Du 25 novembre, Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, jusqu’au 10 décembre, Journée des droits de l’homme, la campagne «16 jours d’activisme » contre la violence faite aux femmes donnera l’occasion de dynamiser les actions visant à mettre fin à la violence contre les femmes et les filles partout dans le monde. Cette campagne internationale annuelle a été lancée en 1991. Elle a été initiée par le premier Institut international pour le leadership des femmes et coordonnée par le Centre pour le leadership global des femmes.
‘’Ecoutez-moi Aussi’’, tel est le thème de la campagne. Et de fait, depuis la nuit des temps l’impunité, le silence et la stigmatisation ont permis à la violence contre les femmes de s’aggraver jusqu’à atteindre des proportions de pandémie. Ainsi, une femme sur trois dans le monde subit des violences basées sur le genre. Selon les statistiques, les femmes africaines trainent le lourd bilan de ces violences à cause des pesanteurs socioculturelles. C’est pourquoi la parole sera donnée aux femmes pour qu’elles expliquent les douleurs qu’elles ressentent à chaque coup qu’elles subissent.
En effet, la majorité de ces victimes souffrent dans un silence total. Comme le précise Mme Cissé Aïssata MARIKO, une comédienne à Bamako, une femme mariée qui se confie à sa famille sur ses problèmes de couple, la première chose qu’on lui dit, c’est qu’il faut faire preuve de patience et que tout va s’arranger. « Du coup, ces femmes-là sont toujours renfermées sur leurs problèmes et n’osent pas se confier, ce qui provoque ces cas de violences, car les hommes agissent en toute impunité», a-t-elle déploré. Comme pour enfoncer le clou ; Mme CISSE déplore que toutes celles qui ont le courage d’en parler devant les juridictions, se retrouvent lésées par des décisions de justice qui ne sont guère à la hauteur des actes commis à leur encontre. « Quand il y a des décisions de prises, ce sont souvent des peines courtes : deux à trois ans de prison. Il arrive parfois que les auteurs de ces crimes bénéficient d’une liberté provisoire. Avez-vous déjà vu un criminel en liberté provisoire » S’interroge-t-elle ? Elle a ainsi encouragé les femmes à saisir cette campagne de 16 jours, pour se faire entendre devant les décideurs et les leaders d’opinion. «Je suis heureuse de savoir que le Mali ne restera pas en marge de cette campagne et surtout du thème qui sied parfaitement à notre réalité. Il faut vraiment briser le silence ! J’invite donc mes sœurs à venir témoigner, lors des manifestations », a-t-elle lancé, avant de signaler que cette campagne doit aussi être une occasion pour sensibiliser les hommes à ne plus violenter une femme.
Quant à Mme Founé Bintou SAMAKE, présidente du réseau panafricain de Wildaf-Mali, elle a rappelé que le Mali est partie prenante de presque toutes les conventions de protection et de promotion des droits des femmes. Ce qui est un grand acquis, selon elle. « Mais, aujourd’hui, nous sommes confrontés à l’application de ces textes. Malgré ces conventions, les mœurs maliennes sont très imprégnées et cela est un problème. Il y a les pratiques qui sont très différentes du contenu des textes. C’est ce qui complique beaucoup la situation des femmes au Mali, parce que les gens vivent leurs us et coutumes et ne tiennent pas compte des textes, souvent méconnus », avoue Mme SAMAKE.
Selon l’ONU Femmes Afrique en 2015, le Mali a enregistré 1 468 cas déclarés. Entre les violences physiques et psychologiques, les femmes maliennes feraient face à plus de 20 types de violences régulières.
Signalons que contrairement à ses voisins de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) comme le Sénégal ou le Benin, le Mali ne possède pas de législation punissant les violences basées sur le genre. Cependant, ces derniers temps les hautes autorités politiques et religieuses ont réaffirmé leur volonté d’aller de l’avant pour l’adoption d’une telle législation. Un engouement qui s’est notamment manifesté lors de la séance de plaidoyer sur les violences basées sur le genre avec les hautes autorités religieuses
Comme les années précédentes, ces 16 jours d’activisme permettront aux leaders d’opinion et organisations de lutte pour le droit des femmes de faire des plaidoyers auprès des décideurs du monde entier pour un mécanisme approprié de lutte contre les violences faites aux femmes.