Paris - Des proches des journalistes de RFI assassinés au Mali en 2013 ont demandé que les juges en charge de l’enquête française entendent comme témoin l’ancien président de la République François Hollande, et ont annoncé qu’ils solliciteraient également l’audition de l’ancien patron de la DGSE, a-t-on appris jeudi par l’une de leurs avocats.
Ghislaine Dupont, 57 ans, et Claude Verlon, 55 ans, avaient été enlevés le 2 novembre 2013 au cours d’un reportage puis tués près de Kidal, quelques mois après l’opération française Serval qui avait mis en déroute les jihadistes contrôlant le nord du Mali.
Cinq ans après, des zones d’ombres demeurent sur les motivations et le scenario exact du rapt.
"Nos doutes sont toujours là et ils vont en augmentant. Les déclassifications de documents n’ont pas permis de clarifier un certain nombre de choses, ni sur les circonstances, ni sur le pourquoi", a expliqué à l’AFP, Pierre-Yves Schneider, porte-parole de l’association des amis de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, qui a récemment été admise comme partie civile au dossier.
François Hollande s’est exprimé sur cette affaire à au moins trois reprises devant des journalistes. Des propos qui ont intrigué l’association et leur avocate Marie Dosé. Ils ont adressé le 6 novembre une demande d’audition de l’ancien président au juge antiterroriste en charge de l’enquête qui les
recevait jeudi pour faire le point sur les investigations en présence de la famille des journalistes.
Le 7 décembre 2013, M. Hollande avait fait notamment cette confidence à un journaliste de RFI: "on a entendu une conversation dans laquelle ce qui ressemblait à un commanditaire reprochait à un membre du commando d’avoir détruit la marchandise".
Interrogés récemment par des journalistes de RFI au sujet de cette mystérieuse écoute, l’ancien patron de la DGSE Bernard Bajolet en a confirmé l’existence et le contenu. Plusieurs proches des reporters assassinés vont également demander son audition.
La semaine dernière, d’autres propos de François Hollande dans une interview à RFI ont également interpellé. A un journaliste qui lui demandait de certifier que ni l’armée, ni les services, ni la DGSE n’avaient commis d’erreur, l’ex-président avait répondu : "Toutes les informations qui m’ont été données (...) me convainquent que l’armée française a fait tout ce qu’elle pouvait faire".
Or pour l’association, il y a matière à s’interroger : des informations ont-elles été cachées au président et que savaient les services de renseignement tels que la DGSE?
Pour, l’avocate, l’ancien président doit désormais réserver ses déclarations au juge d’instruction: "Il en a trop dit ou pas assez. Il est temps que François Hollande ait un interlocuteur judiciaire", a affirmé Me
Dosé.
A ce jour, les investigations ont permis d’identifier six suspects principaux, quatre membres du commando et deux possibles commanditaires, dont Abdelkrim le Touareg, un émir lié à Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), tué dans une opération des forces françaises.