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Journalistes de RFI tués au Mali en 2013: cinq ans après, un scénario incomplet et des incertitudes
Publié le samedi 10 novembre 2018  |  AFP
Ghislaine
© Autre presse par DR
Ghislaine Dupont et Claude Verlon, les deux envoyés spéciaux de RFI tués près de Kidal
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Paris, 9 nov 2018 (AFP) - Cinq ans après l’assassinat de deux journalistes
de RFI au Mali, Ghislaine Dupont et Claude Verlon, l’enquête a permis
d’identifier les possibles commanditaires sans pouvoir dissiper le flou qui
entoure encore le scénario précis du rapt, au grand dam des proches.
Ghislaine Dupont, 57 ans, et Claude Verlon, 55 ans, avaient été enlevés le
2 novembre 2013 au cours d’un reportage puis abattus près de Kidal, quelques
mois après l’opération française Serval qui avait mis en déroute les
jihadistes contrôlant le nord du Mali.

Leurs corps avaient été découverts à proximité d’un pick-up abandonné. Le
double meurtre avait été revendiqué par Aqmi (Al-Qaida au Maghreb islamique).
Les investigations menées côté français en parallèle de l’enquête malienne
ont permis de cibler six principaux suspects: quatre membres du commando et
surtout deux possibles commanditaires, deux chefs de katibas (groupe de
combattants). Le premier, Abdelkrim le Touareg, un émir lié à Aqmi, a depuis
été tué dans une opération des forces françaises. Le second est Sedane Ag
Hita.

Très vite, les enquêteurs avaient privilégié la piste d’un enlèvement raté,
à cause d’une panne d’automobile, pour expliquer le meurtre des journalistes.
Une thèse qui, cinq ans après, suscite toujours des doutes chez les proches
des reporters.
"Les déclassifications de documents n’ont pas permis de clarifier un
certain nombre de choses, ni sur les circonstances, ni sur le pourquoi", a
expliqué à l’AFP Pierre-Yves Schneider, porte-parole de l’association des amis
de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, reçue jeudi par les juges.
Surtout, de récents éléments de l’enquête dont a eu connaissance l’AFP
viennent ajouter des zones d’ombre au dossier. Dans un témoignage troublant
recueilli le 4 octobre par les juges, un journaliste d’investigation malien a
raconté qu’une source lui avait récemment confié que "quelqu’un dans le
commando était en relation avec un officiel malien", information que lui a
ensuite confirmée un ancien officier français.
Ce dernier lui a révélé l’existence d’une interception américaine d’une
conversation entre le jihadiste Baye ag-Bakako, membre du commando, ancien
trafiquant localisé entre le Mali et l’Algérie, et Soumeylou Boubèye Maïga,
ancien ministre de la Défense malien et actuel Premier ministre.
L’officiel malien a déjà a eu affaire à la justice française par le passé:
il avait été placé en garde à vue dans l’enquête sur les activités de l’homme
d’affaires corse et ponte du jeu en Afrique, Michel Tomi. Les jihadistes
ont-ils bénéficié d’une certaine complaisance? L’enquête devra vérifier cette
hypothèse.
Les juges antiterroristes, qui s’étaient rendus en février à Bamako pour
rencontrer leurs homologues maliens, ont fait part jeudi de leurs espoirs
quant à l’obtention de nouvelles données téléphoniques maliennes qui
permettraient de retracer le parcours du commando, a expliqué Me Marie Dosé,
avocate de l’association.
- lien avec Arlit? -

A l’issue de la réunion de jeudi, l’avocate a toutefois évoqué des "points
de désaccords" entre l’association et les juges. Parmi eux, la question de
savoir si Ghislaine Dupont travaillait sur la crise des otages d’Arlit, ce
dont doutent les enquêteurs.
L’hypothèse d’un lien éventuel entre l’enlèvement des journalistes et la
libération quelques jours plus tôt des otages d’Arlit au Niger avait notamment
été décrite dans un reportage diffusé sur France2.
Une journaliste de RFI entendue par les juges a par ailleurs rapporté d’une
source touareg, que l’un des jihadistes, Sedane Ag Hita, aurait commandité
l’enlèvement des journalistes "pour avoir une nouvelle monnaie d’échange",
faute d’avoir pu obtenir la libération de ses deux neveux à l’occasion des
tractations pour les otages français d’Arlit.
Les parties civiles entendent aussi maintenir la pression sur la question
de la levée du secret-défense.
Ils ont demandé l’audition de l’ancien président François Hollande, au vu
de certains propos tenus devant des journalistes au sujet de cette affaire.
Notamment lorsque le président a évoqué le 7 décembre 2013 auprès d’un
journaliste de RFI une écoute dans laquelle, selon M. Hollande, "un
commanditaire reprochait à un membre du commando d’avoir détruit +la
marchandise+".
Interrogé récemment par des journalistes de RFI au sujet de cette
mystérieuse écoute, l’ancien patron de la DGSE Bernard Bajolet en a confirmé
"l’existence et le contenu", selon l’association, qui va demander son audition
par les juges.
nal/blb/or

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