Chaque année, pour encourager les productions et les consommations locales, une journée est dédiée à l’industrialisation africaine. Le lancement de cette journée a eu lieu le jeudi 29 novembre 2018 et a pris fin le dimanche 2 décembre au Mali. Ne voyant pas jusqu’ici l’impact de cette fête annuelle dans le processus d’industrialisation de l’Afrique et notamment du Mali, nous disons qu’il faut commencer par créer des industries puisque le temps de la célébration ne passera point.
Du jeudi 29 novembre au dimanche 2 décembre 2018, le Mali, à l’instar des autres pays africains, a célébré la journée de l’industrialisation africaine. Cette journée ayant pour objectif principal d’encourager chaque pays à valoriser la production et la consommation locale, à travers la création d’industries adaptées, était placée au niveau national sous le thème « Made in Mali » et au niveau africain « La promotion des chaînes de valeurs régionales en Afrique : un moyen d’accélérer la transformation structurelle, l’industrialisation et la production pharmaceutique de l’Afrique. »
Tous ces deux thèmes, bien que différents, sous un certain aspect se rejoignent par le fait qu’ils incitent tous deux au développement des productions locales. Aucun développement n’est possible sans des industries adaptées, susceptibles de transformer sur place les productions locales.
Mais pour parler comme le ministre de l’Industrie, des petites et moyennes entreprises de la Guinée, Tibou Kamara, lors de cette journée, il existe un « paradoxe » malien. Ce paradoxe réside dans la richesse du sous-sol malien, des activités agricoles et l’absence d’industrie de transformation. Dans une analyse sur maliweb.net sur la production de l’or au Mali, il ressort que « Des « miettes » pour l’État et « la part du lion » pour les sociétés exploitantes. C’est du moins le constat de la plupart des Maliens.
Pendant que la société étrangère exploitante Anglogold Ashanti, se taille la « part du lion » avec 40% pour la mine d’or de Morila, 38% pour celle de Sadiola et 40% pour Yatela, l’État malien, lui, n’a droit qu’â 20% à Morila, 18% à Sadiola et 40% à Yatela. Quant à Randgold, elle bénéficie de 40% à Morila, 40% à Yatela alors que l’État malien ne gagne que 20% à Morila et 20% à Yatela.
À Sadiola, la société lamgold gagne 38% alors que l’État malien n’y récolte que… 18%. La société Avion Ressources, elle, se taille 80% à Tabacoto, tandis que l’Etat n’y gagne que 20%. Avnel Gold bénéficie aussi de 80% à Kalana et l’État malien, 20%. Pendant que l’entreprise Resolute Mining Limited gagne 80% des revenus de la mine d’or de Syama, l’État malien ne tire que 20% de son exploitation. Enfin, tandis que la société Pearl Gold récolte 25% à Kodieran, l’État malien gagne aussi 20% des revenus de cette mine. » « Exploitation minière : part de l’État : 20%, part des sociétés étrangères : 80% ».
Cela voudrait tout simplement dire que faute d’industries toutes les richesses de la nation malienne profitent plutôt aux étrangers. C’est d’ailleurs ce qui explique tout l’acharnement d’Etienne Fakaba Sissoko à la veille des campagnes présidentielles du 29 juillet 2018. Celui-ci décriait en effet ce mode de production et proposait un regard nouveau afin que les localités victimes de ces exploitations profitent grandement des bénéfices de leurs richesses. Qu’en est-il de la situation de l’Office du Niger ?
Les riz produits dans cette zone étant de bonne qualité sont détournés de la population de par sa cherté. Durant la campagne agricole 2017-2018, il ressortait une production de 727 910 tonnes de riz paddy. Mais toutes ces tonnes seront en grande partie orientées vers l’étranger. Cela reste de même pour le coton. En 2017, le Mali est revenu sur sa position de premier producteur africain de coton avec 1 million 330 balles de fibre blanche. Mais pour quel revenu pour le Mali ?
Toutes ces remarques visent à montrer à combien l’absence d’industries condamne le pays au sous-développement. C’est la raison pour laquelle les pères de l’indépendance, notamment le président Modibo Kéita, n’ont pas badiné avec la création des industries. C’est ce qui ressort d’ailleurs de cet article d’André Malraux, « Les industries du Mali. In: Cahiers d’outre-mer. N° 159 – 40e année, Juillet-septembre 1987 »: « La valorisation des matières premières locales, la substitution aux importations d’une production locale de biens de consommation, l’accumulation de capital, forment la trilogie des priorités. »
C’est encore de là que nous nous rendrons compte d’un autre paradoxe du Mali à savoir le développement de l’agriculture sans l’industrialisation. Pendant que la première occupe 95% de la population, la seconde n’occupe que 3%. En 2015, au Mali, on recensait 829 entreprises industrielles, dont 765 seulement en activité. Un taux vraiment faible vu toute la richesse du pays en matières premières. Or, de tout temps, les intellectuels, de part et d’autre dans le continent, ont demandé l’appropriation du secret de l’occident afin de se développer. Ce secret, ils en conclurent que c’est la science et la technologie.
C’est la raison pour laquelle, Marcien Towa, camerounais, a soutenu cette création d’entreprises locales afin de transformer ce que nous produisons et consommer ainsi nos productions locales. Cela se faisant, les importations pourront s’amoindrir pendant que les exportations augmentent. Le développement de nos nations sera assuré. Toutes les grandes puissances du monde doivent leur position à une forte industrialisation.
La journée de l’industrialisation au Mali ainsi que dans la plupart des pays africains n’est que du folklore. Commencer par créer les industries, après le temps de la fête viendra.
Ce n’est pas en un ou deux jours que vous allez montrer que vous accordez une attention particulière à la création industrielle. Celle-ci n’est pas que théorique, elle est plutôt et exclusivement pratique. Il faudrait juste augmenter le nombre des industries pour qu’elles soient réellement visibles.
Le temps n’est pas encore à la fête, mais au travail pour réduire le taux de migration irrégulière, du chômage voire de l’insécurité par la réduction du nombre de jeunes qui rejoignent le rang des terroristes.