La mobilisation des deux principales forces de contestation, le Front pour la sauvegarde de la démocratie (FSD) et la Coalition des forces patriotiques a abouti à des résolutions invitant les Maliens à ne plus reconnaître le président élu, Ibrahim Boubacar Kéita. Des recommandations qui risquent de conduire à une crise profonde.
Deux coalitions, un même objectif : ne pas reconnaitre l’autorité du président de la République, Ibrahim Boubacar Keita. Le Front pour la sauvegarde de la démocratie et la Coalition des forces patriotiques ont échangé avec leurs membres sur la nouvelle démarche à entreprendre.
La situation actuelle du pays, la situation des caisses de l’Etat, le découpage territorial sans concertation avec les populations concernées ont été, entre autres, les questions abordées par les intervenants.
L’honorable Soumaïla Cissé a rendu un hommage aux victimes des terroristes. “Notre pays a encore connu, cette semaine et la semaine dernière, de nouvelles victimes d’actes terroristes, barbares et inhumains au Nord, au Centre et même tout près de nous au poste de contrôle de Koala non loin de Kolokani. En tout premier lieu, nous nous inclinons avec tristesse, émotion et recueillement devant la mémoire de toutes ces victimes des violences et des actes terroristes qui continuent de frapper durement notre nation”.
“Cette mobilisation est la preuve vivante de votre attachement indéfectible à la démocratie, à la liberté mais surtout la preuve de notre passion et de votre amour pour le Mali, notre Maliba. Pour ce Mali aucun sacrifice n’est et ne sera de trop. Aucune révolte ne sera de trop. L’injustice et l’impunité engendrent la colère. La colère d’un peuple est donc de droit quand son avenir est volé”, a-t-il poursuivi.
Les marches et les manifestations des Maliens de l’intérieur et de la diaspora de ces deux derniers mois contre les fraudes massives et dysfonctionnements de toutes sortes lors des dernières élections présidentielles attestent si besoin en était du rejet de ce régime par notre peuple, justifiera-t-il.
La dernière mission de bons offices dépêchée par le président Muhammadu Buhari, président de la conférence des chefs d’Etat de la Cédéao, l’atteste.
“Le dernier rapport de l’Union européenne que je vous invite à consulter en ligne ne dit pas autre chose, même si par précautions diplomatiques il n’utilise pas le mot fraude. Les manifestations de rejet du projet de découpage administratif du territoire sur l’ensemble du pays finissent par nous en convaincre. Le régime autocratique, clanique, anachronique et boulimique qui agonise lentement depuis deux mois, criminalise le pays et instrumentalise sa partition, ce régime est clairement en train d’échouer gravement dans son rôle, hérité de la fraude, de la corruption et de la prévarication, à sauver le Mali…”
“175 000 élèves admis au DEF ne sont toujours pas orientés“
“La seule vision de ce pouvoir, tantôt honteusement monarchique, surtout à l’étranger, tantôt terriblement oppressif et répressif à l’intérieur, sa seule vision est devenue très court-termiste. Des centaines d’écoles sont fermées, des milliers d’écoliers sont privés d’étude. 175 000 élèves admis au DEF ne sont toujours pas orientés au grand désespoir de leurs parents. Des centaines de centres de santé sont fermés : des milliers de Maliens sont privés de soins primaires. Le panier de la ménagère se vide dangereusement. Le prix du carburant continue de prendre l’ascenseur de manière incompréhensible. Nul miracle en vue, car rien ne va, rien ne va plus dans notre pays. La panique inonde Koulouba et noie désormais tout le pays”, a martelé Soumaïla Cissé.
Se prononçant sur le nouveau découpage administratif, Me Mountaga Tall dira que les villages, communes, arrondissements, cercles et régions constituent l’architecture administrative du Mali chapeautée par l’Etat central. “La régionalisation et la décentralisation sont certes des nécessités. Mais débuter le débat sur le découpage territorial par le niveau régional, c’est vouloir édifier un bâtiment de six étages en commençant par le 5e sans soubassement ni rez-de-chaussée. Fragile l’ouvrage s’écroulera. Impossible sauf avec des conséquences incalculables pour le Mali et notre cohésion sociale. Chacun le sait. Et pour tout compliquer des délais extrêmement courts, ne permettant ni organisation rationnelle ni débats de fond sont imposés. Mais pourquoi le gouvernement détruit notre tissu social déjà éprouvé ? Pourquoi une telle course contre la montre ?”, s’interrogera-t-il.
Il est du même avis que le président de l’URD qui pense que le projet de découpage administratif est une bombe à fragmentation qui risque d’exploser si rien n’est fait.
Comme recommandations, le Front pour la sauvegarde de la démocratie au Mali appelle à la désobéissance civile. Les deux propositions de Me Mohamed Aly Bathily ont été de cibler les domiciles des députés en les empêchant de franchir la porte de l’Assemblée voire de leur domicile à partir du 31 décembre 2018, ensuite les domiciles des ministres en activité afin de les empêcher également d’aller dans leurs bureaux.
Le CDR, à travers son porte-parole Ras Bath, a promis de mettre en application les recommandations de l’ancien ministre Mohamed Aly Bathily.
“Il ne faut pas attendre que tout soit écroulé avant de se mobiliser“
Même si la Coalition des forces patriotiques n’ont pas encore appelé à la désobéissance civile, elle partage l’avis que de ne pas attendre que tout soit écroulé avant de se mobiliser.
Aliou Badara Dembélé, président du mouvement politique Badeyaton, tête de proue de la coalition, n’a pas mâché ses mots. “Le peuple doit réclamer sa victoire. Il ne faut pas attendre que tout soit écroulé avant de se mobiliser. Nous sommes dans l’impasse totale. IBK n’est pas légitime pour gérer le pays. Si nous cautionnons cette manœuvre, il ne sera pas surpris de voir IBK proroger son mandat en 2023”, dira-t-il.
“La seule solution est une transition politique“
L’honorable Oumar Mariko a rappelé que les forces vives se sont déjà concertées avec les organisations syndicales pour appeler les Maliens à la fibre patriotique autour du Mali. “La tentative de révision électorale est une haute trahison. La seule solution pour les Maliens est une transition politique. Mais en attendant, nous allons former une délégation pour dire à IBK de quitter Koulouba. Il n’a pas honoré ses engagements de garantir la Constitution”, a-t-il ajouté.