Le Mali, à l’instar de la communauté internationale, a célébré ce lundi 15 octobre la journée internationale de la femme rurale. Le thème, retenu cette année au niveau national, est : «Les Technologies de l’Information et de la Communication au service de l’autonomisation des femmes et des filles en milieu rural». Un thème qui ne colle pas à la réalité des femmes rurales au Mali.
Et pour cause, la quasi-totalité des femmes rurales au Mali ne savent ni lire, ni écrire. Pire, elles ne disposent pas des moyens d’accès aux nouvelles techniques de l’information à cause de l’extrême pauvreté dans laquelle elles vivent. Malgré tout, Mme le ministre de la promotion de la femme de la famille et de l’enfant a persisté sur ce thème qui ne se rapporte à rien de probant dans le quotidien tant difficile des femmes rurales maliennes.
Au Mali, seulement 12,5% des femmes sont alphabétisées, d’après la dernière étude de la Direction nationale de la statistique. Un chiffre qui en dit long sur la situation de la femme rurale qui reste de moins en moins reluisante, malgré cette journée célébrée en leur nom.
Mme le ministre de la promotion de la femme, dans son discours d’annonce de cette journée sur la chaine nationale ORTM, a loué les efforts des femmes rurales. Selon elle, ces femmes méritent cette journée en leur honneur. «Les femmes rurales, dans les pays en voie de développement comme le nôtre, sont les premières à se lever et les dernière à se coucher. En plus des travaux ménagers, elles participent aux travaux champêtres. Elles constituent un maillon important du développement rural », a-t-elle soutenu. Puis sans transition, Mme le Ministre a déploré que les femmes n’aient pas accès aux terres pour la production agricole, sans fournir de statistiques fiables de femmes qui sont confrontées à ce problème foncier en milieu rural. Pourtant, un Ministre doit être en mesure d’éclairer la lanterne de ses compatriotes et surtout livrer des chiffres fiables pour attirer l’attention des partenaires techniques et financiers.
Toujours sans transition, Mme le ministre s’est appesantie sur l’impact, qu’elle a qualifié de positif, des Nouvelles techniques de la communication dans la vie quotidienne des femmes rurales au Mali. C’est-à-dire dans la vie de celles dont pourtant une grande partie n’a pas accès au service minimum de base. «Les femmes rurales sont confrontées à la problématique de la gestion foncière. En effet, elles n’ont pas accès à des terres cultivables. Les TIC constituent de puissants catalyseurs de l’autonomisation économique, politique et sociale des femmes et l’égalité entre les sexes comme le stipule l’ODD5 : parvenir à l’égalité entre les sexes et autonomiser toutes les femmes et filles qui souligne dans son point 8 de renforcer l’utilisation des technologies clefs, en particulier l’informatique et les communications, pour l’autonomisation des femmes», voilà en substance l’affirmation de la Ministre de la promotion de femme, de l’enfant et de la famille, sur l’importance des Tics pour le femmes rurales au micro de l’ORTM.
Toujours dans son discours, la Ministre DIAKITE indique les raison du choix de son département pour ce thème : «Compte tenu du fait qu’au Mali, le problème d’accès aux connaissances et opportunités des outils informatiques, par les femmes rurales, est l’un des facteurs qui entravent leur émergence, le Ministère de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille, à travers sa Direction Nationale de la Promotion de la Femme (DNPF), propose le thème suivant : «La Technologie de l’Information et de la Communication au service de l’autonomisation des femmes et des filles en milieu rural» pour la commémoration de cette 23ème Edition de la Journée Internationale de la Femme Rurale», a-t-elle justifié.
Pour les observateurs, ce discours ne reflète en aucun cas la situation de femme rurale du Mali, car les femmes du Mali ont besoin d’être alphabétisées ; elles sont besoin de soins adéquats pour la santé de la mère et de l’enfant ; elles ont besoin d’un programme de réhabilitation de terre, pour avoir leur autonomie financière. Pourtant, du début à la fin de son discours, nous n’avons entendu une seule fois les nécessaires programmes d’alphabétisation destinés aux femmes rurales, pour que ces femmes aient accès aux Tics.
Pire, les femmes rurales ne disposent pas de dispositifs leur permettant d’avoir accès aux nouvelles technologies de l’information, notamment l’électricité ou les panneaux solaires, des ordinateurs ou des téléphones qui répondent aux normes des Tics . Nous nous attendions plutôt à un thème qui toutes les femmes rurales, qui prendra en compte les vrais problèmes de la femme rurale pour lesquels, au fil des années, aucune solution n’est envisagée.
Signalons que le thème choisi par l’ONU cette année « Infrastructures durables, accès aux services publics et protection sociale au service de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes et des filles des régions rurales » – place l’autonomisation des femmes rurales au cœur de la réalisation de la vision que portent les Objectifs de développement durable (ODD).
Rappelons que les femmes rurales représentent plus du quart de la population mondiale et 43% des femmes constituent la main-d’œuvre agricole dans les pays en développement. Et pourtant, de manière disproportionnée, elles sont affectées par la pauvreté, l’exclusion et les effets des changements environnementaux et climatiques. Pratiquement, chacun des indicateurs de genre et de développement pour lesquels des données sont disponibles montre que, globalement, les femmes rurales sont défavorisées par rapport aux hommes ruraux et aux femmes des zones urbaines. La célébration de cette journée permet non seulement de reconnaître le rôle et la contribution des femmes rurales dans la promotion du développement agricole et rural, mais aussi d’exposer le rôle clé joué par celles-ci dans la production, la sécurité et la souveraineté alimentaires et nutritionnelles. Ces femmes rurales représentent des actrices importantes dans la préservation de l’environnement. En raison de l’importance de leur participation dans le secteur rural, leurs efforts doivent être reconnus par toutes les communautés.