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DDR accéléré: le quiproquo
Publié le jeudi 8 novembre 2018  |  Info Matin
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© Autre presse par DR
Lancement officiel du processus de Désarmement, Démobilisation, Réinsertion socio-économique
Ce 6 novembre 2018 a eu lieu à Gao, le lancement officiel du processus de Désarmement, Démobilisation, Réinsertion socio-économique, (DDR)
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Derrière le solide bouclier de l’Accord, de nombreux petits ‘’arrangements’’, jamais portés dans les communiqués officiels, se présentent de façon récurrente comme des pièges mortels pour un processus de paix et de réconciliation qui en a vu des vertes et des pas mûres. Une illustration est la mise en œuvre du DDR accéléré (du 5 au 30 novembre).

Parallèlement au ping-pong des accusations de mauvaise foi, la falsification au grand jour des termes de l’Accord par ceux-là mêmes qui sont censés suivre son respect, n’est pas sans désappointer. L’un des points du mandat de la Mission multidimensionnelle des Nations-Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) est, en effet ‘’le soutien, à la mise en œuvre de l’Accord de paix, en particulier ses dispositions politiques et de sécurité, par le Gouvernement, les groupes armés Plateforme et Coordination, ainsi que d’autres parties prenantes maliennes, et demande à la MINUSMA de redéfinir ses priorités’’.

La falsification de l’Accord

De ce fait, il est ahurissant de constater que la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali se caractérise par une exploitation abusive de ses termes, si ce n’est tout simplement une extrapolation et un usage opportuniste. La preuve est cette déclaration de Samba TALL, Directeur de la section Réforme du Secteur de la Sécurité – Désarmement, Démobilisation et Réinsertion (RSS-DDR) qui a entretenu la presse le jeudi 1er novembre dernier sur le DDR-Intégration accélérée : ‘’ces trois unités mixtes (Ndlr : du Mécanisme opérationnel de coordination), dans l’Accord de paix, sont chargées d’assurer la sécurité des sites de cantonnement. Ensuite, d’assurer la sécurité du processus de DDR et d’intégration.’’.

A en croire ce haut responsable de la MINUSMA dont les propos font autorité, le MOC aurait deux missions : assurer la sécurité des sites de cantonnement ; assurer la sécurité du processus de DDR et d’intégration.

Or, ce mandat n’apparaît nulle part dans l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali qui reste, jusqu’à preuve du contraire, l’unique document de référence. L’Accord stipule en son Annexe 2 : Défense et sécurité

Mise en place du Mécanisme opérationnel de coordination (MOC) et des patrouilles mixtes

‘’Le MOC travaillera en étroite collaboration avec les forces internationales en présence ;

– Le MOC est chargé de planifier et de conduire les patrouilles mixtes incluant des éléments des forces

Armées et de sécurité Maliennes et des éléments de la Coordination et de la Plateforme avec, si nécessaire et si possible, l’appui de la MINUSMA et des forces internationales en présence (modalités et calendrier de patrouille par zone à définir par le MOC).

La première patrouille mixte devra avoir lieu au plus tard le 60e jour suivant la signature de l’accord ;

– Le MOC est également chargé de planifier et coordonner toutes les actions et mouvements des combattants pour toute la durée du processus de cantonnement (…)’’.

Ici, il est plutôt question de PATROUILLES MIXTES et de PLANIFICATION ET DE COORDINATION DES ACTIONS ET DES MOUVEMENTS DES COMBATTANTS.

Ici, il ne s’agit pas de : ‘’assurer l’interprétation des dispositions pertinentes de l’Accord en cas de divergences entre les Parties’’ (Cf article 60 de l’Accord), parce qu’il n’y a eu d’objection d’aucune partie. Tout le monde semble se satisfaire d’une falsification flagrante d’une disposition contractuelle.

Les propos de M. TALL s’adossent-ils à un arrangement méconnu de l’opinion nationale ? Parce que si un accord prête à interprétation, son extensibilité à souhait n’en garantit pas la crédibilité.

En l’absence de visibilité et de lisibilité sur le mandat du MOC, dont les éléments devront constituer les premières unités ‘’des Forces armées et de sécurité reconstituées’’, l’on est en présence d’un flou artistique.

Autre écueil majeur sur la voie du processus enclenché, c’est la capacité singulière des Parties à prendre leur aise avec l’Accord censé être le fil d’Ariane du processus de paix et de réconciliation. Ce qui a été servi à satiété à l’opinion nationale et internationale, jusqu’ici, c’est une composition de 600 éléments par unité du MOC, à raison de 200 par Partie (Gouvernement, CMA, Plateforme).

Le compte arabe

Au moment de lancer le DDR accéléré, l’on découvre un service exotique à couper l’appétit. Voici, à cet effet, la révélation (puisqu’il semble régner une omerta de mauvais aloi) faite par M. TALL : ‘’les parties ont convenu que la CMA et la Plateforme, qui ont déjà chacune 200 combattants dans le MOC de Gao, qui auront 200 dans le MOC de Kidal et 200 dans le MOC de Tombouctou, soit 400 combattants venant de ces deux mouvements, plus 200 venant du gouvernement et les gens venant des mouvements dissidents. Cela nous fait un total de 1 600’’. Entre nous, qui comprend quelque chose à cette clé de répartition qui ressemble à plus d’un égard à un compte arabe ?

Il faut ajouter à ces errements, l’impasse sur les questions non résolues. Ainsi, le DDR accéléré est annoncé pour débuter le 5 novembre, le 3 novembre 2018, la Coordination des officiers des Mouvements de l’état-major du MOC de Gao saisit la Commission technique de sécurité (CTS) pour demander des réponses à certaines préoccupations : ‘’comme vous le saviez, il a été décidé de faire un D.D.R. accéléré à tous les bataillons du MOC Gao, Kidal, Tombouctou du 05 au 30 novembre 2018. En référence aux lettres de bataillons de Kidal, Gao et Tombouctou demandant des explications sur leur sort avant de déposer leurs armes, les officiers des mouvements CMA et Plateforme proposent d’avoir des réponses aux questions suivantes : la confirmation de leurs grades avant le processus de DDR ; le sort des combattants victimes de l’attentat du 18 janvier 2017 qui sont malades ou invalides ; les conditions d’intégration des officiers de l’état-major du MOC, de la CTS et Equipes Mixtes d’Observation et de Vérification (EMOVs); des déserteurs au sein du bataillon ; des décédés de l’attentat du 18 janvier 2017’’.

Après le folklore des séances interminables, il va falloir apporter des réponses précises hic et nunc. Pourtant, l’ensemble des acteurs savait que rien ne serait ‘’accéléré’’ sans une définition claire des statuts des combattants à intégrer. Le Pacte pour la paix au Mali devrait regretter son existence…

Par Bertin DAKOUO

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