Avons-nous mis fin à une dictature militaire pour nous soumettre à une dictature civile ? Cette question a tout son sens dans le contexte actuel où sévissent des pratiques d’un autre âge dans notre pays. En effet, jamais la liberté de la presse n’a été aussi menacée que sous le régime actuel. Les journalistes sont constamment séquestrés, interpelés devant les tribunaux, dans le but de faire taire le quatrième pouvoir. C’est donc malheureux de constater, de nos jours, des actions dignes de l’époque de la Gestapo.
En effet, après la disparition mystérieuse et incroyable du journaliste Birama Touré depuis janvier 2016, après l’affaire Ammy Baba Cissé face au président de l’Assemblée nationale, l’affaire du journal « Le Sphinx » contre l’Honorable Karim Keïta, et cette descente musclée d’hommes armés et encagoulés dans les locaux du journal en ligne MaliActu le 21 Février 2018 pour y enlever trois journalistes, il faut ajouter, à ce tableau déjà trop noir, le cas du confrère du journal « Le Repère » Nia Diala Keita, victime d’une intimidation de la Brigade anti criminelle (Bac) le mercredi 28 mars 2018 et l’interpellation par les forces de l’ordre du directeur de publication du site « Croissanceafrique.com », Daouda Bary Koné, suivie d’une garde à vue de trois jours, en plus de la fermeture abusive de la radio Renouveau FM. Et la liste est loin d’être exhaustive.
Il est donc important et opportun de mettre l’accent sur la menace et les atteintes à la liberté de presse qui continuent dans la plus grande impunité de leurs auteurs et le dernier cas remonte à presqu’un mois, lorsque des hommes en cagoule ont osé prendre d’assaut, le samedi 15 septembre dans la soirée, la radio RFM du doyen Mamadou Diadié Sacko alias Saxe. Ces faits sont une menace grave, voire un danger pour non seulement la liberté, mais aussi pour la démocratie. Une situation non seulement déplorable et regrettable, mais aussi et surtout condamnable. Il faut cependant mettre l’accent sur la récente répression policière du meeting organisé par le Front pour la sauvegarde de la démocratie (FSD) et la convergence des forces patriotiques pour sauver la Patrie (COFOP). Les journalistes, malgré qu’ils soient indentifiables à travers les gilets attribués par le ministère de la Sécurité, ont été violentés devant la Bourse du travail.
Que le régime arrête ces dérives intolérables ! Les libertés démocratiques chèrement conquises au prix du sang des martyrs au Mali sont de nature constitutionnelle et ne sauraient être remises en cause par qui que ce soit.
Nous constatons que les journalistes maliens sont intimidés dans l’exercice de leur métier. Ainsi, notre confrère du quotidien « Le Pays », Boubacar Yalkoué, sera à la barre demain, jeudi 29 novembre 2018, au tribunal de la commune V du district de Bamako. Ce procès qui l’oppose à la Cour constitutionnelle, est le troisième intenté par les institutions de la République à l’encontre des journalistes en une année seulement : le cas de l’Assemblée nationale à l’encontre d’Amy Baba Cissé du journal le Figaro du Mali, celui de la Cour constitutionnelle contre Dramane Aliou Koné de l’Indicateur du Renouveau.
En clair, les journalistes au Mali sont victimes de nombreuses agressions ne leur permettant pas d’exercer librement leur métier. Ces dernières années n’ont pas été faciles pour les hommes de médias. La disparition sur le sol malien de nos confrères français : Ghislain Dupont et Claude Verlon en 2013, la disparation mystérieuse de Birama Touré, sans oublier les violences physiques et verbales perpétrées lors des différents événements, en sont des illustrations.
En tout cas, le procès de demain, jeudi, n’est pas seulement contre Boubacar Yalkoué, mais contre toute la presse, parce qu’il s’agit d’un délit de presse. A cet effet, nous défendons la plénitude dans la liberté d’expression et non une liberté conditionnelle d’expression. Tout en exprimant mon soutien total et massif à mon confrère Boubacar Yalkoué, je demande une grande mobilisation demain 29 novembre au tribunal de la commune V pour demander l’annulation pure et simple de la plainte.