités pour les jeunes à travers des formations professionnelles adaptées tout en les accompagnant dans des projets concrets vers l’emploi. Toute chose qui permettra de freiner le taux d’immigration des jeunes vers l’occident. Elle veut aussi donner une meilleure visibilité à l’OIF à travers une ONG internationale, consacrer l’OIF aux enjeux culturels pour qu’elle ne soit pas une organisation géopolitique.

La secrétaire générale sortante, Michaëlle Jean qui était candidate à sa propre succession n’a pas été soutenue ni par son pays, ni par l’Union Africaine encore moins par la France. Elle s’est défendue lors de son passage à la tribune en reprochant à la France d’avoir trop politisé l’OIF. Déçue par cette situation, elle a rappelé que le combat de la francophonie concerne la paix, la démocratie et les droits de l’Homme. Elle a enfoncé le clou en disant aux Chefs d’Etats que son bilan est aussi le leur car pour elle, c’est sous leur impulsion que la francophonie, au fil de ces quelques 50 ans, a renforcé ou élargi ses missions et s’est affirmée comme une francophonie politique et diplomatique.

« … De quel côté de l’histoire voulons-nous être ? Sommes-nous prêts à accepter que la démocratie, les droits et les libertés soient réduits à de simples mots que l’on vide de leur sens au nom de la "real politik", de petits arrangements entre Etats ou d’intérêts particuliers ? », a-t-elle dit.

La France à la reconquête d’une ancienne colonie ?

La France cherche-t-elle à reconquérir le Rwanda à travers cette désignation? Pour rappel, le climat est tendu entre ces deux pays depuis la période du génocide au Rwanda où la France est pointée du doigt par les autorités de ce pays. Mieux, il y’a eu du nouveau dans le dossier judiciaire de l’attentat contre le président Juvénal Habyarimana qui vient de connaître un non-lieu au lendemain de la désignation de Louise Mushikiwabo à la tête de la Francophonie. Le Parquet a demandé l’abandon des poursuites contre sept (7) proches du président Paul Kagamé qui avaient été mis en examen, estimant que l’enquête n’a pas permis de réunir des preuves suffisantes.

Ce non-lieu contribuera certainement au rapprochement entre la France et le Rwanda. Un rapprochement jugé illusoire par quatre anciens ministres français qui ont eu en charge la francophonie.

Il s’agit de Charles Josselin, Pierre-André Wiltzer, Hélène Conway-Mouret et André Vallini, qui ont signé une tribune dans le monde intitulée :«Louise Mushikiwabo n’a pas sa place à la tête de la francophonie ». Ces anciens ministres ont clairement dénoncé l’illusion faisant croire que le soutien d’Emmanuel Macron à Louise Mushikiwabo pourra infléchir la position de Kigali à l’égard de Paris.

Moussa Sékou Diaby
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