La guerre a eu des impacts négatifs pour les artistes qui, compte tenu de l’état d’urgence, n’arrivent plus à gagner leur pain quotidien. Des familles ou de simples unions continuent à broyer du noir. Et le plus souvent ce sont les relations les plus intimes qui en pâtissent.
Aux dires du chef de département Musique du conservatoire des arts/Métiers/multimédia Balla Fasséké Kouyaté, Souleymane Dembélé, présentement, les artistes n’arrivent plus à avoir de l’argent. Leur gain étant lié aux concerts, sumu et autres animations culturelles. L’état d’urgence qui a entrainé l’arrêt immédiat de toutes les manifestations, a mis un frein à tout ceci. Chose qui a entrainé du coup des conflits dans plusieurs foyers suite à l’incapacité du chef de famille à faire face aux dépenses et charges quotidiennes. « Nombreux sont les artistes qui viennent se plaindre devant moi tous les jours réclamant à cor et à cri la levée de l’état d’urgence » a déclaré M.Dembélé.
» Les artistes musiciens n’arrivent à vivre que grâce à leur prestation. Avec l’arrêt de tout ceci, c’est comme si on leur avait dit de fermer leur magasin » a-t-il ajouté. Pour qui le sait, outre les chanteurs, la musique nourrit beaucoup de personnes notamment ceux qui travaillent dans les studios de production musicale, les producteurs, les joueurs d’instruments de musique sans compter ceux qui louent les baffles pour les diverses manifestations. Les autorités en interdisant tous les spectacles, ont amputé le revenu de tous ces gens.
Etait-il nécessaire d’interdire la prestation des artistes étant donné qu’elle n’a pas de caractère politique. Et pourquoi ne pas interdire aussi les matchs de football s’interroge notre interlocuteur ?
Pour Bacary Diabaté, artiste griot, étudiant au CAAM, les impacts que la guerre a eu sur les artistes ne sont pas mesurables. Outre l’aspect financier, l’arrêt des spectacles a beaucoup joué sur le niveau de perfectionnement des artistes musiciens. A le croire, tant qu’on ne joue pas, on perd les doigtés, c’est-à-dire l’habitude. « Pour ce qui est du côté financier, nous n’arrivons plus à subvenir à nos besoins. Nous ne faisons plus de sumu lors des cérémonies de mariage encore moins de concert. Or nous ne sommes pas salariés. Comment avoir alors de l’argent » martèle le chanteur griot.
Malgré cet état de fait, les artistes, pour leur apport dans la reconstruction de l’Etat, louent la bravoure de nos soldats et appellent les uns et les autres à se pardonner mutuellement, continuent à produire des clips sur la paix. Cela à leurs propres frais. Selon Kamissa Diabaté, étudiante en musique au CAMM, membre du groupe « chorale du cinquantenaire », la réalisation de leur clip sur la paix leur a coûté au total 100.000 F CFA, voire plus. « Le groupe est composé de10 personnes dont un jeune homme, nous avons cotisé chacun12.500 F CFA pour payer le studio, faire le clip et payer les uniformes qu’on a portée pour réaliser le clip » a déclaré l’étudiante en musique.
Toutefois, selon Idrissa Traoré, professeur de musique au CAMM, l’état d’urgence a eu également un effet positif dans la mesure où elle a favorisé la création musicale chez les artistes musiciens qui sont de plus en plus inspirés à improviser des morceaux sur la paix, sur le sens de l’humanisme, le pardon du prochain, et d’autres thèmes. « Ce temps a permis aux artistes de jeter un regard rétrospectif sur le passé pour y puiser des thèmes susceptibles d’influer sur le comportement des citoyens » fait-il remarquer. Aucun genre musical n’a voulu rester en marge de cette fièvre patriotique qui s’est emparée des artistes. Que ce soit des chanteurs de zikire (les morceaux sur la paix de Racine Sall et de Souleymane Diarra alias Solo,…), les paroliers (Backi Diabaté,…), tous restent mobilisés pour cette cause nationale.