De nos jours, nous assistons de plus en plus à l’émergence d’une nouvelle frange d’artistes conscients du poids de leur apport et de la nécessité d’agir, et qui s’incrustent progressivement dans le débat environnemental. Grâce à leurs œuvres, ils incitent à cette prise de conscience en s’emparant de grands enjeux sociétaux et environnementaux pour sensibiliser
Le contexte actuel pousse de plus en plus à considérer le monde comme un tout unique. Certes le but de l’humain a toujours été de se différencier de l’autre, allant jusqu’à ériger des frontières, mais la nature elle ne répond à aucune considération anthropique. Du point de vue environnementale, nous appartenons tous (humains comme animaux, plantes) à un écosystème planétaire dont il convient de prendre grandement soin. Les actions, menées à un bout du monde, auront des répercutions positives ou négatives jusqu’à l’autre bout. Il est donc nécessaire que l’information et la sensibilisation soient toutes aussi globales pour atteindre le maximum de personnes afin de conjuguer les efforts pour un plus grand effet. L’objectif dans la lutte pour la préservation de l’environnement consiste d’abord à combattre le schème de pensée qui méjuge l’impact de notre mode de vie sur celui-ci.
La culture est l’âme d’un peuple et l’art un vecteur d’expression de la culture à travers les œuvres. L’art visuel est une projection imagée de l’environnement. Il s’appuie toujours sur la nature qu’il décrit ou façonne dans le sens d’en tirer des renseignements et aussi d’informer sur son état. La nature procure à l’artiste sa matière première. Ainsi il est sensé de noter que l’art comme l’artiste évoluent tous et toujours avec l’environnement.
Au Mali, la problématique liée à la préservation de l’environnement réside au niveau informationnel. Parce que nous ne savons pas que nous agissons encore timidement. Or si agir engage un coût, ne pas agir comporte aussi un coût. L’accentuation de la pauvreté, la famine, l’insécurité alimentaire sont des coûts indirects de notre carence d’action envers la protection de l’environnement. S’engager dans le développement durable passe par trois étapes cruciales à savoir : le cognitif, l’affectif et le comportemental. En clair, toute bonne action découle d’une prise de conscience qui émane d’une bonne information. De nos jours, nous assistons de plus en plus à l’émergence d’une nouvelle frange d’artistes conscients du poids de leur apport et de la nécessité d’agir, et qui s’incrustent progressivement dans le débat environnemental. Grâce à leurs œuvres, ils incitent vers cette prise de conscience en s’emparant de grands enjeux sociétaux et environnementaux pour sensibiliser.
C’est le cas de Thierno Diallo, peintre sculpteur, médaillé du mérite de l’Ordre des arts du Mali qui a bien voulu parler de ce lien entre l’art et la protection de l’environnement. «Dans une société comme le Mali, nous utilisons beaucoup les sachets plastiques pour transporter nos produits de tout genre. Après nous les jetons et ils deviennent des déchets qui se retrouvent dans notre environnement. Cela pose une vraie problématique pour tout le monde», explique-t-il.
«Maintenant comment un artiste comme moi joue sa partition dans la lutte pour la préservation de l’environnement ? Aujourd’hui un environnement où pullulent les déchets plastiques est aussi et malheureusement un cadre pour l’artiste que je suis. Ce n’est pas tant l’impact ou le poids de la récupération et du recyclage que nous mettons en exergue, parce qu’il existe au moins une usine pour le recyclage d’envergure à Bamako, mais c’est surtout l’aspect informationnel que nous visons. Parce que nous faisons une peinture ou une sculpture pour notamment décrire la problématique environnementale et ses causes, tel que nous les ressentons. Parfois, certains ne se rendent effectivement compte du malheur que lorsqu’ils sont frappés ou heurtés dans leurs sensibilités. Comme l’art permet de plonger le public dans la pensée de l’artiste, et ce grâce à la subtilité de l’œuvre, celui-ci lui permet de faire une prospective et de vivre les conséquences dans l’imaginaire et même à y donner un sens», développe l’artiste.
Thierno Diallo s’intéresse au développement durable parce que tout simplement aujourd’hui la tendance est telle que tout est durable. «Nous parlons d’économie durable, d’entreprise durable, de politique durable, et même d’agriculture durable. En même temps que ces différents segments de la société s’adaptent à l’évolution du monde. De la même manière, l’art peut aussi être durable. Et c’est à nous artistes de le prouver. C’est un combat universel et tout le monde doit jouer sa partition. Aussi, comme je l’ai dit, naturellement l’art se base toujours sur son environnement pour performer. Lorsqu’on est artiste, forcement qu’on aime la nature. Et quand on aime, on se doit de défendre», estime le peintre sculpteur
Selon lui, dans toutes les dimensions de la vie, il existe des alternatives durables à nos habitudes jugées accablantes à l’égard de l’environnement. Cependant ces solutions ou alternatives ne trouveront de champ d’application que si nos gouvernements s’engagent dans le durable. C’est pour cela qu’ils sont les premiers à être sensibilisés. «Comme on dit : une information utile est une information utilisée. Après une prise de conscience, une prise de décision. Pour cela il faut à nos dirigeants, et même de partout dans le monde, un brin d’audace. Sans cela le monde aura du mal à aller vers cette transition écologique tant souhaitée», conclut notre interlocuteur.