Face à la presse lundi dernier, les leaders du Front pour la sauvegarde de la démocratie (FSD) expliquent leurs inquiétudes sur le projet de découpage administratif et appellent les forces vives à boycotter les concertations régionales. “En créant de nouveaux cercles sur des critères tribaux, ce projet engage un processus de tribalisation administrative du territoire aux conséquences imprévisibles pour la cohésion nationale, pour la paix et la réconciliation des Maliens”, jugent-ils.
Le Front pour la sauvegarde de la démocratie ne désarme pas. Cette coalition politique dirigée par l’honorable Soumaïla Cissé a livré lundi ses observations sur le nouveau projet de découpage administratif. Selon le FSD, la situation de notre pays est caractérisée en ce mois de novembre par la contestation des résultats de l’élection présidentielle tels que proclamés par la Cour constitutionnelle et le refus de la fraude électorale comme mode d’accession ou de conservation du pouvoir, la dégradation continue de la situation sécuritaire, la montée sans précédent du mécontentement social par la multiplication des grèves, les tensions de trésorerie qui sont aujourd’hui de notoriété publique, l’ébullition politique provoquée par le projet de redécoupage administratif et les retards dans l’application de l’accord pour la paix et la réconciliation qui ont suscité l’impatience et l’exaspération de la communauté internationale ouvertement exprimées à travers la résolution 2423 du Conseil de sécurité et la signature d’un “Pacte pour la paix”.
Soumaïla Cissé rappelle qu’il y a un mois, prenant la mesure de la crise postélectorale au Mali, le président en exercice de la Cédéao, Muhammadu Buhari, a dépêché une mission à Bamako. “L’émissaire de la Cédéao a, lui aussi, souligné les graves insuffisances qui ont marqué la dernière élection présidentielle, et a émis, entre autres, les conclusions suivantes”, dit-il.
“… Prenant acte de la prolongation de la législature actuelle selon l’avis de la Cour constitutionnelle et au regard des dysfonctionnements largement reconnus et évoqués par tous les interlocuteurs lors du scrutin présidentiel passé, il est impératif que le gouvernement et tous les acteurs sociopolitiques conviennent, de manière consensuelle, d’entreprendre des réformes courageuses des cadres légaux, y compris la Constitution de février 1992, et du système électoral avant de s’engager dans les prochaines échéances électorales que compte mener le pays a souligné la mission”, ajoute Soumaïla Cissé.
Au lieu de préparer un dialogue politique de haut niveau devant aboutir à un accord politique global, le régime IBK, à travers son ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, a en toute opacité et de manière unilatérale, élaboré un projet de redécoupage territorial, dénonce-t-il.
“En créant de nouveaux cercles sur des critères tribaux, ce projet engage un processus de tribalisation administrative du territoire aux conséquences imprévisibles pour la cohésion nationale, pour la paix et la réconciliation des Maliens. Devant les protestations et condamnations du projet émises par les forces vives du Mali d’Est en Ouest, du Nord au Sud, comme à son habitude, le régime d’Ibrahim Boubacar Kéita s’engage dans une nouvelle fuite en avant par la convocation sans concertation d’assises régionales sur le pré-découpage territorial. Ces concertations régionales risquent de donner lieu à la multiplication des surenchères tribales, ethniques et régionales dont la finalité sera l’affaiblissement continu du Mali…”
Pour le FSD, le projet unilatéral de redécoupage et les concertations régionales, mal préparées et annoncées sans concertation, contiennent les germes de la division et de la guerre civile entre les communautés du Mali. “Nous estimons que cette démarche, loin de servir les intérêts du peuple malien, est contraire à l’idéal de dialogue républicain dans notre pays et aux conclusions pertinentes de la mission de la Cédéao.
Une question aussi importante que le découpage territorial ne doit être, en aucune façon, abordée avec amateurisme et précipitation, étant entendu que la légèreté blâmable avec laquelle il a été conçu a suscité déjà sur toute l’étendue du territoire des manifestations de rejet, sources de divisons susceptibles de compromettre dangereusement le très fragile processus de paix et de réconciliation nationale, comme à Bla. Toutes les réformes liées au processus électoral, aux circonscriptions administratives, aux collectivités territoriales et à l’architecture institutionnelle générale de notre pays doivent être conçues ensemble et de manière inclusive”, défend le FSD.
Au-delà de tout, notre pays doit à présent entamer une dynamique nouvelle, par un dialogue inter-malien fécond visant à forger un consensus national entre tous les fils de ce pays à travers leurs représentants dûment mandatés et non choisis par l’administration autour des réformes, de la restauration de la paix et de la stabilité sur l’ensemble du territoire, prône le front.
La légitimité du président s’invite dans le débat
Seul un Etat dirigé par un président légitime et reconnu par tous les Maliens peut prendre en charge les questions brûlantes auxquelles la nation est confrontée et les gérer conformément à l’intérêt général, précise Soumaïla Cissé. “Le FSD lance un appel au boycott des concertations régionales par toutes les forces vives du pays. Il invite les partis politiques, les organisations populaires, les syndicats et les associations représentatives des communautés, les chefs coutumiers et religieux à se concerter pour opposer une résistance résolue aux projets irresponsables de déstabilisation du Mali.
Nous mettons en garde le régime d’IBK contre son entreprise de déstabilisation du Mali que ses initiatives irresponsables et improvisées ne manqueront pas de provoquer. Le gouvernement est le seul et entièrement responsable de toutes les conséquences de cette initiative dangereuse et attentatoire à l’unité et à la cohésion nationale. Le FSD n’est pas opposé à une réorganisation territoriale pour un pays aussi vaste et sous-administré comme le Mali. Mais un tel processus ne peut être conduit dans l’impréparation, l’opacité et la ruse favorisant telle ou telle tribu ou communauté. Il doit être un processus ouvert, participatif, mûrement réfléchi et conduit par un pouvoir légitime…