Question à dix sous ! Où se trouve le Luxembourg ? En commune IV du District de Bamako, me répondriez-vous. Vous n’y êtes pas du tout et, de façon triviale, je vous rétorquerai que vous êtes complètement à côté de la plaque. En effet, si l’Hôpital Mère-Enfant Le Luxembourg, sis à Hamdallaye, est le fruit d’un partenariat fécond entre la Fondation pour l’Enfance de l’ancien couple présidentiel TOURE et le Grand-Duché de Luxembourg, il faut savoir que nous parlons d’un Etat souverain.
Comme disent les Anglo-saxons, « small is beautiful » : le Luxembourg est un tout petit pays européen de 2586 Km2 (moins de la superficie du District de Bamako) pour moins de 600.000 habitants (Niamakoro, en Commune VI, en compte presque deux fois plus) , immensément riche, coincé entre la France, la Belgique et l’Allemagne. Selon le FMI, « … le Grand-Duché de Luxembourg présente le deuxième PIB par habitant le plus élevé au monde (75.100 Euros). Sa capitale Luxembourg accueille plusieurs institutions européennes ainsi que le siège européen de plusieurs sociétés multinationales. Le Luxembourg est également connu pour son attractivité sur le plan fiscal. Pas moins de 144 banques y sont représentées et le pays est devenu la place la plus importante d'Europe sur le marché des fonds d’investissement ».
Un petit pays multilingue (on y parle officiellement le luxembourgeois, le français et l’allemand) qui joue dans la cour des grands et qui fait pâlir de jalousie les voisins. Enfin, pour ceux qui ne le sauraient pas, le Luxembourg est la patrie de Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne. Sa coopération avec le Mali est relativement jeune ; elle est discrète mais très active et intervient surtout dans des secteurs comme le développement local, l’éducation, l’humanitaire. Dans ses interventions, cette coopération utilise parfois des mécanismes propres au Benelux (Belgique – Pays Bas – Luxembourg), groupe de pays auquel il appartient.
Le prétexte de ma chronique d’aujourd’hui, c’est que le pays a décidé le 06 décembre dernier qu’à partir de 2020, il rendrait gratuits tous ses transports publics. Gratuits, vous avez bien lu ! Sans un sou débourser pour emprunter les transports publics du Grand-Duché. Derrière cette gratuité programmée se cache une volonté manifeste de « faire baisser le trafic automobile dans un pays devenu très attractif (…) et à donner la priorité à l’environnement ». La coalition victorieuse du Premier ministre Xavier Bettel en avait fait son cheval de bataille lors de la récente campagne électorale des législatives. Ses partenaires du parti ouvrier socialiste de gauche et les Verts l’y poussent résolument et applaudissent des deux mains.
L’annonce qui a surpris toute l’Europe fait l’objet d’une réforme bien mûrie inscrite officiellement au programme du gouvernement, et on connaît même les grands détails de son chronogramme de mise en œuvre. En effet, selon les termes de l’annonce, les amendes pour non présentation de titres de transports dans les trains, tramways et bus seront levées dès l’été 2019, grâce aux plans du gouvernement de coalition qui a été assermenté pour un second mandat mercredi 5 décembre. Et dans la foulée, dès le début de l’année 2020, la gratuité va peu à peu se généraliser sur l’ensemble des réseaux du Grand-Duché.
Ceux qui sont familiers du pays savent que, depuis le 1er août 2018, tous les étudiants inscrits dans un établissement d’enseignement supérieur du Luxembourg bénéficient déjà d’une « mKaart » permettant de prendre les transports en commun gratuitement. « Cette carte est nominative et permet aux usagers de voyager gratuitement sur l’ensemble du réseau luxembourgeois, et pas uniquement dans la capitale. Elle comporte une validité d’un an et est renouvelable à condition de présenter un certificat d’inscription dans un établissement d’études supérieures du Luxembourg ».
Pour votre gouverne, je me dois de vous préciser que les routes du Luxembourg sont saturées par les travailleurs frontaliers qui sont naturellement attirés par des salaires bien plus attractifs.
Des milliers d’actifs français, allemands et belges se rendent tous les jours au Luxembourg où ils ont leur emploi. A l’aller comme au retour, ce chassé-croisé quotidien engendre des bouchons dignes des « go slow » de Lagos. Selon une étude de la société américaine Inrix, ces automobilistes ont passé, en moyenne, 33 heures dans des bouchons durant l’année 2016. Une situation qui constitue une gêne pour l’environnement et la mobilité des personnes dont la France et le Luxembourg ont pris la juste mesure puisque, au printemps dernier, ils ont signé des accords pour dégager d’importants investissements en faveur des transports en commun entre les deux pays.
Selon les informations publiées dans la presse locale, la France et le Luxembourg ont mis pas moins de 240 millions d’euros dans une cagnotte pour ouvrir divers chantiers en faveur des trains, du covoiturage ou encore des solutions de transports qui favorisent les transports collectifs.
Pour conclure ce petit conte de fée, je suggère fortement aux édiles de Bamako et des grandes villes du Mali de négocier des voyages d’études au Luxembourg pour s’inspirer de ce qui se fait de mieux dans ce pays en matière de transports en commun, de voirie, de gestion des parkings, des espaces verts… En un seul petit mot, de bien-être des citadins.