La Mission internationale de soutien au Mali est désormais transférée à la mission onusienne. C’est à partir d’aujourd’hui que les forces de la Mission multidimensionnelle des Nations unies pour la stabilisation du Mali (Misusma), commencent à se déployer. A la veille de cette échéance cruciale, une mission onusienne s’est rendue hier à Tombouctou. Elle était conduite par le chef du maintien de paix de l’ONU, le Français Hervé Ladsous. Celui-ci était accompagné du chef de « la police » à l’ONU, l’Allemand Stefan Feller. L’officier allemand coiffe trente mille policiers à travers le monde dont 1 500 désormais dans notre pays. La mission à Tombouctou comprenait David Stehl de l’Unesco ainsi que le représentant résident du PNUD et coordonnateur résident du Système des Nations unies au Mali, Aurélien Agbenonci et le général nigérien Abdou Kazam, le commandant adjoint de la Minusma.
Il faut rappeler que le Conseil de sécurité a créé la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mali (Minusma) par sa résolution 2100, le 25 avril 2013. En vertu de cette résolution, la Mission appuiera le processus politique et réalisera un certain nombre d’activités de stabilisation concernant la sécurité, et prêtera une attention particulière à la sécurité dans les principales agglomérations et axes de communication. Sa tâche est aussi de « protéger les civils, surveiller les droits de l’homme, mettre en place les conditions indispensables à l’acheminement de l’aide humanitaire et au retour des déplacés, à l’extension de l’autorité de l’État et à la préparation d’élections libres, ouvertes à tous et pacifiques ».
La Mission opérera « conformément à des règles d’engagement robustes et devra employer tous les moyens nécessaires pour faire face aux menaces à l’exécution de son mandat, qui consiste entre autres à protéger les civils immédiatement menacés de violences physiques et à préserver le personnel des Nations unies de menaces résiduelles, dans la limite de ses moyens et dans ses zones de déploiement ».
À ce titre, la force pourrait réaliser des opérations isolément ou en coopération avec les forces de défense et de sécurité maliennes. Le Conseil de sécurité a également autorisé les forces françaises déployées sur notre territoire à intervenir pour appuyer la Minusma, à la demande du secrétaire général de l’ONU, « en cas de menace grave et imminente ».
De fait, à partir d’aujourd’hui, l’autorité de la Mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine (Misma) est transférée à la Minusma, sous réserve d’un réexamen, par le Conseil de sécurité, de l’état de la sécurité dans la zone de responsabilité de la Mission.
La Minusma comprendra jusqu’à 11 200 membres du personnel militaire, y compris des bataillons de réserve pouvant être déployés rapidement à l’intérieur du pays, selon qu’il conviendra, et 1 440 membres du personnel de police (unités de police constituées et officiers de police).
Il est prévu que la majorité des militaires, des forces de police et des composantes civiles organiques et d’appui opéreront essentiellement dans le Nord, avec éventuellement une base logistique à Gao et Tombouctou, une présence légère, comportant des composantes civile, militaire et de police étant implantée à Bamako.
LA TROISIEME PLUS GRANDE MISSION ONUSIENNE : Hervé Ladsou qui était en visite à Tombouctou, a expliqué que la mission de l’ONU dans notre pays est la troisième plus grande mission onusienne à travers le monde. Ce qui démontre l’importance qu’accorde la communauté internationale à notre pays qui traverse la plus grave crise de son histoire.
Hervé Ladsou et la délégation qui l’accompagnait sont arrivés à l’aéroport de Tombouctou à bord d’un jet allemand mis à la disposition de l’ONU, aux environs de 9 heures. La délégation a été accueillie sur le tarmac de l’aéroport par le maire de la Cité des 333 saints, Ousmane Hallèye Cissé, et de nombreux notables de la ville.
Le programme de visite a commencé par un entretien avec les responsables de l’ONU sur place ainsi que les autorités civiles et militaires, dont le gouverneur de la Région, le colonel-major Mamadou Mangara installé dans les nouveaux locaux fraichement aménagés du gouvernorat. Le chef de l’exécutif régional a fait aux visiteurs, une présentation de la région qu’il administre et du pays en général. « Nous savons que vous avez beaucoup souffert. Dès demain, la Minusma va prendre le flambeau. Elle aidera les jeunes et les femmes à travers des projets d’impacts rapides », a assuré le patron du maintient de la paix de l’ONU en réponse à la présentation du gouverneur qui a fait ressortir les nombreuses brimades que la population de Tombouctou ainsi que des autres régions du nord ont subi pendant l’occupation de cette partie du pays par les extrémistes islamistes, les rebelles du Mnla et les narcotrafiquants.
En précurseur dans la cité légendaire, Hervé Ladsous était venu s’enquérir des problèmes que connaît la ville. Ces problèmes se résument essentiellement au manque d’eau potable et d’électricité et à la situation précaire des réfugiés et déplacés internes de retour.
Au cours d’une rencontre qui s’est tenue à la mairie, les représentants de la société civile ont insisté sur ces difficultés face aux officiels de la Minusma. « Cela fait trois jours que nous n’avons pas d’électricité. Nous n’avons le courant que 5 heures sur 24. La pénurie d’eau, n’en parlons même pas. Il faut vite trouver une solution pour éviter que le désespoir gagne toute la population», a plaidé le coordinateur des chefs de quartier, Soumaïla Hama Maïga qui a été appuyé par un conseiller communal, Boudjouma Elhadj Cissé donnant l’exemple de sa mairie : « Ici, on n’a même pas un groupe électrogène pour faire fonctionner le service ».
La société civile a également expliqué la nécessité de la réhabilitation du Centre des jeunes de Tombouctou. En réponse à cette doléance, le représentant résident du PNUD dans notre pays, Aurélien Agbenonci, a assuré que les ressources financières pour la réhabilitation du Centre des jeunes sont disponibles. Bientôt, une équipe technique se rendra sur place pour les travaux.
Après cette rencontre avec la société civile, la délégation onusienne a mis le cap sur la mosquée Djingareyber, la plus grande de Tombouctou et l’une des plus célèbres de la ville. L’édifice religieux été construite à partir de 1325 sous l’empereur du Mali, Kankou Moussa par un architecte d’Andalousie (Espagne), Abou Ashaq Es-Sahéli. L’empereur a rémunéré celui-ci avec 200 kilos d’or. La mosquée peut accueillir jusqu’à 12 000 fidèles. Elle est construite entièrement en banco, dans un style architectural soudanais et repose sur 25 files de piliers.
Le nombre important de piliers nécessaires pour limiter la portée des voutains, ne permet pas d’avoir une vue d’ensemble de la salle. Une fois par an la population participe à la réfection des enduits extérieurs. La mosquée avait été inscrite sur la liste du patrimoine mondial en 1989. Depuis 1996, elle bénéficie d’un financement du Fonds du patrimoine mondial de l’Unesco dans le cadre d’un projet intitulé : « Sauvegarde des mosquées de Tombouctou ». La mosquée de Djingareyber a été mise sur la liste du patrimoine mondiale en péril en 2012 avec l’occupation du nord par les groupes armés.
Avant de reprendre l’avion pour la capitale, la délégation onusienne a présenté symboliquement à la presse, des bérets bleus.